Ils l’avaient annoncé, la neige tombe à gros flocons. Serrant mon mug de chocolat chaud entre mes paumes, je regarde avec émerveillement la ville se couvrir d’un épais manteau blanc. Les étoiles se cachent derrière les nuages et la brume qui enveloppent la cité, tout semble calfeutré, ouaté. Plus une seule voiture ne se risque sur le sol glissant à cette heure tardive, les habitants se sont tous glissés sous la couette, demain sera une journée cauchemardesque pour les transports. Je souris à mon reflet dans la grande vitre de mon appartement surchauffé, la neige a toujours eu pour moi cet étrange effet. Je me rappelle, enfant, avoir passé une partie de mes nuits à la regarder tomber, à imaginer les bonshommes de neige que je pourrais faire le lendemain… La neige excite les enfants, dit-on, je dois avoir une âme d’enfant, du moins à ce sujet.De l’autre côté de ma rue, le gigantesque immeuble est plongé dans le noir, pas une seule lumière allumée ! C’est même à se demander si le bâtiment n’a pas été privé d’électricité, ou peut-être, encore plus fou, que la ville a été évacuée et que je reste l’unique habitante. Je ris, tournant mon regard vers mon réveil qui affiche nonchalamment 1 h 30 du matin. Ils se fichent de l’heure qu’il est, les réveils… ne devraient-ils pas hurler qu’il est grand temps d’aller au lit ? Non, ils sont ainsi, ils respectent la vie des gens. Pourtant j’ai bien essayé, mais le sommeil n’est jamais venu, le marchand de sable est probablement à court de sable. Maintenant que j’y songe, il travaille certainement avec les équipes de la municipalité à sabler nos rues. Voilà qui pourrait expliquer rationnellement pourquoi je ne dors jamais pendant les nuits de neige.Pour tromper mon ennui, j’ai allumé mon ordinateur, je suis allée sur ce site d’histoires et me suis plongée dans ce vieux fantasme qui me ronge depuis trop longtemps. C’est toujours les mêmes scénarios, où l’héroïne, par choix ou par contrainte, se retrouve à un moment ou un autre, nue dans un lieu public. Les textes sont souvent mal bâtis, le français plus qu’approximatif, mais parfois il y a de bonnes surprises. Quel que soit le récit ou sa qualité, il touche une corde très sensible et je finis invariablement par me caresser jusqu’à l’orgasme, orgasme en général si peu satisfaisant. Je suis folle, je le sais, et non… je n’en ai toujours pas parlé à un psy ! Ce soir aura été fidèle à ma routine, je suis allée ensuite me faire un bon chocolat que je déguste devant le féérique spectacle de la neige qui tombe sur la ville déserte.Je suis une exhibitionniste cérébrale. Mille fois dans ma tête j’ai arpenté les rues, nue, ou presque. J’ai fait tourner la tête des mâles et me suis amusée des regards courroucés de leurs épouses. Mille fois, je suis sortie sans culotte, j’ai fait les courses, toute nue sous un manteau. Mille fois, je me suis déshabillée dans mon bureau, les volets fermés, pour me caresser. Oui, tout s’est passé dans ma tête et ne se passera jamais dans la vraie vie… non, car les filles bien ne font pas ça, et puis c’est dangereux avec tous les malades qui traînent ! J’en ai à la pelle de bonnes raisons. Je ne sais pas si je me mens ou si je me crois vraiment, c’est juste un constat : je ne peux pas le faire.« Oui mais ce soir est différent », me susurre la petite voix : « la ville est déserte, peut-être même évacuée ». Je la connais bien la petite voix, elle peut être persuasive, mais elle sait aussi que je vais lui dire non, que ma raison l’emporte toujours sur mes folies. Et pourtant, rien que d’y penser, une douce chaleur envahit mon bas-ventre, encore. Mes petits tétons se mettent à pointer, déformant honteusement ma chemise de nuit de coton. Je devrais aller dormir et ignorer l’appel de mon corps avant de perdre le contrôle. Non, une dernière histoire et en suite… au lit ! Mais la petite voix insiste : « C’est ce soir ou jamais, il neige si rarement ici ». Je ne veux pas l’écouter, je ne peux pas. Ma chemise de nuit passe par-dessus ma tête et tombe en boule à mes pieds. J’arpente ma chambre de long en large, nue comme un ver, à l’exception des grosses chaussettes de laine que j’affectionne de porter en hiver.Mon ordinateur est toujours allumé, abandonné sur mon lit. L’histoire est là où je l’ai laissée lorsque, n’en pouvant plus, j’ai joui sous les caresses de mes doigts. Juste une dernière histoire, quelques caresses… je pourrai