Chères lectrices, chers lecteurs.Il y a de cela quelques jours, je commis deux textes que j’expédiai à votre site préféré. Au mien aussi par la même occasion.Que n’avais-je fait…Je reçus illico des messages des correcteurs et correctrices :« Ouais, t’as fait des fautes d’orthographe »« Pis des accords de temps ! »« Inadmissible. Tu me recopieras trois fois chaque texte. »Vous essayez de donner des explications, genre :« J’ai des soucis de santé. »« Je remplissais ma déclaration d’impôts. »Réponses :« Veux pas le savoir ! »« J’avais une gastro. »« Mon cul ! »Vous devez savoir que les correcteurs sont féroces. Je n’ose le dire, mais ils en sont arrivés aux châtiments corporels, la fessée cul nu. Chez eux, une correction ce n’est pas seulement corriger une copie.Demandez à Brodsky, le pauvre… Je vais un jour sur deux chez mon comparse pour passer un onguent sur son joufflu rebondi, uniquement les jours pairs. La comtesse s’en occupe les jours impairs.Donc, je vous passe les coups de martinet sur mes fesses nues ; heureusement, je suis très poilu : ça atténue les chocs.J’arrête cette digression pour vous narrer les affres d’un gars comme moi, pas très doué avec la langue… Je vois se marrer Patrik au fond du site ! Je vous demande de vous arrêter.Je disais donc combien il est difficile d’écrire.Il faut d’abord trouver une idée, très délicate opération que d’attraper ces petites choses fragiles, fuyantes, fugaces. Des feux follets.Une fois que vous vous en êtes saisi, sans l’abîmer vous la placez dans un bocal à l’intérieur de votre cerveau, avec de l’eau et de la nourriture, énormément de tendresse et d’attention.Parfois le hasard fait bien les choses ; vous tombez sur un article, un reportage qui vous titille les neurones. D’autres fois, vous vous inspirez d’une histoire qui vous est réellement arrivée. Ou une histoire qui vous tient à cœur, souvent les tristes.Quelquefois, d’une discussion avec un ami vient l’inspiration. Ou carrément de l’ami lui-même, comme ce très gentil géant farfelu et ses deux frères. Ils existent vraiment et sont encore plus frappadingues et sympathiques dans la vie que sous mes fades descriptions.Parfois vous laissez libre cours à votre imagination ; vous vous laissez emporter par un doux délire. Ou carrément un pétage de plombs.Exemple : je passais mes vacances près de Bugarach en regardant la coupe du monde de foot et lisais un article sur une Américaine persuadée d’avoir été enlevée par des extraterrestres. Bingo ! Coupe du Monde.Vous pouvez être malheureusement dépassé par les événements. Je voulais écrire un texte de politique-fiction, un homme politique qui, pour financer sa campagne électorale, tringlait une petite vieille friquée et un peu zinzin. Elle lui donnait pour ces quelques coups de queue de grosses liasses qu’il planquait en Suisse pour s’acheter ensuite une bicoque à St Barth…Manque de pot, ils ont fait pire !Votre histoire est à peine plus chaude que les lettres de madame de Sévigné.Une fois que vous avez capturé votre idée, le plus dur commence.La mettre sur le papier, la rendre intéressante, faire en sorte que cette idée devienne un texte qui vous tienne, cher lecteur, qui vous accroche, qui vous colle le cul sur votre siège. Qui vous fasse pleurer de rire ou d’émotion. Qui vous fasse frétiller le bigoudi.En effet, une histoire qui vous semble au départ intéressante se révèle en fait impossible à écrire ; vous vous retrouvez vite coincé. Ce que l’on nomme une impasse.Au contraire, vous sentez parfois habité ; quelqu’un au-dessus de votre épaule vous dicte presque le texte.Vous vous posez face à votre clavier, ou face à votre cahier (j’aime encore travailler à l’ancienne, entendre glisser le crayon sur le papier). Cela m’oblige à recopier le récit sur l’ordinateur, avec un souci : je n’arrive que difficilement à me relire.Vous avez déjà votre trame, un