Chaque matin, il se lĂšve Ă cinq heures, prend son petit dĂ©jeuner, passe sous la douche et enfile sa tenue de transport comme il la nomme, un pull, un pantalon et une veste. Dans un petit sac de voyage, il traĂźne sa tenue de travail. Pantalon, cravate et veste noirs plus une chemise blanche, une tenue classique pour son boulot.Il exerce le noble mĂ©tier de croque-mort. Il en faut, mais personne nâhabite avec lui dans son appartement, les femmes se montrent rĂ©ticentes Ă lâidĂ©e de vivre auprĂšs dâun employĂ© des pompes funĂšbres.ââŻCâest pourtant un mĂ©tier plein dâavenir, rĂ©pĂšte Ă lâenvi son collĂšgue Roger, dans un gros Ă©clat de rire.AprĂšs un copieux petit dĂ©jeuner, il prend le train de cinq heures cinquante-neuf, oĂč dâautres lĂšve-tĂŽt comme lui y finissent leur nuit.Il essaie de sâasseoir toujours Ă la mĂȘme place, au centre du wagon, contre la vitre. Ă deux mĂštres dâelle, face Ă elle.Depuis plusieurs semaines, une jolie brune monte dans le train Ă la mĂȘme gare que lui, elle sâassied en face de lui, aprĂšs un lĂ©ger hochement de tĂȘte et un petit sourire. Un casque sur les oreilles, elle Ă©coute de la musique tout en lisant un livre. Menue, les joues roses et rebondies, sa poitrine se soulĂšve dâavoir couru.Il attend toujours son arrivĂ©e pour se mettre Ă rĂȘver.Chaque jour, il sâinvente une nouvelle histoire. Histoire dont elle devient lâhĂ©roĂŻne et lui le hĂ©ros.RĂȘver reste son refuge, le lieu oĂč il peut oublier la noirceur de ce monde, oĂč il peut laisser de cĂŽtĂ© les pleurs des veuves et des enfants de ceux quâil porte en terre, oĂč il peut crĂ©er des contrĂ©es fĂ©eriques.Peut-ĂȘtre est-il amoureux, il nâose se lâavouer. Surtout, il nâose lâaborder. Dans ses rĂȘves, il peut enfin lâembrasser, lui dire « Je tâaime ».La quĂȘteUn chevalier galopait bride abattue Ă travers la campagne, traversant riviĂšres, prairies et forĂȘts. Il volait au secours dâune jolie princesse, enfermĂ©e dans un donjon cachĂ© dans le cratĂšre Ă©teint dâun volcan.PrĂšs de la tour posĂ©e sur les berges dâun lac aux vapeurs mĂ©phitiques cernĂ© de falaises abruptes, un dragon fĂ©roce montait la garde devant le pont-levis, crachant flammes et miasmes.La malheureuse, victime dâun sortilĂšge, attendait quâun preux chevalier vienne lâen dĂ©livrer.Le seuil de la tour ne pourra passer,EnfermĂ©e lĂ par un malĂ©ficePour lâĂ©ternitĂ© dans cet Ă©difice,Seul un acte dâamour pourra lâen dĂ©livrer.Le chevalier semblait rayonner, Ă©clater de lumiĂšre, montĂ© sur un grand destrier blanc, son armure dâor et dâargent brillait au soleil. La neige de ce mois de dĂ©cembre amplifiait encore ce phĂ©nomĂšne merveilleux.Lâanimal Ă©tait lui aussi caparaçonnĂ©, revĂȘtu dâune barde enchantĂ©e qui repoussait malĂ©fices, flĂšches et autres attaques magiques ou non.Une lance dâorichalque Ă sa dextre, ses rĂȘnes Ă sa senestre, le chevalier avançait fier et sĂ»r de lui.Son Ă©pĂ©e, Foudre Divine, pendait Ă sa ceinture. ForgĂ©e par des Nains mĂ©tallurgistes, les seuls et uniques maĂźtres du fer et du feu.Une lĂ©gende la disait faite dâun mĂ©tal issu de pierres tombĂ©es des Ă©toiles.Cette lame reposait pour lâinstant dans un fourreau de cuir dĂ©corĂ© et tannĂ© par des Elfes, la peau de salamandre ne craignait ni le feu ni lâondĂ©e.Un Ă©cu, revĂȘtu de ses armoiries â Bourses velues dâazur Ă©quipolĂ© dâargent â fixĂ© Ă son bras gauche complĂ©tait son Ă©quipement.Avec son cheval PĂ©gase, sa lance et son Ă©pĂ©e, il se sentait invincible. Ni les trolls des Monts Noirs ni les bandits de la ForĂȘt Maudite ne purent lâarrĂȘter.Il se fraya un chemin par le fer et la fureur. Il trancha, il tailla, il dĂ©membra et dĂ©capita Ă tour de bras, faisant voler tĂȘtes et torses. Aucune Ă©raflure, aucune tĂąche ne dĂ©pareillait sa vĂȘture.Un sentier tortueux menait aux lĂšvres du volcan, puis redescendait en lacets vers le lac, lĂ oĂč la belle emprisonnĂ©e lâattendait.Au bas de ce chemin, il se retrouva face au dragon. Sous les pattes de la crĂ©ature des enfers, moult chevaliers gisaient, squelettes blanchis sous le soleil, armures broyĂ©es par les crocs pestilentiels.La princesse lĂ -haut par une Ă©chauguette guettait sa venue, elle lui cria :ââŻDe grĂące, Messire, ne risquez point votre vie, fuyez.ââŻNâayez crainte, ma Dame, ce bĂątard fumant ne me rĂ©sistera guĂšre longtemps. Fuir ne fait pas partie de mon vocabulaire, surtout aprĂšs avoir entrevu votre beautĂ© Ă cette bretĂšche.Le monstre cracha le feu. De son large bouclier fait de mithril, il se protĂ©gea, lui et sa monture ; sitĂŽt le souffle brĂ»lant Ă©teint, PĂ©gase chargea, la lance heurta le poitrail de la bĂȘte immonde et la dĂ©sĂ©quilibra. Il sauta de son destrier tout en dĂ©gainant Foudre Divine, et, avant que le dragon ne reprenne ses esprits, il lui grimpa dessus et plongea la lame au dĂ©faut de lâĂ©paule, lâenfonçant jusque dans le cĆur de lâanimal, le sang du monstre giclant Ă gros bouillons, maculant lâarmure et son visage.Ă peine essoufflĂ©, le chevalier se prĂ©cipita dans le donjon, explosant le portail plus quâil ne lâouvrit, grimpa les marches quatre Ă quatre, lâĂ©pĂ©e devant lui, prĂȘte Ă embrocher un quelconque adversaire. Le paladin atteignit enfin lâultime porte quâil ouvrit avec dĂ©licatesse, pour ne point effrayer la belle.Face Ă lui, les mains jointes, la sublime princesse priait pour ce preux, agenouillĂ©e dans une flaque de lumiĂšre.