Petit texte inspiré d’une confession que j’ai pu lire sur un certain forum, avec un zeste de ma propre expérience.Ce texte est très soft : n’espérez donc pas de scènes faisant passer le Kâma-Sûtra pour un aimable conte pour enfants.One, two, threeIl y a peu de temps encore, j’avais un fantasme inassouvi lié à ma femme. Que je vous explique la chose : j’aimerais me promener avec Hélène (ma femme, vous l’auriez deviné) dans les rues d’une ville, accompagné d’un autre homme, d’un complice avec qui partager bien des choses. Au cours de cette flânerie urbaine, en toute discrétion afin qu’elle n’entende pas, il aurait eu l’audace de me confier qu’il était très attiré par ma femme.Ah, ma femme ! Une jolie brune aux yeux verts, un peu plus âgé que moi, un tantinet complexée par notre écart d’âge de cinq ans, une belle femme avec des seins de petite taille qui oublient souvent le soutien-gorge, un adorable gros popotin ainsi que quelques petits kilos superflus qui arrondissent comme il faut ses courbes, courbes que j’adore ! Elle manque souvent de confiance en elle, malgré son évident sex-appeal, comme beaucoup de femmes qui se dévalorisent face au miroir.Hélène et Étienne, ça rime très bien et notre couple est solide, mais comme d’autres hommes, j’ai mes petites lubies et fantasmes, comme le trio évoqué au début. J’avais même un jeu de mots pourri pour qualifier tout ceci : Hélène de Trois ; je sais, ça ne vole pas haut, mais ça m’amuse. Pour ma part, je suis assez libéré mais ma femme l’est un peu moins. En effet, son éducation protestante très stricte n’aide pas beaucoup à se libérer et à entrevoir d’autres façons de vivre sa sexualité. Néanmoins, elle savait que si elle souhaitait faire l’amour avec un autre homme que moi, c’était envisageable sous certaines conditions. En effet, je ne prête pas ma dulcinée à n’importe qui ! Le marché était clair et net ; je lui avais carrément dit lors d’une discussion à ce sujet :— Chérie, je ne veux pas que tu me trompes dans mon dos, mais si tu veux faire l’amour avec un autre homme ou faire un trio, alors c’est moi qui ôterai ta culote pour révéler ton sublime cul que j’adore !— Eh bé, Étienne, t’as de drôles d’idées !— Peut-être, mais on sait jamais ce que réserve l’avenir. Et si tu dois me tromper, je préfère être plus ou moins l’instigateur.— Ah, la la, t’as franchement des idées biscornues ! Pour un peu, tu irais m’offrir comme ça à un autre homme ?— Pas à n’importe qui, ma chérie : je veux le meilleur pour toi.Elle n’avait pas répondu, prenant un air songeur. Parfois nous en reparlions, sans plus. C’était mon fantasme. C’était.Aujourd’hui, François est avec nous. Je le connais depuis le collège, c’est dire. Nous avons vécu pas mal de choses ensemble, dont des colonies de vacances en tant que moniteurs. D’ailleurs ce fut épique, et pas toujours racontable ! Et puis, comme souvent, l’entrée dans la vie active nous a éloignés, surtout quand il a été muté à l’autre bout du pays. On faisait la fête chaque fois qu’il revenait au pays natal. C’est actuellement le cas durant cette seconde moitié du mois.— Eh bien, mon François, tu as réussi à avoir deux semaines complètes de ton employeur ? Formidable !— Eh oui, tout arrive ! Tout arrive…François est séparé depuis quelques mois de sa femme. J’ai toujours pensé qu’il l’avait mal choisie. Une belle femme, soit, mais assez capricieuse et exigeante. Mon ami est patient, mais sa patience avait atteint ses limites. Et il a rompu comme une branche, d’un seul coup, à la grande stupéfaction de tous. Il a demandé et obtenu le divorce sans y laisser sa chemise. Bref, il a décidé de tourner définitivement la page. Mais il n’est pas revenu pour autant par ici, son boulot là -bas étant intéressant et rémunérateur.Nous nous baladons dans la ville, ma femme faisant souvent du lèche-vitrines. C’est le cas actuellement ; nous, les hommes, nous sommes un peu en retrait. François se penche à mon oreille :— Je ne sais pas si je dois te le dire, Étienne, mais ta femme est très excitante.