La porte s’ouvrit et elle apparut, telle une image sortie tout droit d’un conte de fées. La lumière semblait émaner d’elle. Sa beauté me parut surnaturelle. Ses yeux étaient comme deux puits d’où émanait une lumière ni tout à fait bleue, ni tout à fait verte, qui venait adoucir la blancheur presque maladive de son visage pourtant très légèrement empourpré. À chacun de ses gestes, au moindre de ses mouvements, ses longs cheveux, bien qu’humidifiés par la pluie, vibraient doucement, lançant alentour quelque effluve de son parfum lui-aussi enivrant, et quelques bouclettes ni tout à fait blondes, ni tout à fait rousses, passaient et rebondissaient devant ses yeux. Sur son front perlaient encore une ou deux gouttelettes de cette pluie, grise, maussade et triste, qui s’était abattue sur le feu brûlant, sur l’incendie charnel. Mais le feu avait été plus fort que l’eau cette fois, et ses yeux flamboyaient plus que jamais; ils crépitaient de vie, ils pétillaient d’envie, et diffusaient le bonheur autour d’elle. Au moment où j’avais entendu le bruit de la clef dans la porte, j’eus comme l’impression que mon cœur s’arrêtait de battre, suspendant son rythme comme le temps son vol. Mais là, ma pression devait être au maximum, et mon cœur et même tout mon corps battirent la chamade quand ses yeux se posèrent sur moi et semblèrent s’illuminer un instant. Elle me sourit, je lui rendis cette attention en retour. Elle franchit la porte, en commençant d’ôter son manteau encore ruisselant. Je voulus m’avancer, mais seuls mes yeux se levèrent vers elle quand elle s’approcha pour m’embrasser. Elle déposa un baiser sur ma joue. J’en soufflai un vers la sienne. Je la dévorai du regard, sans oser dire un mot. Elle me laissa un instant la contempler, sans parler non plus. Son chemisier aussi était quelque peu mouillé et collait à son corps, dévoilant presque une partie de sa quasi-perfection. J’avais très chaud, je sentais mon visage me brûler. Sa voix s’éleva soudain, douce, mélodieuse et envoûtante:_ Alors, la journée n’a pas été trop longue ?_ Une éternité sans toi. » parvins-je à articuler, toujours la fixant de mes yeux avides._ Rien que ça ? » me répondit-elle, sur un ton qui me parut proche de la plaisanterie. Elle ne paraissait pas être aussi émue de me revoir que je l’étais moi de la retrouver. Achevant de casser l’ambiance, elle me dit, désignant la table, où trônait encore son gode que j’avais oublié de ranger:_ En tout cas, je vois que tu as trouvé de quoi t’occuper… Et en plus elle était narquoise. Elle n’avait pas l’air d’avoir pris pour plus qu’un jeu tout ce que nous avions fait la veille. Alors que moi j’étais en train de tomber amoureuse d’elle… Je redescendis rapidement de mon petit nuage, et lui répondit sur le même ton:_ Je l’ai laissé là pour me rappeler de te dire que ta femme de ménage voudrait que tu le lui prêtes._ Ah, Espéranza est passée ? » me retourna-t-elle, pas plus impressionnée que ça._ Oui, elle m’a réveillée, après que ton charmant voisin l’ait déjà fait deux heures plus tôt ! Et je lui racontai alors toute ma superbe journée passée à dormir, larver et l’attendre. À son tour, elle me raconta brièvement la sienne._ Laurence vient d’appeler, » lui dis-je enfin, « je crois qu’il faudrait que tu la rappelles. »_ Oui, j’ai vu sur mon portable qu’elle avait appelé, mais elle n’a pas laissé de message._ Eh ben apparemment, c’était pour annuler pour ce soir._ Hein ? Elle ne vient pas ?_ Je sais pas trop, j’ai pas bien compris, elle m’a dit qu’elle avait rencontré quelqu’un, et qu’elle voulait rester avec lui, tranquillement, ce soir._ Oh, c’est pas trop son style pourtant…_ De quoi ? De rencontrer quelqu’un ou de vouloir rester avec lui tranquillement ?