ââŻMon hĂ©ros, cria la jeune femme en se levant.Ce faisant, elle marcha sur sa robe qui glissa de ses Ă©paules.Totalement nue, elle se prĂ©cipita vers lui.Les petits seins tressautaient, la toison fournie chatoyait sous le soleil. Faisant fi de sa nuditĂ©, elle se blottit entre les bras de son sauveur.ââŻOuille, câest dur.ââŻSi fait, sâexcusa-t-il, faisant rĂ©fĂ©rence Ă ce qui se dĂ©veloppait dans son armure.Heureusement, son facturier lui avait conçu une protection rĂ©volutionnaire dont il pouvait sâextraire avec facilitĂ©.La cuirasse Ă terre, son gambisonâœÂč⟠ne fit guĂšre long feu.Il embrassait la jolie prisonniĂšre suspendue Ă son cou. Quelques gouttes de sang du dragon maculaient son visage. Elle en avala un peu.ââŻMessire, faites de moi une femme.ââŻJe ne peux rien vous refuser, ma mie, je veux bien faire de vous une femme, si vous acceptez de devenir Ma femme.ââŻJâaccepte de toute mon Ăąme.Sur ces tendres paroles, il la prit par la taille, la souleva et posa le connil ruisselant et velu sur sa framĂ©e. Elle noua ses jambes autour des hanches de son sauveur, la bouche ouverte en un cri de joie et de surprise, elle sentit lâhast sâenfoncer lentement en son sein. Il la retenait pour ne point la dĂ©chirer trop brutalement.Lorsquâelle fut totalement investie, elle sâexclama, en pleine pĂąmoison :ââŻMerci, mon Dieu, merci, Monsieur mon Mari.ââŻMerci, Ma Dame, rugit-il en sâĂ©panchant en elle aprĂšs quelques vigoureuses allĂ©es et venues.Ils ne le savaient pas encore, mais un enfant naĂźtrait de cette Ă©treinte torride. Une fille qui deviendrait une guerriĂšre redoutable et une reine adulĂ©e : dans ses veines coulerait un peu de sang-de-dragon.Il tenait sa bien-aimĂ©e dans les bras, enveloppĂ©e dans sa cape, PĂ©gase marchait au pas, veillant au confort de ses amis et maĂźtres.Le pas de lâanimal faisait Clibiliclop, clibiliclop⊠ooOOoo⊠Clibiliclop, clibiliclop fait le bruit des pas des passagers qui descendent du train.Il sâĂ©veille en sursaut. Il rate presque sa gare et son arrĂȘt. PlongĂ© dans son rĂȘve, il nâa pas osĂ© ni eu le temps de lâaborder. Elle sâĂ©loigne, lĂ bas, seule, perdue dans la foule.Il dĂ©sire juste la prendre par la main, et lui demander :ââŻQue faites-vous ce soir ?Ce soir, ce soir il osera. Il doit oser.ooOOooAprĂšs sa journĂ©e de travail rĂ©jouissante, passĂ©e Ă accompagner des gens vers leur derniĂšre demeure, et rĂ©conforter les familles, il monte dans le train, en espĂ©rant que la belle y soit dĂ©jĂ .Elle est lĂ Â !Il ne veut pas lui faire peur en lâabordant de suite. Ce soir Ă lâarrivĂ©e, il osera lui demander :ââŻSeriez-vous libre ce soir ?Oui, il osera. Il osera lui prendre la main. Il lâemmĂšnera boire une boisson chaude, grignoter quelques biscuits, dans la lumiĂšre douce du salon de thĂ© de la Grand-Place, il pourra se repaĂźtre de sa beautĂ© ailleurs que sous la lumiĂšre glauque de ce wagon de banlieue.Il sâassoit, elle lui fait un petit sourire et hoche la tĂȘte, puis se plonge dans son livre, les Ă©couteurs sur les oreilles.Il appuie la tĂȘte sur la vitre et rĂȘveâŠLe privĂ©Philipp Marlou alluma sa premiĂšre cigarette de la journĂ©e et ouvrit la porte de son agence.Il ramassa les diverses lettres et publicitĂ©s vantant les mĂ©rites des sex-shops des environs. Il jeta les factures Ă la poubelle et Ă©tudia une pub pour de la lingerie fĂ©minine tout en se prĂ©parant une tasse de cafĂ©.Ă peine avait-il plongĂ© ses lĂšvres dans sa boisson prĂ©fĂ©rĂ©e â aprĂšs le Kilbeggan â que quelquâun poussa la porte.Marlou vit dâabord des bajoues, une calvitie avancĂ©e, le ventre proĂ©minent que contenait Ă peine un pantalon de bonne facture.Le gros homme entra sans aucune gĂȘne ni mĂȘme se prĂ©senter, fit craquer une chaise en sây asseyant.Il dĂ©clara de but en blanc :ââŻJe suspecte ma femme de me tromper, je suis persuadĂ© quâelle a un amant. Surveillez-la ! dit dans un rĂąle le bedonnant en lui tendant la photo de lâinfidĂšle et jetant une Ă©paisse liasse de billets sur le bureau, comme on jette un os Ă un chien. Elle se prĂ©nomme Hannah.Sur la photo il vit le portrait dâune jolie jeune femme brune au regard mĂ©lancolique.ââŻJe commence ma filature demain matin Ă lâaube.ââŻTout de suite, rugit le ventripotent. Voici mon adresse et mon tĂ©lĂ©phone. Vous me ferez un rapport chaque soir, je veux des rĂ©sultats, je veux des preuves.Marlou avait trop besoin de fric pour se plaindre de la conduite du type. Un client qui paye a toujours raison.Par conscience professionnelle, se faisant passer pour un agent du service dâentretien Ă©lectrique, le privĂ© installa quelques micros et camĂ©ras dans diverses piĂšces et autour de la rĂ©sidence du couple, sans en parler Ă son client. Il lui facturerait le matĂ©riel.Les trois premiers jours, la jeune Ă©pouse resta chez elle, ne recevant aucune visite ni coup de tĂ©lĂ©phone. Philipp regardait la jolie femme vivre et sâoccuper. Chaque jour il se trouvait un peu plus sous le charme de la belle brune. Chaque jour elle Ă©tait son rayon de soleil dans le crachin dâautomne.Le quatriĂšme jour, il planquait