— Ah bon ? Je croyais que tu préférais le modèle « grande blonde » ?— J’ai déjà donné dans ce modèle ! Je suis vacciné !— Tu as eu un échec, soit. Mais ça ne doit pas te dégoûter pour autant.— Je sais ; c’est pourquoi il faut savoir goûter à tout, dans la vie.Il se contente de sourire. Cet aveu m’étonne, je ne sais pas ce que je dois en penser, alors je laisse couler. Nous continuons à nous balader, ma femme faisant toujours du lèche-vitrines par ce beau mois de juin. Nous arrivons dans un parc. Hélène en profite pour aller sur le bord du petit lac artificiel pour y tremper ses pieds, ses chaussures en main. Moins téméraires, nous sommes assis sur le banc le plus proche. Nous la regardons. François revient à la charge :— En tout cas, ta femme est bien jolie !— Merci. Je le sais, puisque je l’ai épousée.— Tu as bien fait. Depuis le temps, je peux bien te l’avouer – il y a prescription – mais tout au début, j’avais un peu flashé sur ta future femme.— Toi ? Tu m’étonnes ! Hélène est pourtant très différente de toutes les filles et de toutes les femmes que tu as draguées !— Oui, je sais… les grandes blondes…Il se renverse sur le banc, puis il continue :— Comme dire… il y a les femmes dont tu rêves et les femmes avec qui tu vis. Ce n’est pas tout à fait comme ça qu’on dit parfois, mais ne soyons pas triviaux.— Oui, celles dont on rêve et celles avec qui on couche…— C’est ça. J’étais obnubilée par un certain type de femmes, et j’oubliais le reste. À quoi ça sert de vivre avec la plus belle créature du monde si elle est chiante à mort ? Vaut mieux vivre avec une gentille femme avec qui on s’entend bien. Cette leçon m’a coûté un divorce et quelques années perdues !— Te voici bien philosophe, François !Devant nous, Hélène continue à patauger dans l’eau, chaussures en main, sa robe légère oscillant sous la brise. C’est vrai qu’elle est excitante comme ça, ma femme, mais je ne suis pas très pragmatique. François se tourne vers moi :— Au fait, Étienne, en parlant de philosophe, de machins grecs, tu connais la légende liée au prénom de ta femme ?— La belle Hélène, celle de la guerre de Troie ?— Oui, c’est ça. Mon prénom est on ne peut plus français. Et tu connais la capitale de la France, je suppose…— Paris, bien sûr.— Et tu sais qui est Pâris, le Grec ?Je le vois arriver, gros comme un éléphant dans un magasin de porcelaine fine…— Oui, c’est celui qui a enlevé Hélène à son mari, Mélénas.— Eh bien moi aussi, je t’aurais bien piqué ton Hélène !— Acté manqué ! C’est moi son mari, et ce qui est fait est fait, François. De plus, je m’appelle Étienne et non Mélénas.— Je sais. N’empêche, le simple d’imaginer que nos places puissent être inversées me donne le vertige.— Ah-hem, tu veux dire toi comme le mari d’Hélène, et moi comme l’ami ?— Exactement !Étonné, je me penche vers mon ami :— Tu as de la chance que je ne sois pas du genre à me vexer ou à être jaloux pour un oui ou pour un non !— Je sais, Étienne. C’est pour cela que je peux me permettre de te dire tout ça. Sinon, si c’était Bernard, il y a longtemps qu’il m’aurait démoli sur place ! Et vu son gabarit, mes chances de lui résister auraient été bien faibles. Quoique, toi et moi, on est sensiblement de la même force…Je rêve, ou François est en train de m’apporter sur un plateau mon fantasme ? Je sais aussi qu’Hélène aime bien François. Et si ça se concrétisait, comme il repart loin d’ici, je n’ai pas trop d’inquiétude à avoir, sauf peut-être quelques messages. Je décide d’agir illico :— Ah, au fait, j’ai un petit truc à dire à ma femme et je reviens tout de suite.— Hé, tu vas quand même pas lui dire ce que je viens de te raconter ?— Qui sait ?Et je me sauve en riant.François n’a pas tort, c’est en effet ce que je vais dire à ma femme, mais avec d’autres mots. Hélène lève la tête, me voyant arriver. Je lui murmure ce que je viens d’apprendre de François. Pour toute réponse, ma femme lâche un laconique :— Ah bon ?