jouir encore, et dormir peut-être lorsque mon corps et ma tête auront fait taire ces tentations honteuses. « Pourquoi ne pas lire cette histoire en tenue ? » me suggère la petite voix, « ça n’engage à rien après tout ». En tenue ? Pourquoi pas ? Non, je ne veux pas, il est tard… je dois dormir. Me voilà pourtant dans mon dressing. Mon long manteau de laine si élégant est là. Je l’adore ce manteau, il a du style… Mille fois, je me suis imaginée nue dedans à la vue et la barbe de tous les badauds. J’avais eu le coup de foudre pour ce manteau l’année dernière et je l’ai pourtant porté si peu. Je le passe et frissonne au contact de la doublure en satin, douce et froide, sur ma peau. Je me poste devant le miroir et pouffe de rire. Elle a une drôle de touche la brunette avec son manteau noir qui descend au-dessus du genou et ses splendides chaussettes de laine écrues. Les chaussettes enlevées, ça ne colle toujours pas. Quelle femme en hiver se promènerait les jambes nues ? « Mets donc des bas », dit la petite voix qui a définitivement réponse à tout cette nuit. Je fais mine de réfléchir, faisant la moue devant le miroir : dim-up ou bas et porte-jarretelles ? Quitte à se déguiser, autant sortir le grand jeu, ce seront les bas. Ce n’est pas si facile à installer un porte-jarretelles, ce n’est pas comme si j’en mettais tous les jours, mais le résultat en valait la chandelle, me dis-je en observant mon reflet indécent… la brunette ridicule est devenue une séductrice implacable.Maintenant le cruel dilemme des chaussures : que devrais-je mettre si je voulais marcher dans la neige sans ruiner le style ? « Tes bottines fourrées, évidemment ! » répond la petite voix. Évidemment ! Je complète l’ensemble d’une écharpe fauve et observe cette coquine de brunette dans le miroir. Je tourne sur moi-même et me scrute sous tous les angles. Manteau fermé, je suis la femme élégante et bien élevée que tout le monde connaît. Manteau ouvert, je suis l’exhibitionniste qui se cache sous une épaisse couche de bienséance. Et bien chère petite voix, me voici « en tenue », dis-je en faisant un clin d’œil à mon reflet. « Pourquoi ne pas sortir alors maintenant que tu es prête ? » continue la petite voix. Certainement pas !De retour dans ma chambre je m’approche de la grande vitre : la neige tombe avec encore plus d’intensité. Les voitures garées en bas ressemblent à de gros moutons blancs à la queue leu leu. La rue est toujours aussi déserte, éclairée par la lumière blafarde d’un lampadaire trop haut. « Ouvre donc ton manteau », commande la petite voix, « qui pourrait te voir ? »Bouton après bouton, les pans de mon manteau s’entrouvrent. Je frissonne en observant, un peu impressionnée, mon reflet dans la vitre de ma fenêtre. Ma main droite se pose sur mon petit sein blanc, joue avec son téton dur et dressé, comme si j’avais besoin de me persuader de ma nudité, de m’en imprégner. Ma main gauche se pose sur la vitre froide, mon front à son tour l’y rejoint. Je regarde dans le vague la ville qui blanchit sous mes yeux tandis que ma main droite, quittant mon sein, descend le long de mon ventre jusqu’à rejoindre la toison courte et clairsemée qui recouvre mon sexe. Mon majeur glisse le long de ma fente déjà humide, s’attarde un instant sur un clitoris qui est sorti de sa cachette et s’enfonce lentement en moi, m’arrachant un long soupir empreint de désir.L’immeuble qui me fait face est toujours plongé dans le noir, je me demande si quelqu’un pourrait néanmoins être réveillé comme moi et m’apercevoir dans ce moment d’intimité. Mon cœur bat la chamade. Je me caresse avec plus de conviction, étouffant mes gémissements. Jamais je n’ai osé pareille folie, jamais je ne me suis sentie aussi désirable, aussi excitée. Je joue à cache-cache avec mon plaisir, alternant caresses appuyées et pénétrations. Sur le point de jouir, je plaque mon corps brûlant sur la vitre gelée… le plaisir retombe instantanément sous le choc. « Tu devrais sortir te rafraîchir les idées », susurre la petite voix presque amusée par la torture que je m’inflige. Elle a raison, une petite marche, dehors, pas très longtemps, me fera le plus grand bien. Personne ne pourra deviner, de toute façon il n’y a personne.J’attrape mon trousseau de clés et mon téléphone, les fourre dans ma poche et, tout doucement, ouvre la lourde porte d’entrée puis la referme derrière moi. Sans allumer, j’entreprends de