_ Les deux. Habituellement, quand elle parvient à rencontrer quelqu’un avec qui elle reste plus d’une nuit, elle tient d’urgence à le présenter à tout le monde…_ Oui, ben écoute, j’ai peut-être mal compris ce qu’elle m’a dit. Le mieux serait que tu la rappelles._ Oui je vais la rappeler, mais je vais d’abord aller prendre une douche, parce que tu vois, il pleut comme vache qui pisse, je suis trempée, et je commence à avoir à moitié froid._ Fais comme chez toi… » lui répondis-je finalement en souriant. Et c’est bien ce qu’elle fit. Un peu trop même. Elle eut tôt fait de déboutonner ce petit chemisier blanc, qui, humide, collait à sa peau tendue par le froid. J’aperçus son soutien-gorge, également blanc, entre les deux pans de son vêtement. Mon regard se détourna presque naturellement; je voulais lui préserver son intimité. Mais je ne pus m’empêcher de la regarder, au moment où elle retira complètement son chemisier, et mes yeux ne parvinrent alors plus, le temps de quelques longues secondes, à se décoller de ses seins qui gonflaient ce dernier petit bout de dentelle blanche. Elle remarqua mon regard insistant:_ Ca te gêne, que je me déshabille devant toi ? » me demanda-t-elle, apparemment étonnée._ Ben… euh… non… enfin, si, ça me gêne pour toi. » bredouillai-je bêtement._ Bah, tu as déjà vu une femme nue, quand même ? On est toutes faites pareilles. » me rétorqua-t-elle, tout en déboutonnant son pantalon._ Oui, ben, enfin, pas tout à fait quand même… C’était une sorte de jean qui avait du rétrécir à chaque lavage depuis cinq ans et qui finissait par être vraiment très moulant. Elle lutta et se contorsionna pour en faire passer la taille autour de ses hanches, le descendant doucement le long de ses cuisses._ Ca veut dire quoi, ça ? Elle tira soudain franchement vers le bas. Sa culotte vint avec. Elle se retrouva presque nue devant moi, ne portant plus que son soutien-gorge, me regardant tout naturellement, et attendant ma réponse. Je parcourus son corps du regard. Il était parfait. De haut en bas, les bonnes courbes, aux bons endroits._ Ca veut dire qu’il y en a qui sont mieux faites que d’autres… Elle passa un bras derrière son dos, et ce dernier rempart de dentelle qui supportait sa poitrine se détendit et s’affaissa soudain doucement. Un mouvement, et ses seins, comme deux lourdes pommes, m’apparurent. Elle était entièrement nue, devant moi, impudique._ C’est quoi ça, c’est de la jalousie ? » me demanda-t-elle._ Non, c’est de l’envie. Ses yeux pétillèrent un instant plus fort encore et me fixèrent, inquisiteurs, comme voulant deviner toutes mes pensées. Elle finit simplement par me sourire, et sans rien dire, elle pivota sur elle-même, faisant demi-tour pour se diriger vers la salle de bains, toujours nue et toujours impudique, roulant ostensiblement ses fesses au rythme de ses déhanchements provocateurs. Je me sentis soudain assez mal, en pensant à cette espèce de relation que j’étais en train de tisser avec Julia. Je laissai aller ma tête en arrière, fixant un instant le plafond. Je me détendis, me frottai les yeux. Le bruit de l’eau qui coulait dans la douche me parvint. C’était vrai que j’avais envie d’elle, en plus. De la voir s’exhiber devant moi n’avait rien arrangé. Mais elle, que pensait-elle vraiment ? Je parcourus la pièce du regard: elle avait laissé là en plan toutes ses fringues, par terre en boule. Et plus loin sur une chaise, son petit sac à dos. J’avais envie d’une cigarette. Et le gode qui traînait encore sur la table, toujours pointé vers le ciel. « Et si j’osais ? Après tout, ça me calmerait sans doute, j’aurais peut-être moins envie de Julia… » pensai-je en le voyant. Mon expérience de la matinée m’avait finalement plutôt enchantée, et j’eus soudain bien envie de recommencer. « Mais si Julia sortait ? Non, elle est sous la douche, et si j’entends l’eau s’arrêter, eh bien moi aussi, je m’arrêterai… » Finalement convaincue, je me levai en toute hâte, attrapai l’objet sur la table, et revint précipitamment m’installer sur le canapé, mi-allongée, mi-assise, cherchant la position la plus confortable. Je ne baissai qu’un peu mon jean, et fis descendre le gode juste entre mes cuisses, le frottant doucement contre ma culotte, de mon pubis à ma vulve. Je sentis l’excitation monter plus fort en moi à mesure que le rythme de mes caresses s’intensifiait. Je gardais quand même une partie de mon attention fixée sur le bruit de l’eau coulant dans la douche, prête à tout stopper si ma copine s’apprêtait à en sortir. Je passai ma main libre dans ma culotte, et deux doigts achevèrent d’exciter mon clitoris. J’avais très envie de ce morceau de plastique et de latex. Je baissai finalement quelque peu ma culotte aussi. J’approchai l’objet de mon intimité, m’apprêtant