Ça s’est passé à la bibliothèque. Je me présente, Rodrigue, la vingtaine, brun ou blond à votre convenance, tout sauf moche – Je suppose que ce n’est pas votre fantasme d’imaginer quelqu’un de laid s’envoyer en l’air – et étudiant en lettres modernes à l’université de… Faite votre choix, près de chez vous. Alors quand je parle de bibliothèque, je veux dire une bibliothèque universitaire, grande, avec plusieurs étages et grouillante d’autres étudiants de tous poils courant derrière leurs licences, leurs masters et leurs doctorats. Pour ma part, j’en suis au master, chose qui me prend la plupart de mon temps d’où mes séances de masturbation de moins en moins fréquentes et mon envie de sexe toujours plus présente. Il fut un temps, le bon temps de l’adolescence (bon pour ça en tout cas) où c’était tous les jours. C’est incroyable ce qu’on peut être des êtres sexuels, tout de même.Quoi qu’il en soit, je rentre en ce gai vendredi de novembre, comme à mon habitude après les cours, dans la B. U. accompagné d’une camarade de classe avec qui je m’entends plutôt bien, la discussion bassement axée sur le travail que l’on compte accomplir dans les deux prochaines heures. On trouve une grande table, on s’assoit. Claire (c’est son nom) s’installe en face, laissant la chaise juste face à moi vide pour occuper celle juste à droite. Tout en enlevant mon manteau, je fais un tour d’horizon, comme toujours, pour voir qui nous entoure. On n’est jamais à l’abri d’apercevoir une très jolie fille qui nous fasse l’exquis privilège de s’offrir à notre regard. Il y en a de toutes sortes. Des beautés négligées, des belles de nuit (entendez vraiment belles sous l’éclairage plus doux des lampes de table), des splendidement accoutrées, des nymphes de l’Oréal, chacune a quelque chose pour plaire, chacune a son petit mérite, mais mon colon, celles que je préfère, ce sont les belles aux envies subites.Cependant, mon regard ne détecte rien de tout ça à priori. Quoique, une jeune rate de bibliothèque, avec bien quatre livres épais devant elle, attire tout de même mon attention. Il faut dire qu’avec ses longs cheveux noirs parfaitement lissés qu’elle ramène en arrière de temps en temps avec ce geste vif et si féminin, son chemisier blanc et sa jupe noire qui lui arrive juste au-dessus des genoux, ses bas ou collants que je distingue assez bien et ses jambes croisées, concentrée sur son travail, je ne peux m’empêcher de penser qu’il lui manque juste la bonne paire de lunettes pour incarner le stéréotype de la secrétaire dans une grande entreprise, celle que – pour on ne sait quelle raison – le patron choisit pour s’occuper de ses dossiers et de sa plante verte. Assez jolie, finalement et dont le croisé de jambes me rappelle le bon vieux Basic Instinct. Un fantasme vivant, mesdames et messieurs, qui apparaît devant moi. Sa façon de se vêtir n’a évidemment rien de fortuit. Elle a parfaitement conscience des désirs qu’elle peut éveiller dans cette tenue, dans cette position, dans cette situation.J’essaie toutefois de ne pas faire de ce moment, un calvaire pour elle d’une intense lourdeur en ne lui jetant que quelques regards évasifs le moins souvent possible, car bien sûr, je n’ai pas envie pour autant qu’elle se lève pour venir me faire un sermon sur ma goujaterie. Je reste flegmatique, j’ouvre mon bloc-notes, je sors un stylo, je pose un livre sur la table et je me mets au travail tant bien que mal. J’échange même de temps à autres quelques mots avec Claire. La pauvre Claire qui ne se doute de rien, et qui en cet instant me permet au moins de paraître absorbé par mon travail. Mais mon regard se dirige nettement moins vers Claire ou la fenêtre que sur la table en face de moi.Je m’aperçois après un certain temps qu’elle a décroisé ses jambes, me laissant une vue assez suggestive, cependant je ne peux qu’imaginer ce qu’il y a dessous, l’espace étant trop étroit et trop sombre pour y voir quoi que ce soit. Je repose mes yeux sur mon bloc, et quand je les relève, c’est elle qui me regarde. Sans expression aucune, pas vraiment de sérieux, pas de sourire, pas de regard désapprobateur. Elle me