C’était l’annĂ©e de mes dix-huit ans. Nous devions partir en car dans le LubĂ©ron. Au programme canyoning, rafting, kayak, sympa quoi. Et puis entre jeunes… un camp de vacances ça pouvait ĂŞtre cool.Le problème c’est que moi j’ai jamais Ă©tĂ© très sociable, et mĂŞme tout le contraire, la vie en groupe m’indispose, c’est le moins que l’on puisse dire. De toute façon mon rang de princesse m’interdit de me mĂ©langer aux masses laborieuses !Je me faisais donc vraiment chier. Les autres s’amusaient, soi-disant, ils faisaient la « teuf », ils s’éclataient, bien leur en prenne.Ce jour lĂ ils Ă©taient tous partis en excursion avec les animateurs. Et moi j’étais restĂ©e seule au camp de base avec pour toute compagnie Pinault, le cuistot, un gros lourdaud, ainsi qu’un certain Mathias, animateur de son Ă©tat, scribouillard Ă ses heures. C’était lui qui s’occupait de toute la paperasserie. Pas franchement le beau mec. Grand et squelettique et affublĂ© d’une paire de binocles, un panachĂ© de Grognon, Simplet et Dormeur avec une pointe d’Atchoum et une tĂŞte de sorcière, hermĂ©tique comme une porte de prison.Me voici donc Ă cĂ´tĂ© du dĂ©nommĂ© Mathias en question en train de le tanner pour voir si je peux pas aller faire un tour au village. De toute façon, avec son accord ou pas, je vais y aller au village, il me connaĂ®t mal, alors autant qu’il me le donne son putain d’accord.Il me regarde complètement paniquĂ©, il assure pas ce mec. Sainte Marie mère de Dieu, et s’il m’arrivait quelque chose !! Ca s’appelle patiner dans la mĂ©lasse.Bein non, il va rien m’arriver, c’est un village de gros bĹ“ufs et j’suis pas la chèvre de Mr Seguin. Mais il tient malgrĂ© tout Ă venir avec moi, moi qui pensais ĂŞtre peinarde pour aller boire un boc, c’est ratĂ©.Pot de colle et Princesse s’en vont bras-dessus, bras-dessous, comme deux amoureux transis au village. Mais Ă part le troquet, y-a rien Ă voir au village, et Ă part deux vieux flippers branlants, y-a rien Ă faire non plus. Donc nous allons… au troquet. Musclor le tatouĂ© et BĂ©bert le bĂ©ret sont en pleine partie de billard. Musclor me mate en terrain conquis ce qui a pour effet de me foutre les nerfs en pelotes :— Une Tequila Sunrise, please.Mathias me regarde estomaquĂ©, comment une frĂŞle jeune fille comme moi peut-elle boire pareil breuvage ? Lui se contente de commander une bière Ă dix balles mais j’espère bien qu’il va payer ma conso ce pingre.— J’espère que vous ĂŞtes majeure au moins ? »Qu’est-ce que ça peut te foutre, tĂŞte de sandwich, t’es flic ou quoi ? » Je regarde ailleurs, faisant mine de ne pas avoir trop entendu. Il se trouve que je le suis pas encore majeure, mon anniversaire c’est qu’à la fin du mois. Et alors, t’es pas mon père, tu vas pas me faire chier !Nous n’avions pas grand chose Ă nous dire, le fossĂ© des gĂ©nĂ©rations sans doute. Ceci dit, il n’était pas spĂ©cialement vieux, 27/28 ans Ă tout pĂ©ter, le problème c’est que certains naissent vieux et irrĂ©cupĂ©rables, donc difficiles Ă dĂ©rider !Ensuite, nous sommes sortis, j’ai fait quelques pas jusqu’au petit lavoir. En contrebas, il y avait une petite fontaine avec une minuscule piscine de quelques mètres carrĂ©s. Je me suis carrĂ©ment jetĂ©e dedans toute habillĂ©e, l’eau y Ă©tait glacĂ©e. Formidable comme sensation et pour le moins rafraĂ®chissant. Mon garde-chiourme, apparemment perturbĂ©, s’est mis Ă s’égosiller. C’était vĂ©ritablement jouissif de le faire chier.Je suis ressortie de l’eau, complètement trempe, c’était trop drĂ´le de le voir dans cet Ă©tat. Et rien que pour le provoquer, j’ai enlevĂ© le haut tout en gardant sur moi mon jean dĂ©trempĂ© qui pissait la flotte de tous les cĂ´tĂ©s. Je ne portais rien dessous, je n’en avais pas besoin vu l’ampleur de ma maigre poitrine. Il est devenu blĂŞme et s’est mis Ă rĂ©citer des psaumes de l’Evangile selon Sainte PĂ©toche. Poitrine Ă l’air face