à l’y enfoncer doucement. Mais l’eau s’arrêta soudain. Je restai un instant pétrifiée, mais sur le qui-vive, hésitant à tout remballer, ou bien à aller plus avant. Je réfléchis rapidement, elle avait dû couper l’eau un instant pour se savonner, ou se shampooiner ou je-ne-sais-quoi. Elle n’allait sûrement pas ressortir tout de suite. Pas avant de s’être longuement rincée. Enfin j’espérais. Mais finalement rassurée par ce rapide raisonnement ridicule, je retournai avec plaisir à ma tâche initiale. D’être restée quelques secondes hésitante, à guetter l’éventuelle sortie de ma copine, m’avait finalement encore plus excitée, et j’étais trempée à présent que je m’apprêtais à enfoncer ce doux et épais morceau de fausse chair en moi. Je le pressai contre mon sexe, fermant les yeux, mais toujours l’oreille attentive. Il entra doucement en moi, très doucement. Et je dus faire de gros efforts pour ne pas lâcher complètement mes soupirs et mes gémissements, ne voulant pas que Julia m’entende. Je fis glisser lentement au plus profond de moi ce faux sexe masculin, puis le fis aller et venir lentement en mon corps. L’eau se remit à couler dans la douche, me rassurant plus encore. J’allais pouvoir me faire plaisir ainsi encore quelques minutes. Je relâchai mon attention, et m’abandonnai à un amant imaginaire qui m’aurait comblée de tant de plaisir. Mes sens prenaient le dessus sur ma raison. Je vibrais sous le bonheur que me procurait ce vulgaire bout de plastique. Je le faisais à présent évoluer de plus en plus vite, mais cassais aussi parfois le rythme en m’accordant de longues pauses durant lesquelles je le faisais lentement mais profondément glisser en mon corps. La porte de la salle de bains s’ouvrit soudain sans que j’eus réalisé que l’eau s’était arrêtée de couler. J’avais dû un peu trop relâcher mon attention… Je sursautai, surprise au milieu de ma plaisante rêverie. D’un seul coup, c’était la panique. Je retirai rapidement le gode de mon corps d’une main, et de l’autre je tentai de remonter mes fringues, le tout en jetant quelques coups d’œil vers la porte de la salle de bains, où personne encore ne se profilait. Mais ce fut vraiment la panique, et quand je voulus ressortir l’objet d’entre mes jambes, dans mon empressement, ma main fut bloquée par ma culotte, puis par mon jean. Je me débattis avec mes mains, mon gode et ma culotte, mais ce fut finalement cette dernière qui gagna. Et je dus avoir l’air très con quand, la demi-seconde d’après, Julia apparut, emmitouflée dans un grand peignoir et les cheveux drapés dans une serviette. Elle éclata de rire en me voyant, tandis que je parvenais enfin à me renfroquer plus ou moins correctement, mais toujours le gode à la main, et qui luisait encore des traces de mon plaisir récent. Il fallait que je dise quelque chose. Elle était toujours morte de rire. Je n’osais pas trop la regarder. Bon, il fallait vraiment que je dise quelque chose…_ Euh… ce n’est pas du tout ce que tu crois… » parvins-je à lâcher finalement en levant honteusement les yeux vers elle. « Bravo ! Voilà une phrase intelligente… » pensai-je immédiatement, en me faisant également la réflexion que j’étais pathétique. Elle réussit entre deux éclats de rire à me répondre:_ Mais je ne crois rien du tout, c’est juste que je ne m’attendais pas à ça… Je restai silencieuse, me contentant de rebaisser les yeux et de finir de me renfroquer._ Avoue quand même que ça a de quoi surprendre. » continua-t-elle néanmoins, toujours en se marrant à moitié. C’était vrai que la situation pouvait de son point de vue être assez drôle, mais cela m’énervait qu’elle se foute de moi comme ça. Elle poursuivit encore:_ Mais enfin, c’était si urgent que ça ? Je me levai et craquai enfin:_ Ecoute, si j’ai fait ça, c’est sincèrement parce que je pensais que ça me passerait peut-être l’envie que j’avais de toi… Elle me regarda, un instant incrédule, puis l’instant d’après ne semblant plus comprendre ce que je venais de lui dire._ Ca veut dire quoi, ça ? » finit-elle par me demander en retour. Ses yeux restaient fixés dans les miens._ Ca veut dire que je crois que je commence à tomber amoureuse de toi…_ Amoureuse ? Ou bien est-ce juste que tu as envie de moi ? C’est pas pareil._ Non, c’est