regarde simplement dans les yeux. Cela ne dure qu’une seconde.Puis le manège continue. Elle ne me regarde presque pas, elle croise, décroise les jambes. Je commence à penser que je n’ai rien à voir avec ce phénomène. Je pose une question à Claire de temps à autre, elle m’en pose également, tout est normal, il ne se passera sans doute rien. Une fois de plus, une beauté mystérieuse ne m’aura fait l’aumône que d’un regard.Claire ne va pas tarder à partir et moi je me demande si je vais rester finalement. D’ailleurs, la jolie fille se lève. Elle range ses affaires et elle sourit. Sans raison, en tout cas que je sache. Elle met toutes ses affaires dans un grand sac qu’elle avait avec elle. Un sac si grand que je suis surpris de ne pas l’avoir remarqué plus tôt. Elle va partir. Inutile, c’est trop tard pour penser à quoi que ce soit pour la retenir. Et puis, que penserait Claire ? J’entends déjà toute la classe jaser, étant donné la majorité de filles qui la peuplent, bien que des garçons en fassent autant, sinon pire !La voilà qui passe à côté de moi. Evidemment, je ne peux m’empêcher de lui jeter un rapide dernier coup d’œil. Evidemment elle me regarde, cette fois-ci avec un léger sourire, et puis elle s’en va. J’ai à peine entendu le bruit d’un papier tomber sur la moquette juste à côté de moi. Heureusement, Claire avait les yeux sur son bouquin à ce moment-là et n’a rien vu ni entendu. J’attends donc avec impatience son départ, maintenant. Les minutes semblent des heures et j’hésite sincèrement à lui dire « C’est bientôt l’heure, non ? ». Mais je n’en fais rien. Ce n’est tout de même pas une jolie fille, aussi aguichante soit-elle qui va me faire perdre mes bonnes manières !Ceci n’empêche qu’une fois Claire partie, je me précipite sur le papier et lis :L’étage du dessous, il faudra me trouver.Pourvu qu’elle ne soit pas partie ! Et Claire qui hésitait à rester encore une demi-heure ! Je me dépêche, je descends d’un étage – sans courir, j’aurais l’air de quoi, vraiment ? – la gorge sèche, des milliers d’idées, d’images qui me traversent l’esprit : voudra-t-elle faire l’amour ou me sermonner, comme elle le devrait ? L’image de ses jambes à peine écartées ; bas ou collants ? Vais-je savoir ? Son regard croisant le mien, qui dans ma mémoire est déjà plus provocateur, et même si je la trouve, je lui dirai quoi ?Me voilà à l’étage en dessous. Je la cherche, je scrute. Bon sang, un chemisier blanc et un tailleur noir, ça doit quand même pas passer inaperçu, me dis-je. En plus, elle doit m’attendre… J’ai beau chercher, elle n’est nulle part. C’est pas possible, j’ai dû la rater. Je commence à ralentir, un peu lassé. Je relis son mot, comme pour m’assurer que c’est vraiment arrivé. Pas de numéro, pas d’adresse, juste une sorte de rendez-vous. « L’étage du dessous, il faudra me trouver. » A-t-elle voulu dire l’étage complètement en bas de la bibliothèque ? C’est quand même tordu, mais foutu pour foutu essayons. Pour y accéder, il faut prendre un ascenseur. J’appuie sur le bouton et puis j’attends.La porte s’ouvre et la voilà ! Je reste stupéfait. Elle m’agrippe, appuie sur le bouton sous-sol au passage et nous voilà partis. La descente est de très courte durée, mais suffisamment pour échanger un baiser appuyé. Electrique sensation, saveur inouïe, érection instantanée. À peine les portes s’ouvrent, qu’elle m’attrape par la main et me traîne tout au fond d’une grande salle dont les occupants n’ont jamais fait d’autre bruit que des bruits de pages, et dont la chasteté pourrait nous faire honte si l’on se préoccupait d’eux.Arrivés dans un petit recoin à l’abri des regards, ce sont encore d’autres baisers fougueux qui m’attendent. Nous avons le temps, nos bouches se caressent, se cherchent, se trouvent, se subissent, s’envahissent. Pour l’instant, nos langues n’ont rien à envier à nos sexes. Je la touche, nos caresses s’enchaînent, chaque fois plus hardies, prises entre le désir de toucher et l’excitation de déshabiller.Je sens ses mains un peu froides qui glissent avec douceur contre mon torse. Mes mains prennent ses fesses et remontent cette jupe, coupable de toutes mes