devant la maison, quand vers quatorze heures la jeune beautĂ© sortit au volant de sa BMW I3, pour se rendre au centre-ville oĂč elle fit quelques emplettes, une robe et des sous-vĂȘtements. Il regretta de ne pas pouvoir la suivre, il se ferait griller de suite. Un homme ne pouvait entrer seul dans ce genre de boutique sans passer pour un voyeur. De plus ses Ă©moluments ne lui permettaient pas dâoffrir ce genre de choses Ă une hypothĂ©tique petite amie. Il prit toutefois quelques photos, postĂ© sur le trottoir dâen face.Hannah ressortit, hĂ©sita quelques instants, puis entra dans un salon de thĂ© non loin de lĂ .Bien quâil nâait pas lâallure dâun consommateur, il la suivit quand mĂȘme. Avec son nez cassĂ©, sa cicatrice sur le front, son crĂąne en boule de billard, son menton carrĂ© et son allure de mercenaire de sĂ©rie Z, il dĂ©pareillait dans ce genre dâendroit. Lâart de la filature consistait Ă se fondre dans le paysage, quel que soit lâenvironnement. Cette fois il se trouvait Ă la limite de ses capacitĂ©s de camouflage.ââŻVous dĂ©sirez, monsieur ?Il regarda la femme de son client dĂ©guster un thĂ©. Pas la peine de commander une Rauchbier ou un Bruichladdich dans ce troquet.ââŻEuh⊠un chocolat ! Chaud.Il vit Hannah prendre son tĂ©lĂ©phone et appeler.ââŻJe suis chez Dumez, tu viens me rejoindre ?Le gros avait peut-ĂȘtre raison, un gigolo allait dĂ©bouler et emmener sa filature dans un hĂŽtel du coin. Cinq minutes plus tard, une blonde pulpeuse embrassait la brune, elles se mettaient Ă papoter.ââŻRegarde ce que je me suis achetĂ©âŠââŻOh câest trop chou !ââŻCâest pour Mike, pour notre anniversaire de mariage.ââŻIl croit toujours que tu as un amant, cet idiot ?ââŻĂa va, il ne mâen parle plus, je crois quâil a compris.Elles discutĂšrent de tout et de rien pendant presque deux heures. De leurs hommes respectifs, des hommes de leurs amies, de mode, des prochaines vacances, bref, rien que de choses essentielles.Le pauvre Philipp se faisait suer comme un rat dans un congrĂšs de chats vĂ©gans, et, chose dĂ©licate, Ă©prouvait de plus en plus de difficultĂ©s Ă passer inaperçu. Il tentait de lire une revue oubliĂ©e par une cliente. Lui, lire Cosmopolitan ! Il recommanda plusieurs chocolats, grignotant des biscuits du bout des incisives telle la Baronne de Machin-Chose.Heureusement son calvaire prit fin, la brune quitta la blonde aprĂšs une sĂ©rie de bises devant la voiture. RentrĂ©e chez elle, Hannah sâempressa dâessayer ses emplettes.Il tĂ©lĂ©phona au gros mari :ââŻJe suis pratiquement sĂ»r que votre femme ne vous trompe pas.ââŻContinuez, moi je suis pratiquement sĂ»r du contraire.Tant quâil payait ! Surtout que ce boulot ne comportait pas que des inconvĂ©nients.Dans sa voiture, Philipp bĂ©ait devant son ordinateur. Une rĂ©action physiologique bien naturelle pointait dans son caleçon.Par Ă©cran interposĂ©, il assistait Ă un charmant strip-tease. Les petits seins aux tĂ©tons et arĂ©oles sombres apparurent, puis ce fut le tour de la toison, un petit ticket de mĂ©tro anthracite sur le mont de vĂ©nus bombĂ© et surtout, un bel abricot lisse et divinement fendu.Le privĂ© sâĂ©chauffait derriĂšre son volant, Hannah se montrait sous toutes les coutures : il put ainsi apprĂ©cier aussi le postĂ©rieur rebondi, les reins cambrĂ©s et la peau hĂąlĂ©e. Les bas mettaient en valeur les jambes fuselĂ©es, le porte-jarretelles, les fesses rondes.Le simple fait dâimaginer cette jeune femme se faire tripoter par son bedonnant client lui donnait la nausĂ©e.La belle passa ses vĂȘtements neufs, juste avant que le gros Mike ne rentre Ă lâimproviste.ââŻRegarde chĂ©ri, câest pour notre anniversaire de mariageâŠââŻDis plutĂŽt pour ton Jules !ââŻMaisâŠElle ne put terminer sa phrase, elle reçut violente gifle.ââŻJe ne te trompe pas, gĂ©mit-elle en se tenant la joue.ââŻJe te fais suivre par un privĂ© depuis plusieurs jours, ce nâest pas ce quâil mâa dit, raclure !LâenfoirĂ©, se dit Philipp. Merde, il va me la tuer ! Le gros homme attrapa le cou de sa femme et se mit Ă serrer, serrer.Tel un grand fauve, le dĂ©tective sortit de la voiture en courant, sauta la grille avec quelques difficultĂ©s et entra par la baie vitrĂ©e.Faudra quand mĂȘme que je me remette au sport.Le drame se passait dans la chambre, Ă lâĂ©tage.En un seul coup dâĆil, il embrassa la scĂšne : la femme aux yeux exorbitĂ©s, les lĂšvres bleues, qui tenait inutilement les poignets de son agresseur, la bouche ouverte, cherchant vainement un peu dâair.Et lâautre qui serrait, serrait la gorge dĂ©licate.Le dĂ©tective sortit sa matraque tĂ©lescopique et en flanqua un coup violent sur la nuque du mari.Il prit la jolie brune dans ses bras et sortit avec elle, la berçant telle une jeune enfant.ââŻVous ĂȘtes lâhomme de lâĂ©lectricitĂ©, celui du salon de thĂ©, sâĂ©tonna-t-elle dâune voix cassĂ©e, pourquoi ?ââŻParce que⊠parce que je vous aime, avoua-t-il en dĂ©posant un doux baiser sur les lĂšvres pulpeuses.Il appela les secours, fournit aux flics les rĂ©sultats de son enquĂȘte et les copies de ses vidĂ©os, le bedonnant fut arrĂȘtĂ©, jugĂ©, condamnĂ© et embastillĂ©. Aux derniĂšres nouvelles, plusieurs dĂ©tenus trouvaient de nombreux attraits Ă son joufflu rebondi.Quelques mois plus tard, sur une Ăźle perdue de lâocĂ©an Pacifique, un couple se promenait le long dâune jetĂ©e. Un grand chauve baraquĂ© et une jolie brune dont le ventre sâarrondissait.Comme chaque soir, un grand dauphin vint les saluer.