pas pareil, mais moi c’est les deux. Elle détourna les yeux, comme voulant me les cacher. Je restai plantée devant elle, impassible. J’attendais qu’elle me dise quelque chose. Sa réponse vint enfin, comme une désillusion:_ Ecoute, tu as du te tromper… Moi, je ne suis pas lesbienne… Elle avait dit ça sur le ton de la plaisanterie, tandis que moi, j’étais méchamment sérieuse._ Tu ne peux pas me dire ça, pas après ce qu’on a fait hier soir…_ Mais hier soir, on était bourrées, ce n’était qu’un jeu, tu comprends, c’était juste pour se faire plaisir. Je détournai les yeux, il me sembla même que des larmes y perlèrent. Elle continua, sans doute voulant s’excuser._ Tu sais, je ne voulais pas te faire de peine, mais pour moi ce n’était sincèrement qu’un jeu. Je ne pensais pas que tu aies pu le prendre autrement…_ Ben si, pourtant… Je me tus et me rassis. Elle resta à me regarder, et ses yeux exprimèrent soudain mille émotions, mille sentiments, du regret à la désolation, de la compassion au dégoût, et du remords à l’envie. Moi je m’étais fait mille idées, mille scénarios, mais pas celui-là. Je ne pensais pas que ce qu’on avait fait ensemble la veille puisse lui paraître aussi insignifiant que ça. Elle dut déchiffrer mon regard, car elle détourna le sien, me paraissant presque honteuse. Un long silence s’installa. Je finis par lui dire qu’il fallait absolument qu’elle rappelle Laurence. Elle ne répondit rien, se contentant d’attraper son téléphone et de composer le numéro de son amie. Elle coinça le combiné entre son épaule et sa tête, et se tourna vers moi, sans rien dire, mais en me regardant avec plus d’insistance que jamais. Trente secondes passèrent ainsi. Je soutenais ce regard insistant qu’elle me lançait de ses yeux mouillés d’émotion. Mais elle raccrocha soudain, et reposa le téléphone. Sans cesser de me regarder, elle s’avança vers moi, d’un air décidé. Elle s’assit à côté de moi dans le canapé et posa une main sur ma cuisse._ Crois-moi, je t’aime vraiment beaucoup… » commença-t-elle._ Mais ?_ Mais ce n’est pas de l’amour avec un grand a. Je ne répondis rien, me contentant de plonger plus profondément mes yeux dans les siens._ Je ne veux pas te faire de peine pour autant, mais pour ce qui est de l’amour, je crois que je suis résolument hétérosexuelle._ Ah ? » fis-je bêtement._ Cela ne nous empêche pas de jouer parfois comme on l’a fait hier._ Mmouais… à condition que je ne me méprenne pas sur tes intentions… Elle ne répondit rien, se contentant de compatir d’un vague clignement de paupières. C’était pour moi comme une douche froide. Je m’étais fait un film et c’était la fin de la séance. Good bye, Elise. Retour à la case départ avec en plus un gros sentiment de mal-être. Elle se rapprocha encore de moi, et déposa sur mon front un tendre baiser. Mais purement amical… Je ne réagis pas, restant comme inerte. Elle se recula, attendant visiblement que je dise quelque chose. Elle finit par rompre ce lourd silence._ Allez, arrête de faire la tronche ! Je ne bronchai toujours pas, éludant même à présent son regard redevenu malicieux. Elle continua:_ Tu vas pas me dire que t’es tombée amoureuse de moi suite à ce qu’on a fait hier soir… Là, j’éclatai, d’un ton plutôt agressif, levant vers elle des yeux coléreux:_ Ben, tu vois, moi, j’ai pas trop l’habitude d’avoir des relations sexuelles avec des gens pour qui je ne ressens rien…_ Ah, voilà, les grands mots. Des relations sexuelles… Quelques malheureuses caresses…_ Oui, ben oui… T’as raison… Quelques malheureuses caresses, sur tout le corps, et même dans le corps, avec les doigts, et avec la langue… C’est ça que t’appelles quelques malheureuses caresses ?_ Bon, peut-être mais en plus tu sais très bien que je ne ressens pas rien pour toi._ Quoi ?_ Tu as dit que tu pensais que je ne ressentais rien pour toi, et tu sais que c’est faux… Je retournai dans mon mutisme et détournai de nouveau les yeux. Elle continua:_ Je t’ai dit que ce que je ressentais pour toi était plus que de l’amitié, mais ce n’est pas non plus de l’amour._ …_ Elise !