descendre, à pas de loup, les six étages par les escaliers. À chaque pas, les pans de mon manteau s’ouvrent, révélant ma nudité à un voyeur que je ne fais qu’imaginer. Chaque craquement de marche me fait sursauter, je crains de réveiller un voisin ou d’attirer l’attention d’un insomniaque. Qui sait si je suis la seule éveillée ? Chaque palier est une épreuve supplémentaire dans ma descente jusqu’au hall d’entrée. Enfin, je pose un pied au rez-de-chaussée, poussant un soupir de soulagement. Je pousse la porte donnant sur le sas des boîtes aux lettres et étouffe un cri lorsque la lumière automatique se déclenche. Le grand miroir qui recouvre le mur opposé me renvoie mon image. J’ai le rose aux joues, les pans de mon manteau sont retombés et rien ne laisse imaginer ce que je suis en train de faire. D’ailleurs, je suis probablement en train de rêver, ce qui se passe n’est probablement pas possible. Je jette un regard anxieux au travers de la porte vitrée donnant sur la rue, puis fixe à nouveau mon reflet me décochant un sourire complice. Je fouille dans ma poche et attrape mon téléphone dont je pointe l’objectif sur mon reflet. « Click », une photo sage. Après un rapide coup d’œil sur la rue toujours déserte, je place une main sur ma hanche nue, ouvrant largement le pan de mon manteau. « Click », une photo de la femme fatale, son sein gauche et son sexe bel et bien visible.Ayant rangé mon téléphone, je referme mon manteau et pousse la porte donnant sur la rue. La tempête de neige fait rage, le vent semble s’être levé. J’ai les cheveux dans la figure et l’air gelé s’engouffre sous mon manteau, m’embrassant dans toute ma nudité. Je passe mon épaisse capuche par-dessus ma tête et commence à marcher sans trop réfléchir, concentrée sur mes émotions, sur le fait que je suis vraiment en train de vivre cette expérience unique, excitante. Qu’est-ce que tu es en train de me faire faire « petite voix » ? J’ai bien vite froid. Je progresse dans une neige fraîche et épaisse que manifestement je suis la première à fouler. Je me résous à faire le tour du pâté de maisons et à rentrer, sans quoi je risque une pneumonie ou que sais-je encore. Je passe, après le premier coin de l’immeuble, sous ma fenêtre, essayant de deviner ce que l’on peut y voir de la rue, mais manifestement avec cette tempête de neige, absolument rien. J’en suis presque déçue. Au second coin de rue, j’observe attentivement la ruelle. Toujours ce calme… toujours ce bruit feutré, et me voici abritée du vent. « Ouvre ton manteau, à quoi bon sinon ! » chuchote la petite voix. Je regarde anxieusement autour de moi et défais à nouveau les boutons. L’air froid s’engouffre et embrasse mes seins dressés et mon ventre couvert de chair de poule. Les pans de mon manteau s’ouvrent et se referment à mesure que j’avance. Mon excitation se fait plus présente, mon bas-ventre chauffe et mouille, je sens mes joues rosir sous ma capuche. J’ai envie de hurler que je suis nue, mais je n’ose pas, je me sens tellement bien malgré le froid qui me mord.Trop confiante, je m’engage d’un pas décidé après le 3e coin de rue et me fais surprendre par une bourrasque… Coquin de vent ! Je n’ai pas le temps de réagir que mon manteau se lève et s’ouvre, offrant à la vue de la ville ma nudité totale. Je cris de surprise, et réagis après quelques secondes en me retournant pour ramener le manteau sur moi. Remise de ma surprise, je pouffe de rire et peine à retrouver mon calme. Cette fois, les mains dans mes poches pour maintenir mon vêtement en place, je reprends ma progression dans la dernière ligne droite. Je m’apprête à tourner sur la façade de la porte d’entrée de l’immeuble lorsque ce bip-bip significatif se fait entendre. Ma petite voiture me fait signe. « Shhhh, tais-toi donc ! » dis-je en riant. Elle ne ressemble plus qu’à un tas de neige parmi d’autres.