Je suis une femme dangereuse, j’ai tué mon mari ! Il est mort hier alors qu’il venait à peine de fêter ses quarante ans. Quinze années d’histoire en commun, mais pour lui maintenant, c’est fini !Notre rencontre totalement fortuite s’apparenta à un coup de foudre, nos routes n’auraient pourtant jamais dû se croiser…Très grand, je lui rendais plus de vingt centimètres. Blond aux yeux bleus, il ne pouvait renier ses ancêtres vikings, les miens me transmirent une peau noir-ébène et des cheveux crépus de couleur identique. Extraverti, il aimait s’amuser et avait le contact facile, alors que moi, je manquais de confiance et étais plutôt réservée. Je ne saurais définir ce qui me plut chez lui et ne comprends toujours pas ce qui l’attira en ma personne, enfin, peut-être que si… certainement mon cul ! Notre avenir commun démontra cette hypothèse, car la levrette resta sans conteste sa position favorite.Oui, ce devait être ça… j’avais un bon cul de black, comme le disaient certains lourdingues en s’imaginant me flatter. Le regard insistant des mecs ayant néanmoins tendance à bloquer sur cette zone de mon anatomie ne prêtait pas vraiment à confusion, quant aux attouchements salaces des quelques pervers croisés dans le métro, ils accréditaient apparemment aussi cette théorie. Je n’en sais rien en fait… Je ne l’ai jamais vraiment vu de visu, moi, mon cul !Toutefois, comme pour toutes relations naissantes, la passion coulait dans nos veines et nous passions la majeure partie de notre temps libre dans la chambre à coucher. Bon, optimiser de temps à autre la banquette arrière de notre véhicule ne me posait pas vraiment de problèmes, monopoliser un moment les cabines d’essayage des magasins de fripes pour de rapides turlutes non plus.Concernant ces furtives, mais intenses gâteries, mon Jules appréciait ma technique en la matière… La reine de la pipe, se plaisait-il à me dire ! Ne voyant pas bien ce que ma façon de sucer pouvait bien avoir de différent de celle des autres filles qu’il avait pu connaître, je ne compris jamais vraiment pourquoi. Une fellation reste une fellation, non ? Quoiqu’il en fût, cela me flattait, du coup, forcément, je ne rechignais jamais à accueillir sa queue entre mes lèvres pour l’embrasser avidement et me délecter de chacune de ses jouissances. Alors oui…, peut-être y mettais-je effectivement un peu plus de cœur que ses anciennes conquêtes !Malgré ma timidité, le sexe avec l’être aimé ne me rebutait donc pas… Je me surprenais même plutôt gourmande et étais rarement rassasiée. Sans tabous, je pratiquais dans l’intimité exclusive de notre couple tout ce dont mon homme pouvait rêver. Nous nous promîmes évidemment tout ce que les personnes éprises l’une pour l’autre se promettaient, et Jacques m’épousa.Tout cela vous semble certainement bien idyllique, mais le conte de fées ne dura malheureusement qu’un temps, car le feu qui nous embrasa fatalement s’estompa. Je ne sous-entends pas que l’amour s’éteignit, il resta bien présent même si nos galipettes devinrent plus éparses et que l’euphorie de notre rencontre s’assagit progressivement. Le désir ardent s’émoussa donc et céda la place à « l’envie d’avoir envie »… bien que, de toute évidence, pas suffisamment !–––oooOooo–––Je venais de passer une sale journée, une de celle qui vous éreinte et ne se déroule pas comme vous l’auriez souhaitée. Une fois de retour à l’abri de notre cocon, je n’aspirais qu’à dormir et qu’à laisser mes contrariétés derrière moi, mais Jacques, lui, ne l’entendit pas ainsi, et se blottit tendrement contre moi. Ce délicieux câlin m’apaisa et me réconforta, mais forcément, mon homme se montra de plus en plus entreprenant… sauf que moi, à cet instant précis, je n’avais vraiment pas envie de plus… !L’air en détresse, il insista. Mon pauvre amour en érection affichait un regard de chien battu et semblait supporter sur son dos toute la misère du monde. Il me demanda ce service, je me devais de lui faire plaisir. Plus par empathie que par désir, mais aussi par pitié, je le branlai compatissante. Le sexe que j’empoignai alors m’apparut telle la plus insignifiante des colonnes de chair. Cette queue habituellement me chamboulait, me procurait des frissons et une irrésistible envie de l’accueillir entre mes cuisses ; la tenir entre mes doigts ne manquait d’ordinaire jamais non plus de me donner des idées coquines, mais ce soir-là , cette magnifique trique tant appréciée ne demeura pour moi qu’un pénis anodin.La branlette empathique et dévouée ne s’avéra forcément pas suffisante, il voulut que je le suce. Au point où j’en étais, mes lèvres rejoignirent mes mains pour lui prodiguer la pipe dont il souhaitait bénéficier. Moi, j’y vis surtout le moyen d’en finir au plus vite. D’ordinaire, j’adorais sentir sa jouissance s’écraser sur mon palais… mais là , le goût âpre et amer de son sperme m’écœura. Cet acte maintes fois consommé et tellement grisant par le passé par absence de désir se révéla finalement sale et dégradant.Mon Jules s’endormit reconnaissant et apaisé. Je ne fermai pas l’œil de la nuit.