ââŻRegarde Philipp, comme il est mignon, il a ton sourire, dit-elle en caressant la nageoire de lâanimal.ââŻMerci, Hannah, câest un compliment pour lui et pour moi.ââŻHahaha, sâesclaffĂšrent-ilsââŻKikikik, approuvait le dauphin.ooOOooKikikik fait le train en freinant.ââŻHahaha, sâesclaffent deux voyageurs en descendant.Il se rĂ©veille en sursaut, il la voit descendre et se fondre dans la nuit.Perdu dans ses rĂȘves, il nâa pas pu ni osĂ©.Demain, oui, demain, il osera lui demander :ââŻQue faites-vous ce soir ?ooOOooIl a mal dormi, dâun sommeil agitĂ©. Il va la perdre. Il faut absolument lui parler, aujourdâhui. Sinon les cauchemars qui lui ont gĂąchĂ© sa nuit vont se rĂ©aliser, il la voit tenir la main dâun homme, dâun inconnu et il les observe sâĂ©loigner ensemble.ââŻArrĂȘte de rĂȘver, ne cesse-t-il de se rĂ©pĂ©ter.Il monte dans le train, sâassied Ă sa place habituelle, elle nâest pas encore arrivĂ©e. Il sâinquiĂšte. Soudain elle apparaĂźt, essoufflĂ©e, les joues roses. Elle est juste un peu en retard.Elle le regarde, lui fait un petit sourire, sâinstalle Ă sa place habituelle, face Ă lui, sur le siĂšge dâen face, pose son casque sur les oreilles, et plonge dans son livre.Il est rassurĂ©, mais ne lâabordera pas encore ce matin, il est trop tard.Il pose la tĂȘte sur la vitre et se met Ă rĂȘver.Les bandits de grand cheminLe carrosse brinquebalait sur la route dĂ©foncĂ©e, guĂšre amĂ©liorĂ©e par les derniĂšres intempĂ©ries de ce printemps pourri. Le cocher tenta de faire accĂ©lĂ©rer lâĂ©quipage, il y renonça bien vite, lâunique passagĂšre se faisait secouer trop violemment. Sur des chevaux qui rappelaient plus des Ardennais que des Lusitaniens, deux gardes armĂ©s de rapiĂšres trottaient aux cĂŽtĂ©s de la voiture.Ă lâendroit le plus dĂ©labrĂ© de la piste, lâattelage et les gardes durent marcher au pas.LĂ les attendaient en embuscade une bande de malandrins.Le chef de la troupe, un colosse vĂȘtu de hardes sales et puantes Ă©tait le seul Ă possĂ©der un pistolet.Il tira un coup en lâair en hurlant :Une dizaine de ruffians encerclĂšrent le vĂ©hicule. Le cocher sauta de son siĂšge et se sauva en hurlant quâil avait deux femmes et un enfant, les gardes piquĂšrent des deux et sâenfuirent eux aussi sans demander leur reste, bousculant au passage un bandit.Les truands sâesbaudirent de leur chance, ils venaient dâattaquer un Ă©quipage armĂ© sans subir de perte. Eux qui nâagressaient le plus souvent que de pauvres paysans, des religieux sans le sou, parfois la bonne fortune les faisait sur le dos dâun marchand, cette fois la chance leur souriait. Un carrosse signifiait un riche butin.ââŻVoyons voir ce que nous avions attrapĂ© aujourdâhui.Le chef ouvrit la portiĂšre du vĂ©hicule. PelotonnĂ©e sur un siĂšge, une jeune femme tremblait et murmurait.ââŻMon Dieu protĂ©gez moi, ne me faites pas mal, pitiĂ©.ââŻRegardez ce que jâavions trouvĂ© lĂ , sâexclama le rustre en faisant sortir la jolie brune, la tirant sans douceur par le bras.Les autres coupe-jarrets la regardaient avec convoitise, presque la bave aux lĂšvres. Petite et potelĂ©e, de beaux yeux noisette affolĂ©s, sa robe de brocart vert chiffonnĂ©e au large dĂ©colletĂ© laissait admirer sa gorge blanche, la naissance de ses seins et le doux sillon sĂ©parant ses deux globes. Ses pieds menus Ă©taient passĂ©s dans des chaussures vernies ornĂ©es de boucles dâargent.ââŻVous autres, fouillez-moi ça, commanda la brute Ă ses sbires, trouvez lâor et les bijoux.En poussant des cris de joie, ils jetĂšrent au sol des malles dont ils sortirent dâautres robes de dentelle, de satin, une bourse lestĂ©e quelques dizaines de piĂšces dâor, et un petit coffret contenant un collier de perles, une Ă©meraude sertie sur une bague ainsi quâune parure de diamants.ââŻOĂč allez-vous, ma belle, avec ces joyaux et toutes ces robes ?La jeune femme se redressa de toute sa taille, fiĂšre et combative.ââŻJe viens du couvent des Oiselles, je vais de ce pas au chĂąteau de Vauquonery pour y Ă©pouser le Duc. Mon pĂšre, le Baron RenĂ© de Sessandre sâest engagĂ© auprĂšs de lui pour notre union.ââŻNous nâallions pas te laisser rejoindre ce vieux croĂ»ton sans te faire connaĂźtre les joies de lâaccouplement. Les bonnes sĆurs du couvent nâont pas dĂ» tâapprendre grand-chose Ă ce sujet. Mes vieilles crapules, jânous avions trouvĂ© une pucelle ! Nous allons trousser unâbelle oie blanche.Les truands de hurler, crier de joie et jeter en lâair leurs chapeaux avachis.AffolĂ©e, la jeune femme tenta de se dĂ©battre, dâĂ©chapper Ă ses ravisseurs, en vain. Ils lui tenaient fermement les bras. Elle hurlait de terreur et de rage mĂȘlĂ©es.Lâun des ruffians dĂ©gaina un coutelas et trancha les lacets de la robe, de la nuque au bas du dos. Lâautre lui agrippa le haut de son corsage et tira, arrachant le tout, bustier et jupons. Hormis ses bas et ses chaussures, elle Ă©tait nue sous son vĂȘtement.Elle cria, tenta de cacher sa poitrine menue de ses mains, croisa les jambes pour dĂ©rober aux regards salaces ses parties intimes. Ils mirent fin Ă sa tentative de camouflage en lui saisissant et Ă©cartant les bras, la secouant pour lâobliger Ă dĂ©voiler son giron, Ă montrer ses petits seins frĂ©missants.