_ …_ Regarde-moi ! Je ne bougeai pas d’un poil._ Arrête de faire la gueule, et essaie de me comprendre. J’essayais mais n’y parvenais pas du tout._ Oh, et puis merde ! Tu boudes ? Très bien, boude. Moi, il faut que je rappelle Laurence. Oui, je boudais. Je lui en voulais de m’être imaginé des tas de choses à son propos. Elle reprit le téléphone, et appuya sur la touche de rappel. Elle attendit sans plus vraiment faire attention à moi. Elle se mit soudain à parler:_ Allô ? Laurence ? … Oui, c’est Julia. … Oui, ça y est, je viens de rentrer. … Alors c’est quoi cette histoire ? … Oui … Oui, elle m’a dit ça. … Non. … Ben, tu sais quoi ? Elle boude, là. … Oui, elle boude. … J’écoutais bien sûr, malgré moi. Je vis qu’elle prenait un malin plaisir à me regarder avec un grand sourire en disant ça._ Bon, alors, c’est quoi ce plan ? … Allez, raconte. S’en suivit un vaste blanc; Julia ne parlait plus, écoutant apparemment son amie parler. Ce moment me parut pourtant très long, et je finis par lever les yeux vers Julia, qui avait gardé les siens fixés sur moi, et me fis un grand sourire plein de malice dès qu’elle s’aperçut que j’allais la regarder. J’évitai immédiatement son regard, rebaissant les yeux. Elle se remit à parler:_ Et alors ? Comment est-il ? Il est beau ? De nouveau un silence. Elle écoutait. Je ne faisais plus attention à elle. J’avais envie d’une cigarette. Elle parla, à nouveau. Je ne l’écoutais plus. Je cherchai mon paquet de clopes. Il était vide. Je fouillai dans le salon, à la recherche d’une cigarette. Je n’en trouvai pas. Tous les paquets qui traînaient étaient désespérément vides. Et là, j’entendis le bruit (très énervant quand on cherche une cigarette) d’un briquet. Je tournai la tête vers Julia. Elle dardait vers moi des yeux et un sourire provocants, tout en tirant avec triomphe sur une cigarette qu’elle venait de s’allumer. Je lui lançai des yeux tout noirs. Elle recracha la fumée de sa cigarette dans ma direction tout en répondant à Laurence:_ Mais non, bien sûr, vous venez tous les deux. … Mais non, ça ne pose aucun problème. … J’enrageai en silence, mais me rassis finalement, évitant de nouveau soigneusement le regard de Julia._ Mais non, pourquoi veux-tu qu’on soit surpris ? … Bon, allez, arrête de dire des sottises, et à tout à l’heure, vous venez tous les deux, à partir de huit heures. … Oui. … Oui, allez, bisous. Elle raccrocha, puis sans me regarder dit:_ Hmmm… Qu’est-ce que je savoure cette cigarette ! Bien que j’eus très envie de rire, et en plus très envie de lui taxer une clope, je restai dans mon mutisme, et ne bronchai toujours pas. Elle reprit:_ Bon, alors j’ai une amie qui a peur de me présenter son mec, et l’autre qui boude… Elle se rapprocha de moi et me regarda:_ Tu boudes toujours ? J’eus encore envie de rire, mais parvins à me contenir. Par contre, sentant de plus près l’odeur de sa cigarette, je ne pus contenir mon envie de fumer. Je levai les yeux vers elle et lui demandai, adoptant un ton très froid, très distant et très digne:_ Serait-il possible que tu offres une cigarette à une fille avec qui tu as couché hier soir, même si tu ne ressens rien pour elle ? Elle explosa de rire en entendant ma question, puis, se reprenant, finit par me dire sur le même ton:_ Je n’offre pas de cigarette aux filles qui boudent ! Je parvins encore à ne pas sourire, et lui répondis:_ J’arrêterai de bouder quand tu me donneras une cigarette._ Et moi, je te donnerai une cigarette quand tu arrêteras de bouder. Je réfléchis une seconde, puis repris:_ Je ne boude plus… Elle me tendit la cigarette qu’elle avait déjà préparée._ Merci. » lui dis-je et j’ajoutai: « Mais je ne te pardonne pas pour autant. Elle se marra à nouveau, puis me demanda:_ Bon, et que faut-il donc que je fasse pour me faire pardonner ?