Faire plus de trois cents bornes en voiture, en plein mois d’août, sous une canicule pas possible, sur une autoroute avec la climatisation en panne : il faut être complètement fou !Je ne me rappelle pas quand, comment j’ai pris le volant, ni le paysage, ni les panneaux de direction, ni les musiques à la radio, ni rien, juste en mode pilotage automatique dans ma tête avec le cerveau bloqué sur mon scénario le plus dément, le plus insensé qu’il soit.Je ne me souviens même pas d’avoir fait une pause ou fait le plein d’essence. Pas de notion du temps écoulé non plus. Je sais juste où je vais et pourquoi, ce qui en soi est l’essentiel.Mais tu es complètement débile. Qu’est-ce qui te prend ?Je suis là , destination atteinte, enfin. Il est plus de 23 heures, la voiture garée sur un parking d’une petite aire d’autoroute du sud-ouest. C’est un lieu connu pour les rendez-vous entre hommes, juste entre hommes curieux, des gays, des bisexuels ou autres. J’observe le va-et-vient des véhicules, un ballet de voitures ou camions, qui se garent, repartent (ou pas).Le flot de circulation se ralentit, mais pas l’activité sur le parking. Des silhouettes se glissent furtivement entre certains emplacements tels des papillons, disparaissent, reviennent dans le silence étouffant d’une nuit d’été.En jeans, tee-shirt et baskets basses, je sors de ma voiture que je ferme d’un bip, je me dirige vers les toilettes m’attendant à .… Quoi, d’ailleurs ?Qu’est-ce qu’il a pu se passer dans ma tête ? Il est encore temps de faire demi-tour… NON ! Je regarde autour de moi. Personne ou du moins personne ne me remarque, je peux y aller. Je me dirige, d’un pas que je veux ferme, déterminé vers les toilettes de l’aire de repos. J’entre, une légère odeur un peu âcre me chatouille les narines. Les toilettes toutefois ont l’air propre. J’avance. Des bruits étouffés me parviennent comme… des gémissements. Des bruits amortis se diffusent dans la nuit, sous un éclairage incertain et diffus. C’est bien l’endroit.J’ai de la compagnie. J’écarquille les yeux.Des ombres de dos, des hommes s’agitent, bougent, non, glissent plutôt dans un mouvement ondulatoire, avec des sons agrémentés de « mhums » ou « sluurps », dans un concert de gémissements, de halètements…Un homme au milieu, à genoux, torse nu, le pantalon déjà baissé et le fessier à l’air. Je découvre une ronde masculine autour de lui, qui se déplace telle une vague dans un mouvement chaloupé de va-et-vient. Ils sont accompagnés de leur main sur leur sexe ou de leur bassin : la danse de la sarbacane.La boule au ventre (je suis un peu timide quand même), j’avance doucement.Ces hommes se caressent le torse et les tétons en se masturbant, ils se branlent individuellement, parfois l’un l’autre de concert autour de cet homme au milieu. Je reste impassible, je m’attendais à ce spectacle.L’un taille une pipe à son voisin tandis qu’il s’astique son piquet fièrement dressé de plus en plus vite. Celui du milieu est déjà en pleine action et a quelques filets de sperme sur le visage, sur le torse, le regard béat. Braguettes simplement ouvertes ou pantalons en bas, où que je regarde je ne vois que des bites, des queues.Totalement à mon scénario cérébral absurde, je hume, je détaille, j’observe et apprécie… Je cherche l’improbable dans le tout qui peut arriver.Vais-je trouver ce que j’attends ? Je cherche une bite à sucer.Fantasme ? direz-vous.Non, ce n’est pas le terme exact, j’ai plutôt un scénario circonstancié dans la tête, dans un but bien précis que seule ma logique trouve cohérent et que je concrétise.Je ne recherche pas n’importe quelle bite, mais une belle queue érigée, dressant sa tête fièrement vers le ventre, le gland gonflé, suintant légèrement, cognant sur le bas ventre à la moindre contraction spasmodique involontaire des abdos, sur les poils fins dressés en ligne sagittale du nombril au pubis, ce sentier heureux, mon délirant « happy trail » à moi, mon « kiff » personnel ancré dans une idée fixe.Rien que d’y penser en cet instant, mon corps s’électrise automatiquement.Ça m’émoustille, ça m’émeut, ça me rend tout chose un bel organe, ni trop épais, ni trop long surtout avec cette ligne poilue au-dessus.Avec ces confinements répétitifs durant la pandémie, les plateformes et streamings ont explosé leur compteur, moi aussi j’ai explosé en découvrant de beaux sexes érigés et une attraction particulière pour eux.Peut-être sont-ils ma solution pour sauter le pas ?J’aime aussi les poils, ils ont un effet électrisant pour moi, surtout torse contre torse. J’ai horreur des sexes masculins entièrement rasés, la mode du rasé/épilé donne une impression plus imposante de l’organe certes, je comprends très bien le côté rassurant de cette perspective pour certains, mais la broussaille naturelle taillée, entretenue me convient parfaitement. Des poils, oui, mais pas de type « bear ». Le physique masculin dans toute sa splendeur… le viril, mais sans le laisser-aller, quoi !J’en baverais presque, j’ai le cœur qui palpite, s’accélère, car, soudain… Je l’ai en ligne de mire. Elle est là ma queue rêvée. Je l’ai enfin trouvée.