ââŻTudieu, le beau bosquet que voilĂ , rugit le reĂźtre, en dĂ©signant la toison fournie. De quoi me garder la queue et les bourses au chaud cet hiver. Regardez-moi ces belles framboises, disait-il en tirant sur les tĂ©tons sensibles.Tous les autres de sâesclaffer. Il y avait lĂ des borgnes, des Ă©dentĂ©s, des balafrĂ©s, des estropiĂ©s, tous plus hideux et crasseux les uns que les autres.Des mains tripotaient la donzelle, palpaient les fesses et tentaient mĂȘme de sâinsinuer dans ses pertuis secrets.HolĂ , marauds, quâest-ce donc ? Le Chevalier de Pardevant cheminait sur la route qui menait Ă la capitale, aux cĂŽtĂ©s de son cheval fourbu.Il expliquait Ă un BucĂ©phale intĂ©ressĂ©, les festins quâils feraient tous deux sitĂŽt fortune faite Ă Paris quand il entendit un coup de feu et des cris.Il enfourchait sa monture dĂ©pitĂ©e lorsquâil croisa des hommes en livrĂ©e qui fuyaient.ââŻNotâ petite damoiselle, des bandits, lĂ -bas, dit lâun dâeux, essoufflĂ©, en indiquant dâun doigt tremblant le chemin.NâĂ©coutant que son courage, Paul, Chevalier de Pardevant, unique hĂ©ritier du titre et dâun chĂąteau en ruines, talonna son pur-sang noir Ă©bĂšne.Jamais un Pardevant ne laissa une femme se faire malmener sans rĂ©agir : ses ancĂȘtres le hanteraient Ă jamais sâil ne mettait pas un terme Ă cette forfaiture. Une dame de haute naissance, semblait-il.Il entendait des hurlements de femme et des rires gras.Il dĂ©couvrit tout dâabord un carrosse portiĂšres ouvertes, des effets Ă©parpillĂ©s tout autour : quatre chevaux alezans regardaient indiffĂ©rents la scĂšne de cauchemar qui se dĂ©roulait devant eux.Une jeune femme, nue, bras et jambes Ă©cartĂ©s, plaquĂ©e Ă terre par quatre soudards alors quâun autre se tenait agenouillĂ© entre les jambes ouvertes de la donzelle. Les chausses baissĂ©es, il secouait sa pine en ricanant.ââŻRegarde ma jolie, la belle massue Ă pucelle !Elle fermait les yeux, ne voulant voir cette horreur.ââŻHolĂ , marauds, quâest-ce donc ? tonna le chevalier en sautant de cheval.ââŻSais-tu, jeune idiot, quâil ne faut jamais dĂ©ranger un gaillard qui va baiser. Tu devras attendre ton tour, avant de goĂ»ter Ă cette jouvencelle, sâil te reste quelque chose Ă goĂ»ter.ââŻCâest ce que nous allons voir, flandrins.ââŻOccupez-vous de lui, gueula le chef, qui essayait de se remettre debout et remonter ses braies en mĂȘme temps.ââŻVenez mes bĂątards, que je vous taquine la rate, les provoqua le Chevalier.Le jeune homme vit arriver sur lui neuf malandrins hurlants, des armes de toutes sortes Ă la main, de vieilles anelaces, des coutelas, fauchons, flamberges.Il dĂ©gaina Rancune la rapiĂšre de sa famille tout en ĂŽtant son baudrier.Il para avec aisance les premiers assauts dĂ©sordonnĂ©s de ses adversaires qui se gĂȘnaient entre eux, se bousculaient. Au milieu de la mĂȘlĂ©e, il frappait de taille et dâestoc, perçant poitrines et ventres, de sa cuissarde, il dĂ©gaina une alumelle quâil planta dans un bas-ventre qui passait par lĂ . Il nĂ©gligeait les quelques Ă©raflures que pouvaient lui occasionner ses rivaux.Il se dĂ©plaçait tel un grand fĂ©lin parmi un troupeau de pourceaux. Il laissait derriĂšre lui un sillage de mort et de sang.Les hurlements de rage et les rĂąles dâagonie ponctuaient sa progression vers la jeune femme. BientĂŽt il ne restait plus que le chef des truands comme ennemi encore debout.ââŻJâallions te saigner comme un goret, jâallions faire couler ton sang bleu.ââŻVous parlez trop, mon cher.Le combat fut bref et fatal. Le scĂ©lĂ©rat tenta une attaque violente et brutale, que le chevalier para avec grĂące, il enroula la lame large et Ă©paisse de son adversaire, et dâune botte Ă©lĂ©gante lui perfora le cĆur.ââŻFils de putasse, jâmourions.ââŻMourez, monsieur, mourez, mais de grĂące, en silence !La jeune femme sâĂ©tait relevĂ©e et observait le duel.Au dĂ©but du combat elle priait pour la vie du jeune et sĂ©duisant gentilhomme venu Ă son secours. Un homme seul face Ă cette armĂ©e de coupe-jarrets, elle sâattendait au pire. Oubliant sa nuditĂ©, elle porta une main sur son cĆur, lâautre Ă ses lĂšvres, craignant dĂ©faillir.Le dernier truand mort, elle sâadressa Ă son sĂ©duisant protecteur :ââŻMessire, vous venez de sauver Ă la fois mon honneur, ma vertu et ma vie. Je ne saurais jamais assez vous remercier.ââŻVotre regard et votre sourire, Ma Dame, seront mes plus belles rĂ©compenses, ils resteront Ă jamais dans ma mĂ©moire, dĂ©clama le Chevalier en sâinclinant devant elle, amenant son regard au niveau de lâentrejambe de la belle, dont il put admirer le buisson fourni et luisant.ââŻMais vous ĂȘtes blessĂ©, vous saignez.ââŻJuste une Ă©gratignure, Ma Dame.ââŻTss, Tss, ne me contez point de fadaises, montez dans le carrosse, jây ai un peu de vin qui fera merveille sur vos plaies.Elle dĂ©chira un long morceau de sa robe en lambeaux en vue de panser son sauveur. Le jeune homme se lissa les moustaches tel un gros matou en apprĂ©ciant les appas de la jeune beautĂ©. Les mignons petits seins tressautaient Ă chaque geste. Les tĂ©tons dardaient vers le jeune homme, quĂ©mandant inconsciemment une caresse. En parfait gentilhomme, il Ă©vitait de regarder trop ouvertement la jeune femme, mais ne pouvait sâempĂȘcher de lâadmirer.