— Oui, ça t’étonne ? Eh bien, moi aussi.— D’habitude, il cavale toujours après des grandes blondes, un peu hautaines, des mannequins, quoi… Rien à voir avec moi !— Oui, c’est ce que je croyais moi aussi. Parlons peu mais parlons bien : tu accepterais que je donne mon feu vert pour qu’il essaye de te courtiser ?Interdite, ma femme me regarde, bouche ouverte, puis elle articule :— Tu… tu veux que… que François me drague ?— Je te demande si tu accepterais qu’il te drague, ce qui n’est pas tout à fait la même chose.— Tu pinailles !Puis elle prend un air songeur, se frotte le nez, et finit par lâcher :— C’est toujours agréable de se faire draguer, et puis François n’est pas désagréable. Mais…— Mais ?— C’est pas un peu dangereux pour notre couple ? Tu as beau me dire que ton fantasme c’est que je… que je sorte avec un autre homme, et en admettant que ça se réalise pour de bon, comment tu réagiras ?— C’est moi le demandeur…— T’es peut-être le demandeur, mais imagine que tu piques une crise de jalousie ?— Je ne pense pas que je piquerais une crise de jalousie, et je sais aussi que je ne pourrais pas te le reprocher. Alors, tu en penses quoi ?Elle dodeline de la tête :— Pff, t’es chiant, toi ! C’est pas un truc à demander à sa femme de se faire draguer par son meilleur ami ! Tu réalises ?— Oui, je réalise, ma chérie…— Bon, d’un autre côté, c’est vrai que ça fait toujours plaisir de se faire gentiment draguer, surtout que François n’est pas moche, et ni un abruti…— Donc c’est oui ?— Ah, la la, t’es franchement chiant ! Si François reste léger, ça ne me dérange pas trop. S’il va trop loin, je le plante sur place, OK ? Mais je te signale que c’est à tes risques et périls. Et ne viens pas pleurer ensuite !— Merci, ma chérie !Et je l’embrasse sur les lèvres. Je réalise que c’est un peu paradoxal, je remercie ma femme de me tromper ; enfin, pas tout à fait, mais c’est un peu comme… Je reviens auprès de mon ami tandis que ma femme patauge toujours au bord du petit lac. Celui-ci me regarde curieusement, et encore, il ne sait pas ce qui va suivre ! À peine assis, je rentre tout de suite dans le vif du sujet :— Hélène n’est pas contre que tu la dragues un peu.— QUOI !?— Je dis qu’Hélène accepte que tu la dragues.— Attends, attends ! Tu… tu lui as tout dit ?— À ma façon. Au moins les choses sont claires, non ? De plus, tu sais que tu peux.C’est la première fois que je vois François afficher une telle expression d’incrédulité. Au bout d’un certain temps, il finit par me demander :— Tu… déconnes, là  ?— Pas du tout. Tu veux que ce soit Hélène qui te le dise ?— Oui… Euh, non…Entre-temps, ma femme s’est rapprochée de nous. Elle nous fait face, évitant de trop regarder mon ami. Néanmoins, celui-ci, voulant en avoir le cœur net, lui pose la question :— Ah-hem, Hélène…— Oui, François ?— Étienne t’a dit… enfin, moi pour toi…— Oui, il m’a dit.— Et… et tu es OK ?— Ben… oui…— Ah…Moi, j’assiste tel un spectateur à ce riche échange entre ma femme et mon ami. Ils décrocheraient à coup sûr l’Oscar du meilleur dialogue ! Tandis que ma femme s’éloigne un peu, j’explique à mon ami les conditions de ma femme. Il m’assure qu’il comprend parfaitement celles-ci.Je leur propose de continuer notre balade.Au début, ils se regardent presque en chiens de faïence, ne sachant pas trop quoi faire, tant la situation leur paraît incongrue. Mais cela ne dure pas longtemps car François saisit assez vite l’opportunité ; il semble voir ça comme un jeu, et tant mieux s’il y a une issue heureuse en ce qui le concerne. C’est d’ailleurs ce qu’il m’avoue assez vite en catimini. De son côté, ma femme se détend et accepte de mieux en mieux les compliments de son soupirant improvisé.