Avertissement :Cette nouvelle risque de choquer la sensibilité des plus libérés. Je l’assume et m’en vois vraiment désolé pour ces derniers. Oui, je me suis indéniablement laissé endoctriner par un certain puritanisme social, je lutte, mais ne peux que m’y résoudre.Concernant les protagonistes de mon histoire, l’homme n’est pas un mâle dominant voulant à tout prix asseoir son pouvoir en défonçant des trous de balle. Non… il ne s’agit que d’un gars des plus banals. La femme n’est pas soumise, elle n’accepte ni n’endure pas tout pour flatter l’orgueil du mec dans sa virilité, sa jouissance et son besoin de posséder. Même en cherchant bien, vous ne dénicherez ni mouille ni cyprine, pas de salope ni de pute. D’énormes queues dures comme du bois qui pénètrent profondément et délivrent des litres de foutre brillent par leur absence. En dépit d’une minutieuse lecture, vous ne trouverez pas la présence d’éjaculations faciales ; d’orgasmes sur une poitrine ; ou de vidanges de couilles dans le gosier d’une poule, car je milite en faveur de la société protectrice des animaux.Je vais simplement vous conter une histoire sans prétention, une rencontre tout à fait commune, une attirance des plus naturelles… juste une envie de chérir une personne pour ce qu’elle dégage et ce qu’elle représente. Désolé, il ne s’agit que d’une femme ! Le sexe opposé aurait démontré mon ouverture d’esprit, mais je ne suis qu’hétéro. Je compte donc vous parler du frisson ressenti lorsque les peaux entrent en contact… de la quintessence des sens tandis que les corps s’unissent par désir réciproque dans un élan d’amour.Voici mon histoire :Elle : ma museQuelle beauté !La chaleur estivale m’étouffe, m’asphyxie…, et pourtant je vis mon heure de rêve quotidien. Mon regard, bien qu’hypnotisé, vagabonde et caresse tout en se délectant des courbes si harmonieuses sur lesquelles il vogue et embrasse. Allongée à plat ventre pour bouquiner, la cambrure de ses reins révèle, en raison de la position adoptée, de magnifiques fesses mises en valeur par le maillot échancré qui épouse à merveille ces dernières ; sa peau, un brin hâlée, semble si douce ; ses jambes, fines et interminables, brillent à la clarté du mois d’août ; quant à ses pieds, tendus et plantés dans le sable, ils présentent une délicieuse voûte plantaire sur laquelle je laisserais bien s’aventurer un doigt coquin des orteils au talon. Insouciante et ignorante de la passion qu’elle provoque, d’une main légère elle tourne les pages d’un livre qui, seul, lui tient compagnie.Le naturel qu’elle affiche dans cette presque nudité me trouble. En l’absence de vêtements pour dorer au soleil les corps s’exposent en toute impudeur, je les vois bien sûr, mais ne les regarde pourtant plus. Le sien, oui… ! Le désir à son apogée en admirant cet être ensorcelant risque fort de rester contrarié, cependant… je redoublerais bien d’efforts pour lui faire vivre mille voluptés. Je souhaiterais la couvrir de douceurs, mais la serrer dans mes bras me suffirait…— Bonjour, monsieur !Je n’ai d’yeux que pour elle et demeure là , scotché à rêvasser, à fantasmer devant tant de merveilles. Tout m’enivre : son élégance ; sa beauté ; son charisme. Unique et sublime, elle exerce sur moi une attraction certaine, un spectre hantant mon esprit pour en effacer toutes cohérences, toutes…— MONSIEUR, s’il vous plaît !Dur retour à la réalité…— Oui ?— Nous voudrions louer des jet-skis !— Désolé, nous ne mangeons pas de ce pain-là ici ! De la rame ou de la voile, c’est tout ce que nous proposons et préférons de loin laisser la pollution sur la conscience de la concurrence !Sans demander son reste, le couple « Bidochon » me tourne les talons. Aigris et contrariés par ma réponse, ou tout simplement déçus de ne pas avoir pu se procurer leurs jouets fantasmés et parfaitement inutiles, ils repartent. Une rapide inspection périphérique me désespère, ma muse a disparu. Ah non…, la voilà  ! La séance de bronzage certainement arrivée à son terme, elle prend congé en tenant sa serviette sous le bras. Passant à quelques mètres de moi, elle m’adresse un sourire ravageur. Mon cœur s’arrête un instant de battre et le temps se fige. Un visage d’ange. Un regard de braise. Je fonds. Malheureusement, elle s’en va…–––oooOooo–––J’endosse la responsabilité d’une petite école de voile sur la côte méditerranéenne. Mon quotidien : tenter de faire partager ma passion au travers de stages ou de cours particuliers, mais aussi louer