ââŻDĂ©shabillez-vous messireâŠââŻChevalier Paul de Pardevant, dit-il en retirant sa chemise. Puis-je savoir Ă qui appartient ce si joli sourire ?ââŻCharlotte de Sessandre.ââŻOuille, ça pique.ââŻSeriez-vous douillet, Chevalier. Oh, du sang coule de votre cuisse, retirez donc vos chausses et vos cuissardes.ââŻVous croyez ?ââŻJây tiens. Les religieuses mâont enseignĂ© lâart de soigner les plaies.AprĂšs une hĂ©sitation il baissa ses bottes et son vĂȘtement. Les yeux de la jeune femme sâĂ©carquillĂšrent, un « oh » muet se lut sur ses lĂšvres.Elle voyait pour la premiĂšre fois le sexe dâun gentilhomme, flamberge qui palpitait en son honneur. Les deux jeunes gens se regardaient, indĂ©cis, ne sachant quelle attitude adopter.NâĂ©coutant que son instinct, elle lui sauta au cou et pour la premiĂšre fois aussi, embrassa un homme.Leur manque dâexpĂ©rience en la matiĂšre Ă©tant largement compensĂ© par un enthousiasme dĂ©bordant.Il caressait les petits seins, pressait et embrassait les tĂ©tons, ne savait oĂč donner de la main ni de la bouche. La peau de la jeune femme rosissait sous les baisers de son sauveur.La langue du chevalier venait chercher celle de Charlotte en un tendre duel.Des doigts hĂ©sitants agrippĂšrent et caressĂšrent le vit qui se pressait sur son ventre. La moustache du jeune homme vint se perdre dans le buisson odorant et humide de la belle. Elle ne cessait de rĂ©pĂ©ter Merci mon Dieu, pardon mon pĂšre tout en Ă©cartant les jambes.Elle craignait depuis longtemps le jour oĂč elle devrait offrir son trĂ©sor Ă son vieux mari, et ce jour arrivait, non pas avec le Duc, mais avec ce sĂ©millant jeune Paladin.Son cĆur de romantique palpitait tout autant que sa Divine Ouverture.Le grand bĂąton de MoĂŻse vint tout naturellement se nicher dans le fourreau velu. Telle une amazone, la jeune femme chevauchait Paul, qui voyait sâagiter les mignonnes pommes dâor du jardin des HespĂ©rides.ââŻHa, fut le seul commentaire de Charlotte lorsque son petit rempart fut emportĂ©.ââŻHa, fut leur seul commentaire commun lorsque le plaisir les emporta.Ă force de caresses, de mots tendres, de baisers, ils ne mirent guĂšre longtemps Ă reprendre leur activitĂ©, lui allongĂ© sur la belle qui ahanait sous les coups de boutoir. Aux doux jeux de la joute amoureuse Paul tenait bien en lice. Les yeux plantĂ©s dans ceux de son amant, un sourire extatique aux lĂšvres, la belle Charlotte gĂ©missait une sĂ©rie de mots sans suite : Messire Paul â oui, Paul â mon Dieu, ce qui avait le don de dĂ©cupler les facultĂ©s de son galant.Venant de frĂŽler le pire des maux, la jolie damoiselle se donnait corps et Ăąme Ă son sauveur, et advienne que pourra. Ils touchaient de nouveau les portes du Paradis quand dans un Ă©lan quasi mystique, elle dĂ©clara Oh oui, comme je vous aime, ce qui eut le don de dĂ©clencher un orgasme commun. Le chevalier sâavoua vaincu, mais au tendre jeu de lâamour, les dĂ©faites ne sont jamais cruelles.ââŻPromettez-moi, Chevalier, de mâemmener une autre fois Ă CythĂšre avant que le devoir mâimpose dâĂ©pouser mon promis.ââŻDe suite Ma Dame, vos dĂ©sirs sont des ordres.Le carrosse gigotait de nouveau dâĂ©trange façon quand une troupe armĂ©e investit la petite clairiĂšre.ââŻHolĂ , au nom du Roy montrez-vous, cria un fringant personnage.Se tenaient lĂ aussi le pĂšre de la jeune femme et le futur mariĂ©. Lorsque Paul et Charlotte sortirent nus comme des vers, les soldats se retroussĂšrent les moustaches.Jean-Aymar de Vauquonnery et RenĂ© de Sessandre se rĂ©criĂšrent.ââŻQuâest-ce donc lĂ , ma fille ?ââŻSaisissez-vous de cet homme, glapit le cocu putatif, quâon fouette ce gueux, quâon le roue, lâĂ©corche et quâon lâenvoie aux galĂšres.ââŻQuant Ă vous ma fille, je vous enferme au couvent, complĂ©ta le Baron.Charlotte, toute hĂ©rissĂ©e, les mains posĂ©es sur les hanches et ne tenant aucun compte de sa tenue, se plaça devant Paul.ââŻVous nâen ferez rien, laissez le Chevalier tranquille ; sâils dĂ©pendaient de vos gens, Duc, il y a belle lurette que mon honneur et ma vertu se seraient envolĂ©s, mon escorte sâest enfuie Ă la premiĂšre escarmouche, sans mĂȘme livrer combat.ââŻLaissez donc, intervint lâofficier, avant que le Duc ne rĂ©plique. Mon ami, est-ce lĂ votre Ćuvre ?Le militaire, chef de cette troupe, dĂ©signait les cadavres des bandits en fixant le jeune homme dans les yeux.ââŻEn effet, votre Altesse, pour sauver la vie et la rĂ©putation de Mademoiselle Charlotte, la protĂ©ger de lâinfamie et du dĂ©shonneur.Le chevalier venait de reconnaĂźtre Monsieur, frĂšre du Roi. Vu lâaccoutrement des deux protagonistes, le pĂšre et le futur mari ne pouvaient tolĂ©rer de tels propos. Ils commençaient Ă Ă©mettre des objections, sans toutefois oser contredire ouvertement le Royal Frangin.ââŻDe Pardevant, le royaume a besoin dâhommes comme vous, je vous enrĂŽle dans ma compagnie.Ignorant la rĂ©action du duc et du baron, il continua.ââŻDâautre part, une jolie pouliche comme votre fille, Baron, ne peut finir au couvent, il lui faut unâŠââŻPouliche ?