Ça se passe de mieux en mieux. François se laisse aller ; on dirait qu’il semble vouloir faire table rase sur quelque chose, peut-être son mariage, ou qu’il s’est pris au jeu. Il est vrai que ma femme en récompense, ce n’est pas rien. Je retrouve mon copain de virées, celui de nos années d’étudiants ; c’est étrange comme sensation. Il ose de plus en plus, se rapproche même physiquement d’elle jusqu’à la toucher parfois, et Hélène ne proteste pas du tout : elle semble prise aussi dans ce jeu insolite qui la met au premier plan et en valeur. Doucement, je me sens écarté, comme étranger à mon propre couple, François étant lentement en train de prendre ma place, et moi qui regarde tout, lointain, détaché.De lieu en lieu, joyeuse, épanouie, elle se laisse séduire petit à petit.Quelques rues plus loin, François s’empare de sa main qu’il garde dans la sienne. Elle ne cherche pas à se dégager. Maintenant, on dirait un vrai couple. Tout en parlant de tout et de rien, ils marchent en cadence, synchronisés, comme si ça faisait longtemps qu’ils étaient ensemble. Un peu plus loin, François s’enhardit un peu plus et passe son bras autour de la taille de ma femme. C’est ensuite collés l’un contre l’autre qu’ils déambulent dans la ville.Moi, j’assiste à cette lente progression, assez surpris de la facilité avec laquelle ces deux-là jouent au couple. Il est vrai que François ne demandait que ça. Par contre, c’est ma femme qui m’intrigue : elle se prend au jeu. Peut-être se sent-elle négligée pour se prêter ainsi à ce simulacre ? Je me dis que j’ai probablement joué avec le feu…Mais curieusement, je n’interviens pas. Je laisse aller les choses. J’écoute leur conversation qui devient de plus en plus intime.— Wonderful, wonderful life, n’est-ce pas, belle Hélène ?— Pourquoi tu dis ça ? Et arrête avec tes « belle Hélène », je vais finir par croire que je suis une glace !— Oui et non… Oui, car tu es un beau et bon dessert à déguster, lentement, délicatement, sensuellement. Et non, parce que tu es tout simplement belle.— Toi, quand tu dragues, tu y vas de bon cœur !Il la serre un peu plus contre lui.— Je rattrape le temps perdu, c’est tout !— Ah bon ? Tu as perdu quoi ?— Toi…— Ça fait toujours plaisir à entendre ; mais là , tu en rajoutes une couche.Il s’arrête, la faisant pivoter contre lui. Elle se laisse faire. Il se penche un peu sur elle.— Je vais être un peu sérieux, Hélène.— Je t’écoute… mais toi sérieux, tu m’inquiètes…Il respire un grand coup, il semble chercher ses mots. C’est ma femme qui lui tend un commencement de perche :— On dirait que c’est pas facile à dire…— Non, c’est pas du tout facile à dire… Du moins, sérieusement. Je reconnais que j’aime bien enrober les choses d’une certaine façon.— Tu veux dire quoi, parler de quoi ?— De toi et de moi.— Ah…Il pose son front contre celui de ma femme, puis il se lance :— Je reconnais que les circonstances sont étranges. Je suis actuellement avec toi parce que j’ai osé avouer à ton mari que tu me plaisais, et qu’il m’a proposé de te séduire.— Je reconnais que j’ai vu des situations plus simples…— Moi aussi, mais je n’allais certainement pas louper l’occasion de me rapprocher de toi.— Sois réaliste : je suis mariée, tu as ton boulot là -bas, loin.— Tu as raison, mais même des miettes avec toi, je prends !Un certain silence s’installe entre eux. Moi, je regarde ailleurs, tout en les surveillant du coin de l’œil. J’ai l’impression d’assister au tournage d’un film. Je me demande pourquoi je suis si passif. Mais c’est Hélène qui vient de me fournir une explication : je sais que je n’ai finalement pas grand-chose à craindre. Hélène est résolue à rester ma femme, et François habite très loin à cause de son boulot qu’il aime énormément. Et la concrétisation de mon fantasme a un prix…— Je comprends, François… Moi-même, je ne suis pas contre les parenthèses, et tu es en quelque sorte une parenthèse. Quand mon mari a dit que tu voulais me draguer, je reconnais que j’ai été surprise car je ne suis absolument pas ton genre de femme. Ni blonde, ni grande, ni plein de choses. Alors pourquoi ? Parce que mon couple te fait envie ?— Oui, j’avoue que j’aimerais bien être à la place de ton mari, au moins rien qu’une fois.