_ Je ne sais pas… » lui répondis-je avec finalement à mon tour un sourire provocateur. Elle hésita un court instant, puis fit en réponse doucement glisser le long de ses épaules le peignoir qu’elle portait toujours. Il tomba soudain sur le sol, laissant apparaître son corps sculptural. Ses seins magnifiques vibraient à chacun de ses mouvements, presque juste à hauteur de mon visage. Elle dénoua aussi la serviette qui retenait ses cheveux. Quelques boucles humides vinrent rebondir et s’échouer sur sa poitrine, la cachant ainsi légèrement. Elle était splendide, dans cette nudité absolue. Je parcourus tout son corps du regard, de ses longues jambes à ses yeux toujours flamboyants. Elle s’approcha. J’aurais pu la toucher, elle n’était qu’à quelques centimètres de moi. Mais je ne bougeai pas. Elle s’approcha encore et se pencha en avant, s’appuyant de ses deux mains sur le dossier du canapé. Elle se pencha jusqu’à venir m’embrasser sur le front. Quelques mèches de ses cheveux vinrent frôler mes joues. Elle se redressa en s’avançant encore un peu et l’un de ses seins vint appuyer doucement contre mon menton. Je le laissai remonter quelque peu, puis d’un mouvement de la tête, j’écartai les deux ou trois boucles de cheveux qui s’y trouvaient collées. Je l’embrassai ensuite, doucement, tendrement. Je posai mes lèvres autour de son mamelon, et caressai son téton de ma langue. Je fermai les yeux. Elle se laissa faire. Ni son corps ni le mien ne bougèrent plus, excepté ma langue, et nos poitrines qui se soulevaient au rythme de nos respirations qui s’accéléraient insensiblement. Je sentais dans ma bouche se tendre et durcir la pointe de ce sein, et dans mon soutien-gorge les miens faire de même. Je rouvris les yeux, mais ne pus rien voir d’autre que le haut de sa poitrine, entourée de longues mèches de cheveux qui tombaient. Sans cesser de l’embrasser, je posai mes mains sur sa taille. Le contact de mes doigts plutôt froids sur son corps chaud la fit frémir un instant. Je fis glisser doucement mes mains jusqu’à ses hanches, jusqu’à toucher ses fesses, puis tout aussi doucement les fis remonter le long de ses côtes. J’effleurai sa poitrine. Et mes mains montèrent encore autour des courbes si prononcées de ses seins. Ma main gauche vint bientôt toucher mes lèvres toujours serrées autour de son mamelon, et la droite se referma sur son autre sein. Je massai et caressai alors doucement mais fermement sa poitrine, comme j’aimais qu’on me le fasse. Je sentis soudain sa main gauche se poser près de mon épaule, et quelques doigts parcoururent un instant la peau de mon cou, me faisant frissonner. Sa main descendit bientôt chercher un passage sous mon chemisier, et glissa doucement le long de la bretelle de mon soutien-gorge, pour finalement venir à travers celui-ci caresser mon sein droit. De très légères caresses extrêmement excitantes, ses doigts frôlant simplement le tissu autour de mon mamelon. Mais elle abandonna bientôt cette position sans doute très inconfortable qu’elle tenait depuis maintenant plusieurs minutes, pour venir s’agenouiller entre mes jambes au pied du canapé. Elle ne disait toujours rien, moi non plus. Je la regardai venir se positionner à mes pieds. Elle était vraiment très belle. À son tour, elle posa ses mains sur ma taille, et après quelques caresses, les glissa sous mon chemisier, remontant le long de mon ventre. Elle retrouva bien vite mes seins, et recommença de les peloter avec tendresse. Tout en savourant ces agréables caresses, je déboutonnai mon chemisier afin de lui faciliter la tâche. Ses mains passèrent bientôt derrière mon dos et elle dégrafa mon soutien-gorge. Elle ne l’enleva pas cependant mais put glisser ses mains tout contre ma poitrine. Elle m’embrassa langoureusement, tout en reprenant ses caresses. Et puis ses mains s’attaquèrent à mon jean. Elle déboutonna lentement, très lentement, un à un les boutons. Tout cela commençait à m’exciter redoutablement, mais à cet instant, cassant tout le charme, la sonnette retentit, violente et froide. J’eus l’impression d’être tirée d’un rêve, d’un doux et agréable rêve sensuel. Julia hésita. J’eus l’impression qu’elle aussi éprouvait le même genre de sensation. Toute la magie qu’elle était parvenue à tisser s’effondrait soudain à cause de cette affreuse sonnette. Elle me regarda, m’embrassa de nouveau, rapidement, et me dit:_ Ne bouge pas, je vais vite envoyer bouler ces braves empêcheurs de tourner en rond… J’attendis donc, sans bouger, la regardant aller toujours nue jusqu’à la porte d’entrée. Elle ne l’ouvrit pas mais demanda d’une voix forte:_ Oui ? Qui est-ce ? J’entendis une voix s’élever derrière cette porte, mais d’où j’étais, je ne parvins pas à comprendre un mot. Mais je fus sidérée de voir que Julia s’apprêtait à ouvrir la porte, sans même apparemment prendre la peine de se rhabiller. Mais que faisait-elle ? Elle