petit schéma directeur.Vous visionnez la situation, vous ajoutez les indispensables scènes de cul, sinon il y en a qui gueulent et vont sur des sites concurrents, là où les fautes d’orthographe se le disputent à la vulgarité. Si, je vous l’assure : ça existe ! Je ne vous donnerai pas les noms, sinon Gufti va encore me tirer les oreilles.De temps en temps vous allez chercher un renseignement sur Internet, genre d’où peuvent venir les Zlagouilliens, à qui pourrait ressembler cette chanteuse célèbre.Ou alors vérifier l’orthographe d’un mot sur le dictionnaire ; le pluriel d’un mot composé par exemple. L’horreur absolue ! Des escabeaux, un escabal ?Je ne fais pas trop confiance aux correcteurs d’orthographes automatiques, celui d’Open Orifice par exemple. Si j’écris « Je suis allé » ou « Je suis aller », il n’y voit que du feu. Pourtant, il y a une faute.En Ardèche, on dit même « Je me suis tombé sur le ventre », et dans les Vosges « J’ai mal le ventre ». Ceci pour vous expliquer que vous n’êtes pas dans le pétrin si vous voulez faire un texte un peu régional.Autre problème : la crédibilité, le réalisme.Vous êtes avec votre moitié, vous discutez avec elle ; quel est son sujet de prédilection ?Le CAC 40 ? Le 49.3 ? La taille de la b… du président ? Ce que vous allez faire ce soir avec vos amis, les voisins et voisines, et même le curé ?Non. Sa préoccupation première : son poids.« Tu ne trouves pas que j’ai grossi ? »« Comment vais-je entrer dans mon maillot cet été ? »Même lorsque vous parlez sexe, elle ramène le sujet sur les kilos en trop.« Lors de notre dernière partouze, j’ai bien vu que tu n’avais d’yeux que pour cette Barbara. Je suis plus grosse qu’elle. Tu la préfères à moi. JE SAAAIS QUE J’AI UN GROOOS CUUUL ! »Et là, crise de larmes.Tout en sachant que ladite Barbara fait la même crise à son mari.Si elle vous demande « Comment trouves-tu mes fesses ? », ne répondez pas « Très facilement ! » : vous vous prenez une baffe.Essayez toujours de distiller quelques doses d’humour.Des scènes de cul à répétition, un catalogue de La Redoute des activités sexuelles, c’est vite gerbant. Rions, mes frères, la vie est déjà trop triste pour que l’acte d’amour le devienne aussi.Vous cherchez de même des positions érotiques sur Internet, des façons de faire l’amour.« Du sexe, nom de Dieu ! » réclame le lecteur à cor et à cri.Vous êtes toujours obligé de rester crédible ; relisez certains auteurs : il est impossible de réaliser les positions qu’ils décrivent, à moins d’être moitié reptile, moitié humain.Exemples :— Vous ne pouvez pas vous lécher le trouduc, à moins d’être chat ou de posséder une langue de 70 centimètres !— Vous ne pouvez pas titiller le fion d’une dame avec la langue, l’embrasser sur la bouche et lui lécher les narines EN MÊME TEMPS ! Quelqu’un me dit « En passant par l’intérieur. » Merci, Démon, je vérifierai.De même, vous en rencontrez souvent, Mesdames, des types dotés d’un engin de trente centimètres de long et dix de diamètre ?Ah bon ? Vous avez mesuré ?Ah, c’est ce que je me disais aussi !À mon avis, si vous receviez un truc pareil dans le cul, vous ne pourriez pas vous asseoir sans un coussin, et ce pendant une semaine. Ne prenez pas comme argent comptant tout ce que vous racontent certains hommes. Mesurez ! Promenez-vous toujours avec un mètre de couturière.Pour votre gouverne, un pénis normal fait 13,9 centimètres de long en érection, et c’est une moyenne ; ça veut dire qu’il y en a de plus petits. Tylodine me dit que c’est une étude anglaise, et que les Anglais ont de petites bites. Ce n’est pas faux.Pour mon compte personnel, je suis content. Je fais partie de la moyenne haute : plus de 17 centimètres. Ma tendre et douce vient de revérifier.Si vous avez des doutes, Mesdames, je me tiens à votre disposition.De même, en ce qui concerne la quantité de sperme, on vous explique