« Il te faut finir en beauté cette extraordinaire aventure », suggère encore la petite voix. Je rougis en secouant la tête… Non, je ne peux pas faire ça, c’est trop risqué. La petite voix insiste et me voilà assise dans ma voiture gelée. Les vitres sont opaques, couvertes de neige. Je suis comme dans une petite cabine isolée, perdue dans la neige. Je pose mon manteau sur la banquette arrière et m’installe dessus, une jambe posée sur chacun des dossiers des sièges avant. Il fait un froid polaire mais je suis bouillante. Je ferme les yeux, réalisant ce que je suis en train de faire. Je glousse nerveusement en les rouvrant. Ma main glisse entre mes cuisses m’arrachant un petit cri de surprise tant elle est froide. Je sais d’ores et déjà qu’il ne me faut plus grand-chose pour atteindre l’extase. J’ai peur aussi, je suis tellement exposée, et en même temps tellement bien cachée. Doucement, tout doucement, savourant chaque seconde de cet acte fou et interdit, je me caresse, marque une pause lorsque je monte trop et reprends aussitôt. Mes seins me font presque mal lorsque je les touche. Mes joues brûlent de désir, ma peau transpire légèrement malgré le froid, je suis aux anges lorsque mes doigts à peine réchauffés commencent à me fouiller. Je me fais l’amour, je me doigte dans ma voiture, quelle inconscience, mais je m’en fous, j’irai jusqu’au bout.Un rire, je me fige, totalement aux aguets, le cœur battant. Qui est-ce ? Un autre rire, une voix différente cette fois. Il y a des gens dans la rue ! Terrifiée, je me recroqueville sur moi-même, minimisant mes mouvements pour ne pas attirer l’attention… une voiture qui bouge en pleine nuit, ce serait trop suspect ! Ils semblent deux au moins, un homme et une femme d’après leurs voix. Ils marchent et courent dans la neige en riant. Qu’est-ce qu’ils font là, dehors, ces deux idiots ? Soudain, deux mains gantées sur mon pare-brise me font sursauter… Les deux mains attrapent de la neige, découvrant une partie de la vitre… une bataille de boules de neige… voilà ce qu’ils font ! Derrière moi, une paire de gants différents supprime encore de la neige sur le haillon… Pourvu qu’ils partent vite !— Arrête ! crie-t-elle en riant de plus belle.— Défends-toi ! dit-il d’un ton amusé.Je suis immobile, je peux entendre mon cœur battre dans mes oreilles. Tout doucement, je passe ma tête par-dessus le siège arrière. Je soupire de soulagement en voyant le couple, couvert de poudreuse, s’éloigner en ramassant de la neige sur les voitures garées le long de leur chemin. J’attends quelques minutes sans bouger, puis repasse mon manteau rapidement avant de sortir de la voiture et de me précipiter à l’intérieur de mon immeuble. Je me regarde dans le miroir, à nouveau, et étouffe un rire. Mais qu’est-ce que j’ai fait ? Les sens encore en émoi, je quitte le hall et appelle l’ascenseur qui prend son temps pour descendre. J’entre dans la cabine, la porte se referme. Je m’apprête à presser sur le bouton « 6 », mais une nouvelle lubie me prend… « Fais-le ! » dit la petite voix, « ce soir, tout est permis. »Je souris, le rose aux joues, lorsque mon manteau glisse à mes pieds. Je frissonne, probablement pas à cause du froid, d’ailleurs. Le cœur battant, je presse le bouton d’ouverture des portes, ressors de la cabine et, de l’extérieur, presse le bouton « 6 », évitant de justesse de me faire mordre par les portes. La cabine se met en branle, emportant mon manteau… mes clés. Je regarde l’escalier, terrifiée, surexcitée, et entreprends l’ascension. Mon allure est mesurée, je monte aussi vite que je le peux mais je tiens à rester silencieuse. Mes seins libres de se mouvoir sont un rappel constant de ma nudité… Une main sur la rampe, l’autre entre mes cuisses, je continue ma progression. Au troisième étage, j’entends les portes de l’ascenseur plus haut, s’ouvrir et se refermer. Courage ! j’y suis presque. Je suis littéralement à ma limite, le souffle court, les joues en feu et le sexe inondé, lorsque je parviens enfin au 6e. Je rouvre l’ascenseur et récupère mon précieux manteau et mes clés que j’introduis avec une main tremblante dans la serrure.Soudainement, le moteur de l’ascenseur se remet en route, quelqu’un l’a appelé. Je m’agite sur la serrure mais elle ne s’ouvre pas… dans ma précipitation, j’ai introduit la mauvaise clé. La panique, l’émotion, tout se mêle et mon corps cède telle la digue devant le raz de marée. Je m’effondre devant ma porte, en proie à un orgasme d’une volupté que je n’avais jamais connue jusque-là. Je me mords pour ne pas hurler. L’ascenseur est en bas et remonte. Je me bats avec la porte qui finalement se laisse faire. Je me jette à l’intérieur et claque la porte derrière moi. Je l’ai fait… Je l’ai fait ! Je ris de plaisir, de joie, évacuant toute l’énergie nerveuse de la demi-heure passée.« Je te l’avais dit ! » susurre la petite voix, fière et amusée. Et tu avais raison « petite voix », j’aurais dû t’écouter il y a longtemps.À suivre… peut-être.