était folle ! Et moi, j’étais aussi presque à poil… Elle tourna le verrou, un premier tour…_ Eh, mais t’es tombée sur la tête, tu vas pas ouvrir, quand même… T’es à poil, je te signale ! » lui criai-je. Elle me répondit, sans se retourner, quelque chose que je ne compris pas. Je savais qu’elle n’était pas très pudique, mais quand même, là, elle exagérait. Le verrou tourna une seconde fois. Je n’avais qu’une idée en tête, me renfroquer au mieux le plus vite possible. J’aurais dû courir dans la salle de bains, ou m’enfermer dans les chiottes, mais je n’y pensai pas, bêtement. Elle ouvrit la porte, en disant:_ Salut… Entrez. Oh merde, ils étaient plusieurs en plus. Ça y est, j’étais parvenue à ragrafer mon soutien-gorge. Elle se recula, pour laisser entrer ces personnes. Oh, et quelle idée d’avoir autant de boutons sur ces satanées fringues… Une voix féminine s’éleva, teintée de rire:_ A mon avis, à voir ta tenue, on te dérange…_ Mais, non, pas du tout, je sortais simplement de la douche. » mentit ma copine en retour. J’entendis aussi une voix de mec:_ Ouah, putain, ce corps divin !!! Génial, c’était la totale ! Julia se retourna, revenant vers moi, suivie de ses deux invités. Elle prit un air plus ou moins déconfit et fataliste, tout en haussant les épaules à mon attention. J’avais presque terminé de reboutonner mon chemisier, mais pas mon jean. J’attrapai un coussin, que je posai sur le haut de mes cuisses, pour cacher que mon pantalon était ouvert. Je levai ensuite les yeux et reconnus la jeune femme, c’était Marie, l’une de ses amies que j’avais déjà rencontrée, et je devinai que le gars était son copain. Celui-ci ne m’avait pas encore remarqué, et dit à Julia:_ On a bien fait de venir en avance, sinon on aurait peut-être raté ta sortie de douche… Mais Marie, qui m’avait repéré et salué d’un sourire, lui répondit:_ Non, je crois surtout qu’on a cassé un super coup… Le visage commençait de me brûler, je me sentais rougir au fur et à mesure. Le mec me remarqua alors:_ Ah, salut, je ne t’avais pas vue. Je restai silencieuse et ne saluai encore que d’un sourire. Julia, s’avançant toujours dans ma direction, répondit à Marie qui la suivait, d’un petit air faussement naïf et innocent:_ Ah bon ? Mais pourquoi tu dis ça ? Mais celle-ci, en guise de réponse, lui mit la main aux fesses. Julia sursauta, et se cambra soudain en laissant échapper un tout petit gémissement. Le mec et moi-même restâmes totalement bloqués, les yeux fixés sur les deux amies. Marie retira sa main, et la garda levée devant elle, et dit:_ Il y a des indices qui ne trompent pas… Julia se pencha vers moi et me murmura:_ Désolée… Je finirai de me faire pardonner ce soir… Elle ramassa ensuite son peignoir, un sourire aux lèvres, tandis que Marie continuait:_ Tu es bien trop mouillée de l’intérieur et pas assez de l’extérieur pour une simple sortie de douche; et puis ton peignoir traînait là, par terre; et puis le chemisier d’Elise est mal reboutonné… Je sursautai lorsqu’elle eut dit ça, et baissai immédiatement les yeux. J’avais effectivement décalé les boutons, et ça bâillait affreusement juste à hauteur du bas de mes seins. Elle continuait encore:_ Remarque, au moins, elle, elle a eu la décence de se rhabiller, enfin d’essayer en tout cas… Je rougis encore, mais elle était intarissable:_ Et puis, j’aimerais bien qu’elle retire ce coussin, d’ailleurs, pour voir ce qu’il y a en-dessous. Et puis en plus il y a ce gode qui traîne, là, sur le canapé… Et puis… Julia, qui venait de repasser son peignoir, se marrait carrément et l’interrompit:_ Bon, ça va, Sherlock, arrête, ça suffit… Tout le monde a bien compris._ De toute façon, vous faîtes ce que vous voulez de vos culs !_ Exactement. Julia se dirigea vers le jeune homme, qui paraissait comme tétanisé: il était tout raide, la tête légèrement penchée en avant, les yeux grand ouverts, interloqués, fixés sur elle, c’était tout juste s’il ne bavait pas._ Eh ben, Tonio, remets-toi ! T’as jamais vu un cul ?