pulsions. Elle me mord la lèvre inférieure. Je sens de l’électricité. Oh oui ! Pas de culotte ! Je l’ai rêvé, elle l’a fait. Je passe une main sur le satin de l’un de ses bas, puis je baisse le bas. C’est sa cuisse, sa chair, sa peau que je veux sentir !A son tour, c’est à présent à ma braguette qu’elle s’en prend. Tombe mon pantalon sur mes mollets, puis mon boxer. Une caresse, puis deux sur ma verge, puis elle l’entoure de sa main. Là, cessent les baisers pour un moment. Elle me regarde droit dans les yeux, tandis qu’elle me branle. Elle ne me masturbe pas, elle me branle, c’est un fait. C’est tout de suite rapide, c’est un peu brusque. Ceci dit, je suis dans un tel état d’excitation que ça me permet tout juste de penser à autre chose et de diriger ma main vers son sexe. Je ne dirai pas qu’il est ruisselant, non. Mais moite, c’est certain, et je n’ai aucun mal à y faire rentrer mon majeur de quelques centimètres après avoir caressé son clitoris, faisant des petits cercles dessus.Comme nous sommes debout, je n’arrive pas à m’introduire davantage en elle, ce qui est un peu frustrant. C’est si bon, j’ai envie de plus, de la posséder, de la faire mienne là, en cet instant. Mais trop tard, elle a son plan bien à elle, et la voilà qui s’accroupit, devinez pourquoi… C’est donc pendant qu’elle m’a en bouche, jouant de ses lèvres et de sa langue aussi bien que j’aie connu jusqu’à présent que, la voyant faire, jupe retroussée et accroupie, la vulve à l’air que je suis passé très près de jouir. Je m’imaginais derrière elle, la visitant avec un (ou plusieurs) de mes doigts. Heureusement pour moi que j’ai su me retenir, autrement nous aurions certainement dû nous arrêter là.Je lui demande donc d’un ton impérieux :— Viens m’embrasser.Puis :— Bouge pas… la capote…Pendant ce temps, elle se lève, attend que j’aie enfilé le préso et plonge encore une fois son regard dans le mien. Il me semble qu’elle voudrait dire quelque chose, mais elle se contente de se mordre les lèvres, et dans un « hmmm », les pose à nouveau sur les miennes. J’en profite et fais durer ce moment pour me calmer un peu. J’ai le souffle court, et j’ai quand même l’intention de lui en faire vivre autant qu’elle m’en fait vivre.Je prends mon courage à deux mains, et ma queue à une seule, et après un dernier baiser, je la laisse se retourner avant de la prendre. J’entends qu’elle a échappé un soupir, donc ne m’en veuillez pas si je m’enorgueillis une petit peu. Les va-et-vient commencent doucement. Je m’aperçois que je n’ai pas eu la présence d’esprit de faire à ses seins la politesse qu’il se doit, c’est pourquoi j’en profite pour dégrafer son soutien et je l’aide également à enlever son chemisier.J’espère garder encore longtemps le souvenir de ses seins, leur forme, leur ampleur importante sans être exagérée, la sensation lorsque la pulpe de mes doigts passait sur ses tétons… Mais assez profité, je commençais à ralentir un peu trop mes mouvements et elle me rappelle à l’ordre en poussant en arrière avec son bassin. Et puis… Et puis tout s’amplifie, mes mouvements, les sensations, les bruits que nous faisons à la limite du discret ; je la prends par les hanches et à chaque mouvement l’un vers l’autre, chacun pousse pour que ça aille plus loin, plus fort, il faut jouir, il faut que nos sexes crient notre plaisir à notre place ! Elle se cambre, ce qui presse mon sexe contre la paroi du sien, et je jouis… ou plutôt nous jouissons, en tout cas si j’en crois les contractions ressenties par ma queue et qui ne venaient pas de moi.Ensuite ? Ensuite on s’est simplement rhabillé… tout de même, ce n’est pas une tenue dans une bibliothèque ! Et puis quelques regards complices, quelques baisers pour ne pas oublier, mais pas de nom, pas de numéros, pas de « on remet ça quand ? » ; en ce qui me concerne, je l’ai vécu comme une aubaine, un moment qu’il ne faut surtout pas rater et qui a besoin d’être imprévu pour être vraiment bon. Une seule chose a changé depuis ce jour-là, je vais à la bibliothèque beaucoup plus souvent qu’avant, à tel point qu’on me dit souvent « rat de bibliothèque »…Par Louis Saturnin Thibaut