— Ça me semble raisonnable…— Bien que ça ne me déplairait pas du tout que ce soit deux, trois, quatre, beaucoup de fois, plein de fois.— Ça, c’est moins raisonnable…Se redressant un peu, il sourit.— Qu’est-ce qui est raisonnable quand on tombe amoureux ?Il se penche complètement sur elle et la regarde profondément dans les yeux. Elle lui rend son regard tout en lui souriant tendrement. Puis arrive le moment le plus émouvant de mon fantasme : ils s’embrassent, simplement, naturellement.Ça y est, je suis dedans. Dedans ou dehors ? Mon fantasme se concrétise ; j’en éprouve une immense satisfaction, mais c’est comme si j’assistais à un film, ou plutôt à une pièce de théâtre. Pourtant je suis le mari, ma femme se fait courtiser, se fait embrasser, là , sous mon nez, et ça ne me fait rien d’autre comme sensation que le grand plaisir du début accompli de mon fantasme. Quasiment comme si je dégustais un bon repas, acte éphémère, mais qui sous-entend quand même un plaisir d’esthète, de gourmet. Décidément, ce n’est pas tout à fait ce que j’aurais cru, mais je suis néanmoins comblé par ce qui se déroule sous mes yeux.La suite de notre balade en ville est plutôt picaresque : nous allons dans différents quartiers de la ville ; soit c’est lui qu’elle embrasse fougueusement, soit parfois c’est moi, mais jamais les deux en même temps, de manière à respecter les bonnes mœurs (on est quand même en ville !). Quand Hélène m’a embrassé peu de temps juste après son premier baiser avec François, devant mon étonnement, elle a simplement répondu :— J’ai deux hommes ; il est juste que je sois équitable… Mais François aura aujourd’hui la priorité, tu comprends pourquoi…— Oui, je comprends…La chose qui me transporte le plus, c’est le fait que les passants peuvent croire maintenant que ma femme est en réalité en couple avec François, et que moi je ne suis que le copain de ce couple. Sauf s’ils nous ont vus dans une autre rue tandis qu’Hélène s’occupait aussi de moi. Ils ont, à présent, tous les deux l’apparence d’un vrai couple. C’est alors que je me rappelle l’avertissement d’Hélène…Home, sweet homePuis le soir tombant, un peu fatigués, nous rentrons à la maison. À peine arrivée, ma femme part se changer dans notre chambre. Nous, les hommes, sommes dans le salon, assis l’un à côté de l’autre. Passablement excité, en effervescence, François me confie :— Merci, Etienne !— De quoi ?— De tout ça, de ta femme surtout ! Franchement, j’ai eu l’impression cet après-midi qu’Hélène était vraiment ma femme…— C’était un peu le but du jeu, non ?— Oui… en effet…François opine du chef. Il semble chercher ses mots, puis il se lance :— Comment te dire ça ? Je viens de me rendre compte que, finalement, c’est ta femme que j’aurais dû choisir. Enfin, quelqu’une comme ta femme. D’accord, elle n’est pas blonde ni grande, mais…— Mais elle est plus vivable ? Moins compliquée, plus facile en quelque sorte ?— Oui, c’est ça.Mon ami semble très songeur, c’est flagrant, d’autant que je le connais plutôt bien. On dirait que ça turbine à fond dans son cerveau. Puis il se lance :— Tu as déjà beaucoup fait pour moi, et je t’en remercie sincèrement. Mais… je ne sais pas trop comment te demander ça… Pas évident…— Accouche…— OK. Cet après-midi, grâce à toi et à Hélène, j’ai pu vivre une très belle expérience, mais ça m’ennuierait qu’elle se termine déjà .— Dois-je comprendre que tu veux recommencer demain ?— Ce n’est pas tout à fait ce que j’avais en tête… Vois-tu, je songeais à poursuivre… ce soir, cette nuit…Ah oui, carrément ! Quelque part, ça ne m’étonne pas plus que ça. Si j’avais été à sa place, je pense que j’aurais pensé comme lui. Je suis à la croisée des chemins, et je ne sais pas trop quoi faire. Offrir ma femme à mon ami me tente, d’autant que je pense, que j’espère que tout ira bien et que mon fantasme ultime sera ainsi concrétisé. Mais d’un autre côté, ce n’est pas une mince affaire : on passe à une autre dimension, et il s’agit quand même de mon couple !Alors je biaise ma réponse :— Je vois… mais c’est à Hélène de décider ; c’est elle la principale concernée, tu ne crois pas ?