_ Je crois surtout qu’il ne pensait pas que deux filles pouvaient faire l’amour ailleurs que dans un film X. » répondit Marie._ Je sais pas si c’est le meilleur moment pour les présentations, » reprit Julia, « mais bon, voilà: Elise, Antoine, le copain de Marie. Antoine, Elise, une amie à moi. »_ Oui, une amie très proche, dirons-nous même. » intervint Marie, un sourire aux lèvres. Le mec ne bronchait toujours pas, ni moi non plus d’ailleurs. Marie le regarda longuement, et s’adressa finalement à Julia, d’un air dépité:_ Dis-donc, tu as des glaçons pour mettre dans son slip ? Ca va peut-être le calmer un peu… Antoine parvint tout doucement à se reprendre et répondit doucement se tournant vers Marie:_ Non, ça va, c’est bon. Disons que je ne m’attendais pas à ça… Profitant de ce que personne ne fît plus attention à moi, je reboutonnai discrètement les derniers boutons de mon jean. Marie vint finalement s’asseoir à côté de moi, dans le canapé. Antoine se posa dans un fauteuil, face à nous. Julia s’était dirigée vers la cuisine; elle en revint bientôt rapportant quatre tasses._ J’ai préparé une cafetière. » dit-elle._ Moi je préfèrerais un thé. » répondit Marie._ T’es pas chiante, toi, tu déboules un quart d’heure en avance et en plus tu te permets de réclamer…_ Eh, c’est bon, je suis désolée si on a cassé votre coup, les filles, mais vous n’aviez qu’à pas répondre._ Ca c’est bien vrai ! » intervins-je alors. Marie avait attrapé le gode et jouait machinalement avec, le tournant et le retournant dans ses mains, puis le branlant doucement, le tout en continuant de discuter avec Julia. Son mec la regardait de nouveau avec des billes démesurées, puis ses yeux se posaient sur moi, puis sur Julia. Je crois qu’il était en train de se demander s’il était dans une maison de fous ou non. Moi, tout ce que j’étais en train de me dire, c’était que ma journée se serait sans doute beaucoup mieux passée si j’avais arraché la sonnette hier soir en me couchant; entre le vieux voisin grincheux et vicelard de ce matin, Espéranza, la femme de « ménajch » complètement allumée, et les amis de Julia qui débarquaient en avance, j’étais moi aussi en train de devenir dingue. J’étais dégoûtée. Ça avait si bien commencé… Julia m’avait tant excitée avec ses caresses… J’avais envie de me venger. Je leur en voulais. J’en voulais à Marie de s’être pointée et d’avoir sonné, comme j’en voulais à Julia de leur avoir ouvert. Il fallait que je me venge des deux. Je réfléchis à ce que je pouvais bien faire. J’eus une idée. Stupide, mais tant pis. Ça allait faire chier Marie, et sans doute aussi Julia, c’était ce qui comptait. Je me levai, et sans un mot, devant les yeux interrogatifs des trois personnes qui m’entouraient, j’allai jusqu’au fauteuil où siégeait Antoine, et je m’accroupis et m’agenouillai à ses pieds. Il hallucinait toujours, mais ne se rebiffa pas lorsque je posai mes deux mains sur son fute à hauteur de son sexe. Il se laissa faire. Je le caressai un instant à travers le tissu. Les deux filles avaient cessé de parler, et m’observaient, incrédules. Je le sentais durcir, doucement. J’entrepris de défaire sa ceinture. Marie parvint quand même à dire quelque chose:_ Ca va, je ne te dérange pas, au moins ?_ Non, c’est bon. » lui répondis-je en ouvrant le jean, et en y plongeant une main. J’en ressortis un sexe presque dur, déjà bien gonflé. Je le masturbai encore un instant, et lorsqu’il fut bien tendu, je m’avançai un peu plus, ouvris bien grand la bouche, et y plongeai cet organe, au grand bonheur de son propriétaire. Marie fulminait, sans pour autant m’en empêcher, et Julia aussi avait l’air d’être assez mal à l’aise. J’étais contente, c’était tout ce que j’avais souhaité. La voix de Julia me sortit de ma rêverie:_ Eh bien, tu ne bois pas ton café, Elise ? Je sortis des méandres délirants de mon imagination._ Euh… Si. J’étais en train de réfléchir…_ Ah bon ? A quoi ?_ Non, rien. Tu as une cigarette, s’il te plaît ?_ Oui, tiens._ Merci. Je l’allumai, et tirai quelques lattes. Julia termina son café, et écrasa la cigarette qu’elle s’était allumée quelques minutes auparavant, puis nous dit:_ Bon, je vais m’habiller et on y va ?_ Okay. » lui répondis-je. Je terminai à mon tour mon café en l’attendant, discutant de la pluie et du beau temps avec Marie et Antoine, puis nous partîmes pour le centre commercial. Il était dix-sept heures quarante. Il nous fallait nous dépêcher. Je crois que ses premiers invités devaient arriver à dix-neuf heures.