À petits pas décidés, j’avance à nouveau, certains s’écartent, je me faufile entre eux en croisant des regards masculins interloqués, voire désapprobateurs pour certains, mais surpris en général. Je rigole intérieurement.Calmez-vous mes chatons, je ne mords pas.J’avance lentement mais sûrement vers l’objet de ma convoitise un sourire en coin aux lèvres. Ma langue, malgré moi, humecte mes lèvres sèches entre envie et gourmandise, peut-être appréhension aussi, on le serait à moins. Je ne vois rien d’autre au-dessus de sa poitrine, tout y est : un magnifique service trois-pièces avec un joli gland « cut » écarlate et des poils bruns où il faut en ligne descendante du ventre vers son sexe, un buisson ardent bien taillé.Il ne faut pas que je tarde trop de peur qu’un autre ne le prenne en main avant moi.Oh, et cette main, sa main qui glisse de bas en haut, de haut en bas joue une partition pour une ode au plaisir, s’arrête et reprend la danse avec une légère torsion du poignet de temps en temps. Cette main rhaaaa cette main, je l’imagine déjà sur moi…Hop hop hop, on se calme, tu es là pour sucer la queue de tes rêves et non pour caresses et plus si affinités.On procède par étape, c’est dans ton scénario improbable où tout peut arriver.J’avance doucement vers « ma proie ». Ne pas l’effrayer, ne pas me précipiter. Ce sexe m’attire, me tente, je salive, je déglutis, je m’approche le souffle coupé. Il est tel que je l’avais imaginé dans mon script intime. Je pose enfin ma main délicatement sur le bas de son ventre.Est-ce que j’irai jusqu’au bout de mon délire incongru ?Je ne peux plus reculer. Je lève mes yeux et capte son regard mi-interloqué, mi-amusé. Il esquisse un sourire avec une petite fossette en longueur sur la joue gauche. Mhuumm, ce regard… Je me lance et j’ose en lui demandant d’un simple :Il comprend de suite et acquiesce en hochant la tête posément, nullement déstabilisé.Doucement, je m’accroupis et stabilise ma position, ma main droite déjà posée sur son étendard demi-érigé et moite. Il s’agite et palpite dans ma main, dans mon ventre aussi d’ailleurs. Ma bouche salive énormément, j’ai trop envie. J’humecte de ma langue l’extrémité de son gland et sa couronne, les titillant à tour de rôle, je vois son ventre se contracter légèrement. Sa respiration saccadée s’accélère, je retiens presque mon souffle de mon côté, c’est insoutenable, plus rien ne compte autour.Après avoir glissé mon autre main dans mon jean, je me caresse doucement. Sa queue frémit, se soulève entre mes doigts. Mes lèvres glissent le long de sa hampe majestueuse, je lève mes yeux vers lui et plante mon regard dans le sien, on est comme accroché. Je me régale de jouer de ma langue sur lui à la découverte de son sexe bouillonnant, ma main caresse délicatement ses tendres duveteuses. Ma bouche remonte et je joue de ma langue sur le frein. Il gémit.Doucement, tantôt de ma langue en circulaire, tantôt le long de sa tige, j’entame un massage baveux en alternant avec ma bouche descendant et l’enfermant dans la douce moiteur de ma cavité buccale, puis je desserre en remontant. Je l’aspire de nouveau dans mon étroit fourreau. Son bassin ondule en accompagnant ma bouche venant à ma rencontre et « comme un boomerang, je sens des boums et des bangs » dans mon ventre.Ses mains se posent de chaque côté de mon visage, nos regards ne se quittent plus, les souffles s’accélèrent ponctués de petits cris, de gémissements.Plus rien n’existe autour de nous, ni le temps, ni les autres. J’accompagne ma douce fellation de ma main le masturbant ou bien ralentissant nos mouvements, selon. On va calmer le jeu un peu.On se découvre… Je l’observe, je comprends aux contractions des muscles de ses cuisses ce qu’il aime et j’en profite.Non, je n’ai pas fait toutes ces bornes pour rien…Crescendo, la cadence augmente au gré du plaisir qui monte. Il caresse mes cheveux puis cherche à accélérer le rythme en forçant ma bouche plus profondément. Alors ma langue entame une danse endiablée autour de son gland, qui coule puis ralentit pour redescendre le long de son sexe, petits bisous aux valseuses, ma bouche englobe une orpheline pendant que ma langue tapote la peau fine et sensible. Je reprends le jeu en main.Il se penche vers moi pour murmurer d’une voix déjà éraillée par le plaisir un « encore, oh oui, c’est bon ». Je reprends donc en léchant son sexe durci de haut en