— Si, c’est vrai. Mais toi ? Tu en penses quoi ?— Je t’ai donné ma réponse : c’est à Hélène de décider. L’homme propose, la femme dispose.— Mais si je te lis entre les lignes, tu n’es pas contre…Pour toute réponse, je me contente de sourire. C’est alors que ma femme fait son entrée dans le salon. Aussitôt, François la complimente sur son changement de robe. Il faut dire qu’elle a choisi un vêtement plus léger et assez court, ce qui permet d’imaginer bien des choses malgré les motifs floraux. Voyant tout ça, je me dis au passage que ce jeu de flirt plaît décidément beaucoup à Hélène et qu’elle semble avoir décidé de le poursuivre en soirée. Un bref coup d’œil à mon ami me confirme que lui aussi a compris la même chose. Et il ne se gêne pas de dévorer du regard ma femme qui lance :— Je vais aller préparer deux-trois bricoles à grignoter, les hommes !— C’est toi que je grignoterais volontiers, belle Hélène.Ma femme sourit, puis s’adressant à moi :— Dis à ton ami que s’il me grignote, il n’aura plus rien à se mettre sous la dent ensuite !— Fais-toi-même tes commissions, ma chérie, il est juste à côté de moi… Mais je reconnais que je ne serais pas contre le fait de te croquer un petit peu, moi aussi…— Cannibales, aussi bien toi que lui !Sur ce, ma chère femme part dans la cuisine. Se levant d’un bond, François lui emboîte aussitôt le pas. Il n’y a pas à dire, il essaie de profiter des moindres occasions ! Il est vrai que son temps parmi nous est limité et qu’il repartira bientôt. Quelques instants plus tard, j’entends une vague conversation, puis comme un petit cri. Intrigué, je m’approche, prenant soin qu’on ne me voie pas. C’est alors que j’entends :— T’es fou ! Mon mari est dans la pièce d’à côté !— Oui, je suis fou ! Je suis fou de toi !— Gros niquedouille ! On n’a pas idée ! Et puis retire tes mains de là , voyons !— Mais elles sont très bien, mes mains, là  ! Et encore là et là  !Puis plus rien. Je risque un petit coup d’œil : ma femme et mon ami sont à présent enlacés et s’embrassent. Je constate au passage que François a les mains très baladeuses et qu’il vient de retrousser la robe légère, mettant à nu le beau cul de ma femme. Alors que je m’apprêtais à revenir au salon, je l’entends murmurer :— Tu devrais enlever ta petite culotte, ça serait mieux !— T’es fou !? Pourquoi je devrais enlever ma culotte ?— Pour mieux profiter de ta petite personne ! Allez, retourne-toi, j’ai trop envie de bisouter ton magnifique cul !— Ah, ces hommes, j’te jure ! Quand je pense que je croyais que tu ne faisais que dans la grande blonde scandinave !— Moi aussi, jusqu’à ce que je découvre tout ce que j’ai loupé avec toi !— Niquedouille, va !— Ma belle Hélène, je te signale que dans « niquedouille », il y a « nique »Je l’entends pouffer de rire. Peu après, j’entends des baisers sonores ; je ne cherche pas à vérifier où ceux-ci se sont appliqués. Je retourne m’asseoir dans le salon. Je prends une revue que je commence à lire distraitement en attendant que ça se calme un peu dans la cuisine.Quelques pages plus loin, François revient tout guilleret avec un bol de petites saucisses dans une main et deux sauces dans l’autre. Enjoué, il pose le tout sur la table basse puis s’assoit à mes côtés. J’en profite pour lui affirmer :— Je vois que tu as quand même grignoté malgré l’avertissement.— Euh, c’est à dire ?— Qu’il n’est pas bien difficile de deviner ce qui s’est passé dans la cuisine, surtout en voyant ton visage. Sans parler que tu ne parles pas forcément tout bas.— Ah…Un peu troublé, il me dévisage, cherchant à me sonder pour savoir s’il n’a pas commis un impair. Je le rassure bien vite :— Pas de soucis, je savais à quoi je m’exposais en proposant ce petit jeu…— Tu me rassures ! Et merci encore pour ton esprit large…— Pas de quoi…— Ta femme est très attirante, et entre nous, ça me change agréablement les idées car mon divorce n’a pas été une partie de plaisir, loin de là  !