qu’il y en a des tonnes et des tonnes, que ça dégouline de partout, que vous vous noyez sous des litres de foutre.Faux : en règle générale, nous n’exprimons qu’une cuillère à café, 5 ml ! Et encore, dans les bons jours, à burnes reposées. Juste de quoi sucrer votre café. Un nuage de sperme dans votre thé.Alors quand un gus vous raconte que sa bite c’est le Old Faithful à Yellowstone, le Strokkur en Islande ou l’Intermittente à Vals-les-Bains, que quand il jouit il est capable de refaire le crépi de la cuisine, c’est du pipeau ; il vous la met profond, si j’ose m’exprimer ainsi.Désolé, Catherine, je deviens vulgaire, mais je m’explique.Je suis même sûr d’avoir lu un jour un texte où le gugusse avait tellement déchargé qu’ils ont utilisé les surplus pour confectionner des meringues, distribuées au couvent des Ursulines voisin.Une autre légende tombe. Paraît que nous avons un sperme au goût suave ; du nectar, de l’ambroisie.Faux : son goût varie en fonction de notre alimentation.Si nous bouffons des choux de Bruxelles, il aura le goût du chou de Bruxelles.C’est pour cela que je fais manger à mes héros des mets délicats. Pour que mes héroïnes aient les papilles qui frétillent.Du chou de Bruxelles ! On n’a pas idée… Et je ne vous parle pas de l’odeur des pets !Si je vous rédigeais un récit où un homme et une femme font des galipettes après avoir mangé des choux de Bruxelles, au terme d’un 69 ils se lâchent et meurent asphyxiés ? Ça vous dit ?Vous êtes choqués ? M’en fous. Certains adorent le pipi ; moi, ce qui me fait marrer, c’est le pet. Rappelez-vous, bandes de faux-culs, la reine d’Angleterre hospitalisée à cause de flatulences… Osez dire que vous ne vous êtes pas marrés !Idem pour vous, Mesdames. Vous n’avez pas toutes le même goût, et vous variez selon des agents extérieurs.Mais non, Cyrielle, un agent extérieur n’est pas une matraque de gardien de la paix !Il y a aussi ces types qui baisent à couilles rabattues. Et que je te tringle une dizaine de fois dans la soirée. Tout un chacun sait qu’au bout de trois ou quatre tirs, c’est Waterloo, morne plaine. À moins de prendre des petites pilules bleues.De même, ne vous est-il jamais arrivé, Messieurs, le coup de la panne ? Votre phallus plus ou moins impudicus ne veut rien savoir, rien entendre, rien voir. Recroquevillé dans ses poils.Ne me dites pas que cela ne vous est jamais arrivé, submergé par trop d’émotions devant une femme tellement belle que vous désirez tant, que vous aimez tant, qu’elle vous fait perdre tous vos moyens. Ou un autre homme, Messieurs, ça arrive aussi : je suis ouvert à toute situation.Couic, Popaul aux abonnés absents.Les femmes sont, elles aussi, toujours décrites fraîches et agréables. Il me semble pourtant qu’une fois par mois elles sont indisposées et à ne prendre qu’avec des pincettes. Faudra un jour que je vous concocte quelque chose sur le sujet. Gufti et Bazouk sauraient-ils si le thème a déjà été abordé ?Pour ma part, en auteur sérieux, j’expérimente les positions avec ma compagne. Je ne tiens pas à raconter de conneries, ou pire, provoquer chez mes lecteurs un tour de reins ou un bungalow. On dit lumbago ? Désolé.Je veux savoir si ces acrobaties sont réalisables.Parfois, il faudrait posséder cinq mains et avoir une queue préhensile.Certaines fois, elle me traite de grand dégoûtant. De pervers : « Non mais, ça va pas la tête, non ? Espèce de grand malade ! »D’autres fois, ces expériences se terminent très bien. Merci de vous soucier de moi.Bref, toutes vos recherches terminées, vous vous attelez enfin à votre ouvrage, vous vous isolez dans votre petit monde.Une sublime créature vient vous passer la main dans le calbute…C’est là que le téléphone sonne…Parce que vous êtes Monsieur ou Madame tout le monde. Vous êtes chez vous, dans votre salon, chambre, bureau ; pas dans une pièce isolée du monde extérieur avec un garde du corps posté à l’entrée.