ââŻJolie pouliche, mais si vous prĂ©fĂ©rez, tigresse, je la confie Ă un homme qui saura en prendre soin, lâapprivoiser, lâaimer, nâest-ce pas Vicomte de Pardevant ?ââŻVolontiers !ââŻCe sera lĂ votre premiĂšre mission. Nous vous laissons continuer ce que vous avez si bien commencĂ©.Le frĂšre du roi lui secoua vigoureusement lâĂ©paule.ooOOooââŻMonsieur, monsieur, câest votre arrĂȘt, je crois.La jeune femme lui secoue lâĂ©paule.Il sort de son songe alors quâelle sort du train.Elle sâĂ©loigne, perdu dans son rĂȘve, il ne lui a pas dit un mot.Perdu dans ses pensĂ©es, il travaille machinalement. Il mĂšne Ă leur derniĂšre demeure quatre personnes, il pense Ă sa belle inconnue, sa main douce sur son Ă©paule.Elle lâa remarquĂ©, elle sait oĂč il descend, ce soir il osera lui parler.ooOOooAssis Ă sa place habituelle, il la voit monter dans le train, sâasseoir, lui faire un petit sourire et un signe de tĂȘte.Il lui sourit en retour, hĂ©site Ă la remercier pour ce matin. Il faut attendre encore un peu.Comme Ă son habitude il prĂ©fĂšre plonger dans ses rĂȘves.La planĂšte oubliĂ©eLe capitaine John Deuff, dit JD, tentait de maĂźtriser la navette. Le petit vaisseau tanguait, secouĂ© par le souffle de lâexplosion. Ses adjoints gisaient, inconscients, sur leurs siĂšges.Alors que le SpĂ©culum, vaisseau spatial dâexploration de la fĂ©dĂ©ration terrienne approchait du systĂšme planĂ©taire Trappist, le commandant Bill Bocquais dĂ©cida dâenvoyer une Ă©quipe dâexploration sur Trappist F.En effet dâĂ©tranges signaux Ă©manant de cette planĂšte avaient attirĂ© lâattention de lâĂ©quipage.Le SpĂ©culum devait explorer une partie de la galaxie, tandis que dâautres vaisseaux â tel le Coloscope â du mĂȘme type partaient Ă lâaventure dans dâautres secteurs.Ă peine le petit appareil de reconnaissance venait-il de quitter le SpĂ©culum que celui-ci fut touchĂ© par un tir de laser Ă haute densitĂ©.Le vaisseau mĂšre explosa, secouant la navette comme un fĂ©tu de paille.Les voyants clignotaient sur le tableau de bord et les alarmes hurlaient de toutes parts.JD se trouvait au bord de la syncope.Le petit appareil, attirĂ© par la gravitĂ© de la planĂšte, finit par entrer dans lâatmosphĂšre et se poser tant bien que mal sur le sol, les tĂŽles encore rougeoyantes.Il tenta en vain de contacter le vaisseau, celui-ci, Bill Bocquais et tout lâĂ©quipage tournoyaient en milliers de dĂ©bris autour de Trappist F.JD devait sortir explorer les alentours. Lâendroit semblait habitable, mais guĂšre hospitalier. Lâaccueil laissait Ă dĂ©sirer.AprĂšs avoir mis en sĂ©curitĂ© ses collĂšgues toujours inconscients, il fit le tour de lâĂ©pave, se rendant vite compte que la navette ne volerait plus jamais. Il sâaventura un peu plus loin, vers ce qui lui semblait ĂȘtre une clairiĂšre.LĂ , une vision de rĂȘve le cloua sur place.Ce quâil prenait pour une clairiĂšre Ă©tait un grand lac bordĂ© dâarbres en fleurs. Un oiseau dans les frondaisons lançait un cri de temps Ă autre, un Coucou trĂšs mĂ©lodieux.Un Ă©trange Ă©quipage arrivait vers lui. Des gardes humains entouraient un palanquin portĂ© par deux animaux Ă six pattes et Ă tĂȘte de rhinocĂ©ros. Dessus se tenait la plus belle femme quâil ait jamais rencontrĂ©e. VĂȘtue de soies transparentes, un diadĂšme posĂ© sur les longs cheveux de jais, des bracelets dâor et dâargent enserraient ses bras et poignets. Il admirait les adorables petits seins qui gigotaient derriĂšre le tissu, il pouvait mĂȘme voir les tĂ©tons se hĂ©risser ainsi quâune ombre plus sombre au bas du ventre.La divine crĂ©ature posa les pieds sur le sol et sâapprocha de lui.ââŻPrincesse, voici le puissant Seigneur des Cieux, dit un garde.Une princesse ? Une dĂ©esse oui !ââŻOh, divin seigneur, vous qui venez des Ă©toiles, voudriez-vous nous accompagner en notre palais, dressĂ© au centre du Lac du Corbeau, nous voudrions vous demander de nous aider, mon peuple et moi Ă nous dĂ©barrasser de ces immondes envahisseurs, les Zourgs ?Heureusement, son traducteur universel lui permettait de saisir les paroles de la sublime crĂ©ature.Avant quâil nâait pu comprendre le sens prĂ©cis du discours, de demander ce quâĂ©tait un Zourg, des cris retentirent, les gardes furent bousculĂ©s et une troupe hurlante de petits ĂȘtres bas sur pattes et agressifs se saisit de la princesse et la brutalisa. Des personnages Ă casquette et capuche, pantalons bas du cul et hurlant comme des damnĂ©s.ââŻMerdes sur pattes, anus de poulpes, hurlait la belle enfant.ââŻQue se passe-t-il, demanda le capitaine.ooOOooââŻQue se passe-t-il ?ââŻMerdes sur pattes, anus de poulpes, zâallez mâlĂącher !Il se rĂ©veille en sursaut, son traducteur semble dĂ©conner une nouvelle fois.ââŻRĂ©sidus de fond de calbute, lĂąchez-moi.ââŻDonne ton sac, salope.Il ne rĂȘve plus. Sa belle inconnue se fait secouer par deux loubards encapuchonnĂ©s. Elle sâagrippe Ă son sac avec lâĂ©nergie du dĂ©sespoir. Les autres passagers se planquent courageusement.Encore mal rĂ©veillĂ©, il ramasse sa besace et sâapproche de lâalgarade. Il se sent des vellĂ©itĂ©s de paladin, de mousquetaire, de privĂ©.ââŻHolĂ , marauds, quâest-ce donc.