— Et depuis, pas d’aventures ?François pioche une petite saucisse dans le bol.— Je te mentirais si je disais non. Mais rien de vraiment probant, rien de concluant. Mais je ne dis pas non plus que je n’en ai pas profité. Des bons coups, oui, mais pas avec qui partager autre chose que de la baise hygiénique.— Tu as de ces expressions !— Je suis simplement devenu plus lucide. Comme on en a déjà parlé, il y a les femmes avec qui tu baises et les femmes avec qui tu vis. Et si tu peux mettre la main sur une femme qui soit les deux en même temps, alors là , t’hésites pas une seule seconde : tu prends tout de suite ! Et ce type de femme est assez rare. Disons que tu n’en trouves pas à chaque coin de rue.Entre-temps, ma femme survient, un plateau entre les mains.— Alors, les hommes, encore en train de parler de nanas, d’après ce que j’entends ?— Exact, ma belle Hélène. Je disais à ton mari que trouver la bonne compagne, ce n’est pas si évident que ça. Et que quand tu la déniches, tu ne cherches pas trop à comprendre.Hélène pose le plateau sur la table basse. François comme moi avons droit à une belle vue dans l’échancrure de son décolleté ! Puis elle se redresse, se plaçant de côté :— C’est grosso modo ce qu’Étienne a fait avec moi, tu sais…— Ah bon ?— Oui. Quand ça a été plus sérieux entre nous et qu’on a commencé à vivre un peu sous le même toit, il m’a demandé en mariage dans le mois ! Il m’a d’ailleurs surprise.— Tu as dit « oui », je suppose.— Eh bien, non ! Je lui ai dit qu’il était bien gentil, qu’il était un amour, mais qu’il valait mieux attendre un peu pour être sûrs.Intrigué, François se tourne vers moi.— Ah bon ? Elle ne t’a pas dit « oui » tout de suite ?— Non, c’est comme elle vient de dire. Elle a préféré qu’on attende un peu pour voir si on était vraiment compatibles. Et elle n’a pas dit « oui » non plus à ma demande suivante, ni à celle d’après. Bref, elle a pris le temps de réfléchir.— Eh bé ! Tu t’es fait désirer, Hélène !— Qu’est-ce que tu crois, que j’allais me jeter à la tête du premier qui m’offre une alliance ? Non, non, on choisit le bon avant.François devient songeur.— J’aurais aimé que mon ex ait eu le même raisonnement que toi…Puis il lance son bras pour agripper ma femme par la taille et l’attirer à lui. Puis Hélène se retrouve assise sur ses genoux sans qu’elle ait bien compris ce qu’il lui arrivait. Et il la tient fermement afin qu’elle ne s’échappe pas. Le rouge aux joues, ma femme ne sait plus quoi dire. Son ravisseur en profite pour lui expliquer :— Ton mari est d’accord pour que nous continuions… Il est même au courant pour la cuisine.— Ah…— À prime vue, il n’est pas contre le fait que ça se poursuive… et moi, j’adorerais que toi et moi nous puissions être comme mari et femme… cette nuit…— Ah… ça aussi…— Mais ton mari a dit aussi que ça dépendait de toi. Il a même ajouté que l’homme propose et que la femme dispose.Toujours assise sur les genoux de son geôlier, Hélène me regarde intensément.— Tu as dit ça ?— Oui, j’ai dit ça.— Ah bon ? Eh bé ! C’est décidément la journée des surprises !François la couve du regard, et moi j’attends sa décision. Il y a des moments-charnières dans une vie, et nous sommes tous les trois en train d’en vivre un. Je vois bien que ma femme hésite, qu’elle est partagée, qu’elle voudrait bien mais qu’elle tergiverse, qu’elle lutte intérieurement. C’est François qui casse le silence pesant par une remarque totalement hors propos :— Ho-ho ! T’as plus de culotte ? dit-il en caressant l’endroit d’une façon impudique par-dessus sa robe légère.Assez troublée au tout début, ma femme s’offusque quelques secondes plus tard mais elle reste néanmoins assise.— Mais, mais… T’as besoin de le crier sur tous les toits ? T’es impossible, t’es même pire que mon mari ! Rien que pour ça, je devrais te planter là  !— Ne te fâche pas… Pour moi, ça répond partiellement à la question…— Ah oui, et en quoi ?