–––oooOooo–––Des soirées telles que celle que je viens de vous conter, il y en eut d’autres…, d’abord très anecdotiques, puis de plus en plus fréquentes. Plus j’acceptais de le soulager ainsi et plus ma libido s’éteignait, plus il me réclamait ce service et plus il me répugnait. L’acte sexuel ne devrait-il pas plutôt résulter d’une pulsion partagée et synchrone ? Lui donner mon corps par devoir conjugal devint donc rapidement la norme.Mes turlutes appliquées très vite ne suffirent plus… n’étais-je pourtant pas la reine de la pipe ? Non, il ressentit en prime le besoin de me pénétrer, par le cul ou par le con, cela n’avait pas d’importance, à partir du moment qu’il y avait alternance. Mon désir comptait peu si ce n’était pour le conforter dans sa virilité… Je dus alors faire semblant pour ne pas contrarier monsieur, il ne fallait surtout ni le blesser ni le rabaisser concernant ses talents de formidable baiseur.Il se servit de moi plus de dix ans pour assouvir ses pulsions bestiales sans se soucier de mon propre appétit… Dix ans s’écoulèrent donc à réaliser mon devoir conjugal en lui vidant régulièrement les couilles pour ne surtout pas agacer son orgueil de mâle tout puissantQuoi de plus normal me direz-vous ? J’étais sa femme… une épouse modèle se devait d’essorer convenablement son mari bien aimé… lui qui, soit dit au passage, s’avérait stérile. Je reçus tout ce temps et quotidiennement sa semence inféconde dans tous les orifices… et s’il vous plaît, avec le sourire de surcroît. Quelle nécessité avait-il en plus de souhaiter m’entendre gémir ? Du plaisir, il savait bien que je n’en éprouvais plus ! Plus les jours passèrent, plus je le détestai… je finis par le haïr. Il me baisait, je simulais pour flatter son ego. Il s’endormait sevré, je pleurais toutes les larmes de mon corps. Comment avait-on pu en arriver là  ? Dix ans… ; 120 mois à subir… ; 3655 fois violée ? N’ayant jamais eu le cran d’afficher un refus explicite, je ne lui reproche rien. Mais il y eut tant de choses bafouées… !Je l’ai tué, je ne souhaitais pourtant pas sa mort.–––oooOooo–––Je fis acte de bénévolat dans une association œuvrant en faveur de l’écologie. Un nouveau membre nous rejoignit… un homme charmant avec lequel je me liai d’amitié.J’entends déjà tout le monde jaser… détrompez-vous, nos relations demeurèrent longtemps purement platoniques. Toutefois, Christophe m’écoutait et se montrait attentionné, revalorisant un peu le blason de la gent masculine qui, je le reconnais, tombait à mes yeux en désuétude.Bien entendu, l’environnement bienveillant et rassurant trouvé au sein de cette association m’incita à n’accorder à cette activité qu’une place de plus en plus importante… Du coup, je partageai forcément avec Christophe de plus en plus de moments en communs. Jacques quant à lui, jaloux comme une teigne, s’inquiéta.Mon mari me pista donc méthodiquement. Avec le recul, je le soupçonne surtout d’avoir eu bien plus peur de me savoir désireuse plutôt qu’amoureuse. Sa préoccupation principale restait avant tout de ne pas être pris pour un con, sa petite fierté passait certainement comme toujours en priorité.Quoiqu’il en fût, son espionnage s’avéra fructueux. Il nous surprit la semaine dernière pour notre premier baiser. Une délicieuse attention, car je m’épris de plus en plus de Christophe… lui seul me démontra, au fil du temps, plus d’intérêt pour ma personne que pour mon cul. Je n’irai pas jusqu’à dire que j’étais confiante, je me sentais mieux… juste mieux en sa présence !Les quelques jours qui suivirent se passèrent évidemment dans une ambiance délétère, mais bizarrement, j’éprouvai presque du soulagement à ne plus devoir faire semblant. Jacques entreprit de nous réconcilier sur l’oreiller, il ressentait certainement le besoin de marquer son territoire en inondant de sa semence mes entrailles. À défaut d’écarter à nouveau les cuisses, je claquai la porte et m’enfuis.Jacques essaya bien de me reconquérir… il perdait son exutoire du soir. Il tenta de se montrer indulgent, tendre et compatissant, mais également agressif et culpabilisant par moment. Toutes ses sollicitations demeurant vaines, le temps du chantage affectif arriva, il menaça même de se pendre si je ne revenais pas.A-t-il mis cette provocation à exécution ? Toujours est-il que pour moi, il est mort… tout comme l’épouse que j’étais.J’éprouve bien sûr aujourd’hui de la nostalgie pour les instants fusionnels passés en sa compagnie à nos débuts, de la tristesse aussi pour l’homme qu’il fut…, mais reste indifférente pour celui qu’il était devenu. Je ne sais pas si je réussirai à me reconstruire, à aimer encore et surtout, à désirer et ressentir à nouveau du plaisir. Christophe parviendra peut-être à me soigner, mais il lui faudra de la patience…Et surtout beaucoup de vigilance, car je suis une femme dangereuse, j’ai tué mon mari !