des paddles et des kayaks afin de permettre au club de survivre.Un métier de rêve me direz-vous : le bon plan pour la drague… Et c’est vrai que des jolies filles, j’en rencontre à la pelle. Je n’ai malgré tout plus vingt ans et ai passé l’âge de me laisser tourner la tête… alors pourquoi ? Comment me perturbe-t-elle à ce point ? Malgré sa presque nudité tant admirée, je ne la connais ni d’Adam ni d’Ève… qu’a-t-elle de plus ? Quelles différences ? Dans l’espoir d’une réponse, je toise, je détaille et scrute à l’affût de la moindre imperfection dès que l’occasion se présente. Bien sûr, j’en aperçois : un bouton sur la fesse, une rougeur sur la cuisse…, des défauts ? que dis-je ? Si tant est qu’ils en soient, ils ne me font la désirer que plus fort. N’ignorant pas que ma passion restera inassouvie, j’ai conscience que je vais en souffrir. La folie me guette, mais c’est plus fort que moi, je suis envoûté !Les jours passent et se ressemblent. Toujours le même rituel. Elle apparaît l’après-midi pour s’installer devant mon cabanon en me plongeant pour une heure dans une bulle intemporelle, dans un monde féérique. Le simple fait de la savoir présente, je me sens bien et léger.–––oooOooo–––Une fois par semaine, j’organise au club un repas entre collègues et adhérents où tous les acteurs saisonniers de la commune peuvent se joindre. Le concept : prolonger la soirée autour d’une part de pizza, d’une bière ou d’un verre de vin. Il s’agit d’un moment pour décompresser du travail harassant réalisé en journée, profiter de la douceur du crépuscule, et occasionnellement de la magie d’un lever de soleil.Les pompiers du poste de secours voisins se mêlent souvent à nous…, et parmi eux, elle apparaît.Mon sang se glace. Ma muse toujours aussi radieuse et rayonnante m’intimide, en l’accueillant, moi, je perds mes moyens. Je la trouvais magnifique à moitié dénudée sur la plage, vêtue, elle s’avère encore plus belle. Une légère robe printanière arrivant à mi-cuisses l’habille, un coup de vent complice relève le jupon qu’elle replace l’air un peu gêné malgré tout…, elle est tout simplement adorable ! Le souffle inopportun n’a rien découvert que je ne connaissais pas déjà , pourtant, le charme du moment ne me laisse pas insensible. Un maquillage succinct met en valeur une mignonne petite frimousse, et alors qu’elle me tend le coude – mesures COVID obligent – je reste sans voix…— Salut, moi, c’est Justine !— …— Je suis logée par la commune au même endroit que les secouristes, ces derniers m’ont conviée à la fête. Cela pose-t-il un problème ?— Bien sûr que non, bienvenue, Justine ! Moi, c’est Marc.Une soirée ordinaire… ou presque ! L’alcool coule à flots, les tensions s’apaisent, les sourires ne quittent plus les visages, l’ambiance festive crée des liens et des affinités tout en rapprochant les âmes. Les masques que nous portons tous au quotidien afin de nous protéger des jugements hâtifs tombent peu à peu.Justine s’avère charmante et sa conversation se révèle tout aussi agréable que sa plastique si souvent admirée sur la plage. Je bois ses paroles et me laisse bercer par sa voix. Sur quoi devisions-nous déjà  ? Ah oui… d’elle…, elle me parlait d’elle ! Elle vendait des fripes dans une petite boutique avant que ce satané virus ne la propulse au chômage. Elle reprit ses études dans l’espoir d’être guide-conférencière et cet été, elle réalise son stage pour valider sa formation au musée de la station, d’où sa présence parmi nous. Elle…, elle…, elle me plaît de plus en plus et les heures s’égrainent telles des secondes en sa compagnie.La nuit est bien avancée et peu à peu mes convives repartent, je m’en aperçois à peine. Assise à mes côtés, sa main frôle imperceptiblement la mienne au cours de notre discussion. Serait-ce intentionnel ? Je reste immobile, l’air de rien, je savoure innocemment ce moment. Le contact s’affirme pourtant et ses doigts, doux, attentionnés et rassurants, caressent tendrement. Elle rit. Qu’ai-je dit ? Ma timidité naturelle se matérialisant par un rosissement spontané de mes joues semble le déclencheur de son amusement. L’afflux de sang à mes pommettes n’est pas seul à témoigner de mon émoi… Elle n’a pas l’air de s’en être aperçue, ouf !Me rapprochant, un silence s’installe. Me fixant, son regard s’intensifie et pour la première fois, le mien se hasarde à le soutenir, je n’en mène pas large malgré tout. Restant figé, comme pétrifié, tout mouvement me paraît insurmontable. En