— Eh bien, ça prouve que tu n’es pas contre…Et là , ma femme ne sait plus quoi dire et elle rougit de plus belle, ce qui lui va bien. Sentant une carte à jouer, j’interviens dans l’échange :— Pas faux, en effet… Tu fais souvent la même chose avec moi…— C’est ça, déballe toute notre vie privée ! Bon, écoutez-moi bien, les hommes. Oui, je ne suis pas contre, mais c’est pas facile à gérer comme situation. Je reconnais qu’il est assez tentant de… enfin… de vivre une petite aventure. Oui, j’ai beaucoup aimé être draguée cet aprèm ; notre balade coquine à trois dans la ville, c’était génial ; mais là , il s’agit une autre étape, moins… moins anodine.— Je comprends…— Si tu comprends, accepte le fait que je ne réponde pas tout de suite. Laissons aller les choses et on verra… Ça vous convient, les hommes ?— Ça me convient, répond François.— Moi aussi… dis-je par la même occasion.— Très bien !Puis elle se lève. François ne tente pas de la retenir.Puis la soirée se poursuit. Je sentais bien qu’au début ma femme était un peu mal à l’aise, mais très vite nous avons su lui faire oublier l’enjeu. Elle s’est ensuite détendue. François a continué ses compliments, ses petits gestes envers elle, la frôler, la caresser, glisser parfois furtivement sa main sous sa robe. Quelquefois, elle a protesté pour la forme. Occasionnellement, elle s’est contentée de rire un peu. Souvent, elle n’a rien dit, se contentant de sourire.Il est tard, à présent. Hélène est à nouveau sur les genoux de mon ami, sa tête sur son épaule. Languissante, elle se laisse aller, s’abandonnant aux caresses de François. Le temps semble comme suspendu, figé. C’est François qui rompt la quiétude du moment :— Hélène… je suis en train de vivre avec toi quelque chose que je n’avais jamais vécu…— Ah ? Et quoi ? demande ma femme, la tête toujours sur son épaule.Son câlineur poursuit :— Jamais je n’ai eu une femme alanguie contre moi, sur mes genoux, qui se laisse caresser comme je le fais avec toi actuellement, le tout dans ce sentiment de plénitude…— Jamais de câlin de la sorte ?— Non… Jamais…— C’est triste ! dit-elle en mettant ses bras autour de son cou.Puis ils se taisent, savourant l’instant présent. Moi, comme tout à l’heure en ville, je me sens étranger, comme de trop. Je sais à présent ce qu’il va se passer dans quelques instants. Mon fantasme ultime prendra définitivement fin car il sera sans doute concrétisé. C’est à la fois si simple et si compliqué. Je préfère ne pas trop y penser.Ce moment vient trop tôt à mon goût. François se décide. Il tourne la tête vers moi.— Étienne, il va falloir que nous te quittions pour ce soir. Nous irons dans la chambre d’amis, je pense que c’est la meilleure solution…— Je comprends…— En tout cas, un grand merci, et je peux t’assurer que je m’occuperai bien d’elle…— Je te crois sur parole.Sortant de sa demi-torpeur, ma femme intervient. Elle s’adresse à son soupirant :— Tu peux me lâcher, juste une minute ?— D’accord…Lentement, elle se lève ; j’en fais de même. Nous sommes face à face à nous regarder, elle, ma femme, moi, son mari. François se lève à son tour, un peu en retrait. Délicatement, Hélène pose sa main sur ma joue. J’aime son contact si apaisant. Elle me sourit un peu tristement.— Tu sais ce qu’il va se passer, n’est-ce pas…— Oui.— Tu es et tu restes mon mari, tu sais…— Je sais, et c’est parce que je le sais que j’accepte…Hélène pose son autre main sur la joue de François. Lumineuse, elle nous sourit.— Vous êtes mes hommes ; je vous adore tous les deux, et j’ai beaucoup de la chance de vous avoir.Nous ne répondons rien : les paroles sont parfois inutiles, d’autant que j’ai la gorge nouée ; François aussi, sans doute. Quant à elle, délicatement, elle nous embrasse tous les deux, chacun à tour de rôle, langoureusement, un long baiser plein d’amour et de don.Puis, se détournant de moi, elle prend la main de François et elle se dirige avec lui vers la chambre d’amis.