bas comme une glace, je salive énormément. Ma bouche devient son fourreau qu’il enfourne allégrement avec un rythme plus soutenu cette fois.Les mouvements de son bassin sont de plus en plus saccadés, ponctués de gémissements plus prononcés. Mes doigts caressent ses cuisses, ses poils longs et fins, remontent le long de ses hanches… pour atteindre cette ligne entre le nombril et la touffe au-dessus de sa queue. Que c’est bon !Un ballet de douceur, un quatuor de mains qui se croisent, se décroisent, de regards flous qui se retiennent et se quittent pour rejoindre chacun l’intimité de ses pensées, le corps abandonné. Il est endurant le bougre, j’ai la mâchoire qui fatigue entre léchages, aspirations, sucions. Ses mains glissent vers moi, massent ma poitrine, me titillent gentiment les tétons, mais efficacement.Maintenant, je gémis à mon tout, me tortille sous ses caresses. Je me liquéfie sur place tellement c’est intense. Reprendre le contrôle ou laisser-faire : dur dilemme !Plus de notions de temps, d’endroit, d’espace, un nuage en instance de flottaison entre irréalités et mon rêve. J’oublie tout, je ne suis que sensations, pulsions, dans mon kif de ma thérapie par le mâle. Frissons, frémissements, contractions, mon corps, son corps ondulent à l’unisson.Le mouvement se fait plus rapide, plus intense, plus profond aussi. L’échéance sans retenue menace, arrive. C’est l’explosion.Je n’ai pu me retirer à temps, l’aurais-je voulu d’ailleurs ? Quatre/cinq giclées atteignent ma glotte, je déglutis tant bien que mal, avale le tout. Mon corps n’est que frissons, j’ai les poils électrisés comme en érection sur mes avant-bras. Pendant que mon partenaire faiblit, je continue de le solliciter doucement comme pour le calmer ou remercier ce sexe impétueux. Je me relève… groggy dans un état second.Et comme d’habitude, je vais prendre la fuite après ce coup du soir.Ne pas m’attacher, sans regret, sans un regard, mais à l’intérieur tout s’effondre comme à chaque fois. Mes valeurs, mes codes, mon éducation, mes croyances familiales, j’ai voulu tout bousculer ce soir… passer outre mes barrières.Vite la voiture, refuge, partir, partir loin…Je rejoins ma voiture, sur le parking de cette aire d’autoroute si particulière.Bip d’ouverture, et au moment d’ouvrir la portière pour m’engouffrer, deux mains surgissent derrière moi, deux bras de chaque côté sans me toucher se posent pour refermer cette portière fermement, je suis comme dans un écrin me coupant du monde en suspension hors du temps. Je sens juste la chaleur de son corps derrière moi, juste son souffle sur ma nuque sensible.Dans la nuit faiblement éclairée par un lampadaire, dans la vitre j’aperçois son reflet, il est là . Un regard goguenard, mais doux qui pénètre le fond de mon âme comme pour lire en moi. Les yeux ou les miroirs de l’âme me trahissent… La charge émotionnelle trop forte, mon menton, ma tête s’affaissent sur mon cou, je dois retenir mes larmes, les larmes de mon intérieur maléfique et détraqué.Son souffle dans mon cou, je frissonne malgré moi… Je me tais, j’attends, je me retiens à la voiture de peur de glisser par terre tel un pantin désarticulé… Je ne gère plus mes émotions d’un trop plein, j’en tremble. Lâcher prise, se laisser faire, me laisser faire, il me plaît, mais ça ne mènera à rien. Je me sens faible, avec mes incertitudes, mes doutes, mes peurs et des questions.Je ne m’attendais pas à ce retournement de situation, je ne l’avais même pas envisagé dans mes scénarios les plus fous.Instant de sidération, ma respiration s’est presque arrêtée sous le choc de sa présence pourtant qui n’est pas menaçante, bien au contraire.J’ai envie de partir en me dissociant de cet instant qui me provoque trop d’émotions fortes ingérables, cette hypersensibilité à fleur de peau qui me rend mal à l’aise au point d’en avoir la nausée, d’être là sans être là comme un autre moi à ma place.Je sais bien le faire, j’ai appris depuis longtemps à fuir dans ma tête, protéger mon esprit à défaut de n’avoir pas pu protéger mon corps d’enfant d’un prédateur autrefois.Mais là , je n’ai plus la force d’être vraiment moi, de me laisser porter, d’accepter l’autre, de m’accepter moi, d’accepter mes envies, de répondre à mes désirs, de démonter mes mécanismes d’autodéfense durement acquis, mis en place au fil des années pour me protéger, pour continuer à faire semblant de vivre tant j’ai une peur viscérale, instinctive, presque animale des gens en général et des hommes en particulier.Alors je me lance des défis improbables pour apprendre à vivre, et non survivre.— Ce n’est pas commun qu’une femme vienne dans ce genre d’endroit réservé au sexe entre hommes, remarque-t-il d’une voix grave et profonde qui m’envoûte déjà .Que répondre à ça ?