définitive, elle prend les devants, l’initiative que j’espérais tant sans en avoir l’audace d’en rêver, et nos lèvres entrent en contact.Une attirance ardente, incontrôlable… ! La nécessité de me saouler de son odeur devient irrépressible. En fait, j’ai juste besoin de savourer ses caresses…, simplement lui appartenir inconditionnellement pour son plaisir, son bonheur, son bien-être et le mien. Ragaillardis par ce témoignage de complicité et de désir réciproque, mes mains partent à la découverte de cet être tant chéri et déjà primordial à mon existence. Se faufilant, elles apprivoisent doucement son épiderme qui semble réagir par de légers frissons. Je l’embrasse à nouveau, plus passionnément encore. De frugaux souffles ; des massages langoureux ; ma bouche s’approprie la moindre parcelle de sa peau, la sienne ne démérite pas en m’enveloppant de tendresses. Son corps maintenant totalement dénudé me ravit, je le dévore. Je l’aime, je me donne. Elle s’offre, je la prends. Notre union, intense, s’avère magique…— Marc ?— …— Je ne sais pas à quoi tu rêvais, mais cela m’avait l’air plutôt agréable ! ironise-t-elle en pointant d’un regard coquin la bosse peu discrète qui déforme mon maillot.— Désolé, je me suis assoupi… ! ânonné-je en masquant maladroitement le signe physiologique incontrôlé et incontestable de mon désir.Elle me sourit en se levant pour prendre congé, sa main quitte la mienne en créant une sensation froide d’abandon, puis elle rajoute :— Toujours est-il que j’aimerais vraiment apprendre la voile. Aurais-tu de la place pour me donner quelques cours ?— Mais avec plaisir ! Demain à seize heures si tu le souhaites.— Super ! J’ai hâte !Elle ne me tend pas le coude comme il se doit en ces temps de distanciation sociale, mais me présente sa joue que j’embrasse avec cœur. Le « coronavirus » ne doit certainement pas atteindre les personnes qui s’apprécient, ou bien… au diable ce dernier, il ne m’empêchera pas de vivre ! Je préfère de loin mourir d’atroces souffrances plutôt que de me passer de cette attention.Une bise discrète, puis une autre plus appuyée, et elle me quitte.–––oooOooo–––La saison vient de se conclure et la plage se vide peu à peu. Les travailleurs estivaux s’en sont allés, emportant avec eux ma muse créditée d’un diplôme supplémentaire… Justine demeure toujours bien présente dans mon esprit et je ne suis pas près de l’oublier… J’ai un peu l’impression d’avoir laissé filer la femme de ma vie pour quelques principes désuets. L’amour que je lui voue ne s’évaporera pas si facilement !À l’issue de la fameuse soirée que je viens de vous conter, la nuit fut agitée, mon sommeil pas vraiment récupérateur et ma frustration… incommensurable.Pourquoi ne l’ai-je pas retenue ? L’envie ne me manquait pas et elle ne semblait n’avoir rien contre. Je sais : notre différence d’âge ! J’avais des remords, même si du haut de ses vingt-six ans elle s’avérait suffisamment mature pour ne pas se laisser influencer. Pourtant… oui pourtant…, c’était plus fort que moi, je ressentais le besoin de la protéger. Qu’elle regrette de s’abandonner dans les bras d’un plus vieux m’angoissait certainement aussi. Je n’assumais pas, les années qui nous séparaient me donnaient l’impression de me retrouver dans la peau d’un pervers profitant de l’innocence d’une jeune femme de vingt ans sa cadette. Je la convoitais surtout… La passion éprouvée à son égard n’aveuglait-elle pas ma perception des choses ? J’aurais dû m’abandonner, ne pas réfléchir et ne penser qu’à moi, mais je n’avais malgré tout pas le droit d’abuser de sa naïveté… elle me paraissait si candide ! Le désir charnel rend égoïste et possessif, l’amour quant à lui incite à l’altruisme…, j’ai bien fait de m’abstenir, les remords me seront réservés.Bien sûr, je la revis pour quelques séances de planche à voile. C’était une bonne élève et même si ce n’était pas l’envie qui me manquait, je restais très professionnel et n’eus pas le courage de lui déclarer ma flamme.Au cours de nos discussions, je lui confiai qu’il m’arrivait d’écrire. Elle avait d’ailleurs lu quelques-uns de mes récits et n’ignorait pas que je les publiais ici. Peut-être surfera-t-elle un jour sur Rêvebébé et découvrira-t-elle ce dernier ? Elle prendra alors connaissance de la force des sentiments que j’éprouve à son égard et de tout ce que je n’osai jamais lui dire. A-t-elle aussi des regrets ? Je ne le saurais certainement jamais. J’espère que non, autrement, j’aurais dû…