— Allô, boulangerie Les Belles Miches ?— Nan ! Y’a pas d’belles miches ici !Ou alors c’est le mobile qui stridule dans vos oreilles et votre beauf qui hurle « Alors, quand k’cé ktu viens passer le veekende chez nous ? »Là, deux solutions : manger le clavier ou aller fendre un peu de bois de chauffage.Il m’arrive de mélanger les deux.Lorsque vous êtes bien lancé, votre chère et tendre se ramène et commence à vous raconter ce qu’elle vient de voir en faisant pisser le chien ou en allant acheter le pain : « Tu sais, la voisine… blabla… »Ou alors elle se pose des questions existentielles à haute et intelligible voix :« Tu n’aurais pas vu mon chemisier bleu ? »« Que veux-tu manger ce midi ? »« J’ai envie de faire pipi ! »Vous abandonnez tout et vous remettez votre ouvrage au soir, ou à la nuit ; vous serez peinard, pensez-vous.Erreur fatale.Votre compagne arrive alors en nuisette très courte et très transparente.— Que fais-tu, mon chéri ? Tu ne viens pas te coucher ? vous dit-elle d’une voix pleine de promesses.— Beuh, pff, tout compte fait, je n’ai pas de choses urgentes à faire, ça peut attendre ; j’arrive, mon minou.Les femmes qui écrivent sur ce site n’ont peut-être pas ce genre de problème. Leur mari regarde le foot sur Canal en se grattant les couilles et buvant une bière. Ou regardent le film du premier samedi du mois, toujours sur Canal.En parlant de minou… Autre sujet de distraction : LE CHAT !Vous vous imaginez ce petit félin comme l’ami de l’écrivain, l’inspiration sur pattes, si doux, si tendre, si délicat. Un coussin ronronnant.FAUX : le chat est un animal démoniaque, perfide ; une vraie jolie sale bête.Je développe : vous êtes installé confortablement devant votre clavier. Vous commencez à écrire.Votre boule de poils préférée s’assoit devant la porte de la terrasse et miaule comme un damné. En langage félin, cela veut dire « Ouvre-moi la porte ou je vais te faire chier pendant une heure. »Vous vous levez, ouvrez cette satanée porte et tentez de reprendre votre travail.À peine avez vous écrit une lettre que… Tic-tic-tic.Le chat frappe à la porte pour entrer, deux minutes après vous avoir emmerdé pour sortir !Là, vous ne savez plus où vous en êtes, si vous parliez au futur, au présent, au passé ou en serbo-croate !Vous avez peur, vous vous dites « J’ai du oublier un R ou un S, mettre deux T au lieu d’un ; elles vont encore venir me fesser, les gorgones correctrices ! »Vous allez boire un coup pour vous calmer, vous vous rasseyez.— Miaaaooouuu, miaaaaoooouuuu. ** traduction : J’ai faim, t’as entendu ducon, j’ai faim !Ils innovent parfois, ces monstres.Je me suis absenté quelques instants pour satisfaire un besoin naturel ; je reviens et regarde mon écran.Dernière phrase : « Elle l’embrassa et lui dit tr°++73 grq- ».Mon idiot de chat course une mouche, piétine mon clavier et met sa touche personnelle à mon œuvre.Si vous n’êtes pas après ces aventures en train de bouffer le chat, vous êtes sur la bonne voie.Ça y est, votre texte est terminé.Vous avez réussi.Félicitations ? Que nenni.Maintenant que vous l’avez expédié à travers les voies mystérieuses d’Internet, votre récit doit d’abord passer sous les fourches caudines des correcteurs : LDCC, Les Sérials Fesseuses.Ensuite – s’il est accepté – votre texte est lu par tous ; par tous les lecteurs anonymes, mais aussi par les autres auteurs.Va, petit texte ; affronte les critiques acérées des Liam, des Mithrandir, les nouvelles Circé que sont Lilas et Cyrielle. Affronte-les tous, mon petit.J’ai peur pour toi, je tremble, je serre les fesses.Affronte de même ces grands anciens, ces Dieux Antiques que sont les Jakin, Someone Else, Gufti et autres Favasso.Je viens de connaître les douleurs de l’enfantement.Je suis heureux et épuisé.Je vais me coucher ; pas pour dormir :— Te voilà enfin, mon amour ? Je t’attendais…