ââŻTu veux quoi bouffon, demande lâun des agresseurs en sortant un couteau de sa poche.Sans rĂ©flĂ©chir, il balance son sac sur la tĂȘte du truand, un grand bruit mĂ©tallique sâensuit, un genre de Chklong Booing, le gus marque un temps dâarrĂȘt, ouvre la bouche dont sâĂ©chappent quelques dents.ââŻZuuh ! zozote-t-il en sâĂ©croulant.ââŻQuâĂȘk ta fĂ© Ă mon po⊠tente de questionner le second.ââŻPasse le bonjour Ă tes gosses, hurle la jolie inconnue.Elle vient de planter un violent coup de genou dans les « gosses » du sinistre individu, le pliant en deux.ââŻMes burnes, glapit le truand en herbe en se tenant lâentrejambe.Tel un hĂ©ros de film ou un de ces personnages quâil invente, il fait tourner son sac comme une fronde et le flanque sur la tronche du malandrin.Le sale type Ă©met un « Beuuhh » du plus bel effet avant de sâeffondrer pour le compte. Les autres passagers ragaillardis applaudissent.Sur ces entrefaites, le train sâarrĂȘte et des policiers menottent et embarquent les malfaisants. Les voleurs voulaient tirer des bourses, ils allaient passer quelques jours avec des glaçons sur les leurs, de bourses.ââŻĂa fait un bout de temps quâon essaie de les choper en flagrant dĂ©lit. Vous viendrez tĂ©moigner demain, en fin dâaprĂšs-midi, pas trop tĂŽt, la clim est tombĂ©e en panne, en plein juillet comme dâhab. Manquerait plus, en plus, que le juge les fasse ressortir de suite, ces pustules, ça ne serait pas jouace.~o~La jeune femme sort, accompagnĂ©e de son chevalier servant.ââŻDis voir, quâest-ce que tu traĂźnes dans ton sac pour secouer ces deux abrutis ainsi.Il fouille dans sa sacoche et en extrait un Ă©trange objet.ââŻCâest mon collĂšgue Roger, il a planquĂ© dedans trois goupillons en bronze, trĂšs lourds. Il nâarrĂȘte pas de me faire des farces. Ăa mâa servi, pour une fois ! Vous allez bien ?ââŻOn ne peut mieux, rĂ©pond-elle en souriant.ââŻJe⊠je peux vous accompagner un peu ?ââŻJe me demandais quand tu allais me poser cette maudite question !Il a le cĆur qui bat Ă deux cents pulsations par minutes quand une petite main vient se glisser dans la sienne et quâune douce voix lui demande :ââŻTu fais quoi ce soir ?ooOOooCe samedi, il ne travaille pas. Il ne rĂȘvera pas sur le trajet.Son rĂȘve dort encore Ă ses cĂŽtĂ©s. Les cheveux Ă©talĂ©s en corolle autour de son visage, un lĂ©ger sourire flotte sur ses lĂšvres. Cette tendre image reflĂšte mal les scĂšnes furieusement Ă©rotiques qui se sont dĂ©roulĂ©es presque toute la nuit.Loin des hĂ©roĂŻnes romantiques quâil imagine, aussitĂŽt rendus chez elle, sa belle se jette sur lui, lui roulant une pelle dâenfer, en profitant pour le dĂ©shabiller.Une fois nu, elle pose ses lĂšvres partout sur son corps. Bien entendu, sa baguette magique rĂ©agit au quart de tour Ă ce traitement.Elle fait durer le plaisir en passant la langue tout le long de la bĂȘte, puis lâembouche lentement. Il se mord les lĂšvres sous cette douce caresse.ââŻNom de dieu, murmure-t-il, Ă©merveillĂ©.Elle se dĂ©shabille tout en lui prodiguant cette cĂąlinerie. Elle lui griffe la peau des testicules dâun ongle dĂ©licat. Il est presque au bord de lâexplosion lorsquâelle se relĂšve et lui dit tout bas :Comment rĂ©sister Ă une telle supplique prononcĂ©e dâune douce voix.Il sâinstalle entre les jambes largement ouvertes, se coule sur le corps couvert de sueur. Câest elle qui sâempale sur le pieu tendu en projetant son ventre Ă la rencontre de son amant.Tandis quâil pĂ©nĂštre son antre, il embrasse avec fougue les lĂšvres, les joues, les Ă©paules. Il caresse les petits seins tout en allant chercher au fond des entrailles offertes les points de plaisir.Au point de non-retour, elle plante ses ongles dans les muscles des Ă©paules, sâarque et enserre la taille de lâhomme de ses longues jambes.Ils refont lâamour, encore et encore, jamais rassasiĂ©s.Il aime la regarder prendre son envol, assise sur lui, les yeux rĂ©vulsĂ©s.Il aime enfouir son visage dans la douce fourrure et venir lĂ©cher son nectar.Elle ouvre les yeux et lui sourit. Il caresse le visage et dĂ©pose un petit baiser sur la bouche.ââŻJe ne connais mĂȘme pas ton prĂ©nom.ââŻAgathe.ââŻFrançois.ââŻFrançois ? Jâaime la façon que tu as de me regarder le matin et le soir, dans le train. Je crois bien que je suis tombĂ©e en amour !ââŻDâoĂč te viennent ces charmantes expressions ?ââŻMon pĂšre a vĂ©cu trĂšs longtemps prĂšs de QuĂ©bec, jâaimais sa façon de parler. Je comprends tout, et jâadore. Et puis tâes fort en maudit, dit-elle en caressant le goupillon tĂ©lescopique qui frĂ©mit. Pourquoi tâes jamais venu me faire causette ? Jâattendais que tu viennes, que tu me parles. Jâaime ton sourire quand tu me regardes, jâaime tes yeux rĂȘveurs, jâaurais aimĂ© entendre le son de ta voix avant hier soir.ââŻJe suis timide, je nâai jamais osĂ© tâaborder, alors jâinvente des histoires oĂč tu es ma princesse et moi, ton chevalier servant.ââŻDes histoires ? Jâadore les histoires. Raconte-moi.ââŻAlors voilĂ . Câest un chevalier qui fait appel Ă un dĂ©tective privĂ© pour retrouver une princesse gardĂ©e par des bandits de grand chemin, mais un mousquetaire dĂ©barque dans son vaisseau spatial poursuivi par un dragonâŠDifficile de raconter une histoire quand une belle Agathe te caresse les gosses.______________________________________________âœÂč⟠Gambison : Pourpoint rembourrĂ© portĂ© sous une armure.