au soleil je faisais ma petite fofolle. Je dansais, je me marrais. Tournicoti, tournicotons, comme dirait ZĂ©bulon.ArrivĂ©e en haut de la cĂ´te, pour continuer Ă provoquer, j’ai carrĂ©ment Ă´tĂ© le bas, ne gardant plus que ma petite culotte et mes groles. Et, malgrĂ© toutes les vocifĂ©rations qui m’accompagnaient j’ai continuĂ© Ă clopiner comme ça en plein milieu de la route et ce jusqu’au camp de base.Quand il nous a vus ainsi arriver, le gros cuistot avait les yeux qui lui sortaient de la tĂŞte. Une jeune black presque nue qui sautillait au soleil, il avait jamais vu ça de sa vie. Son petit slip rose devait ĂŞtre en train de craquer, peut-ĂŞtre mĂŞme de mouiller.Mais l’autre d’ajouter :— Mademoiselle, je vous promets que je vais faire un rapport !C’est ça mon con, fais-le ton rapport. Je suis rentrĂ©e dans ma tente et me suis mise Ă bouquiner comme si de rien Ă©tait.Une semaine plus tard c’était mon anniversaire. Dix-huit ans ça se fĂŞte, tout le monde Ă©tait au courant, sauf que moi j’avais pas spĂ©cialement envie de faire la teuf avec eux et mĂŞme plutĂ´t spĂ©cialement envie de ne pas la faire. La plupart des gens ne comprenaient jamais rien Ă mon Ă©tat mental, c’est vraiment dingue de se sentir ainsi incomprise. On dirait presque parfois que je suis un envahisseur, que je suis poursuivie par David Vincent…En plus j’aime pas spĂ©cialement boire ou alors juste un peu pour simplement ĂŞtre gaie, sinon ça me donne le tournis, et la gueule de bois très peu pour moi c’est vraiment une situation très inconfortable. J’aime pas non plus manger parce que j’ai un petit foie fragile et capricieux et que j’ai très souvent la nausĂ©e. J’aime pas non plus spĂ©cialement baiser, enfin je suis pas une obsĂ©dĂ©e du sexe, c’est ça que je veux dire, j’aimerais pas en tout cas faire une partouze avec tous mes potes et vas-y qu’on se mĂ©lange…Je pense que dans la vie il faut tout consommer avec modĂ©ration et surtout bien prendre son temps pour apprĂ©cier les bonnes choses. Vous l’aurez compris je suis plus gourmet que gourmande (pas gourmette quand mĂŞme, ni gourbis, encore moins gourdasse, un petit peu gourgandine quand mĂŞme).Non, moi ce que j’aime ce sont les longs dĂ®ners aux chandelles, en tĂŞte-Ă -tĂŞte, style Whitney Houston avec son Body Guard de Kevin Costner. D’ailleurs j’aurais bien aimĂ© ĂŞtre aussi jolie que Whitney mais sniff, c’est ratĂ©Â ! C’est vraiment trop zinjuste quand mĂŞme ! La nature est mal faite ! En tout cas si j’étais aussi jolie que Whitney je choisirais pas Kevin Costner.Bon, revenons-en Ă cette mĂ©ga-teuf qui avait Ă©tĂ© organisĂ©e en mon honneur. Je pouvais bien Ă©videmment difficilement m’y soustraire. Bon, sympa quand mĂŞme. Ils s’étaient pas fichus de moi quand mĂŞme chacun Ă leurs niveaux. C’était le troisième anniversaire que nous fĂŞtions depuis le dĂ©but du camp. Et puis j’avais plein de petits cadeaux… Je crois que je n’avais jamais Ă©tĂ© autant gâtĂ©e de ma vie, j’en avais parfois les larmes aux yeux. Du coup je me suis mise Ă danser comme une sauterelle. Tous les mecs m’invitaient, ils se bousculaient tous au portillon pour avoir l’intime honneur de me toucher les fesses. DĂ©sormais, j’étais majeure et vaccinĂ©e, mais ça en fait depuis bien longtemps comme beaucoup de filles dans la citĂ©Â !Bon, c’est sĂ»r, certains Ă©taient collants en diable, beaucoup trop de mains baladeuses. En d’autres temps ça m’aurait probablement gonflĂ©e, j’aurais pris mes clics et mes clacs et me serais tirĂ©e. Mais ce soir-lĂ j’avais envie de faire la fĂŞte et de m’amuser, alors tant que ça en restait aux sĂ©ances de pelotage… Ceci dit, j’étais pas non plus spĂ©cialement, me faire tripoter comme ça dans tous les sens par un peu n’importe qui ça m’excite pas des masses, au contraire, ça me bloque, j’ai l’impression d’être traitĂ©e comme un morceau de chair Ă pâtĂ©.Toujours est-il que je ne manquais pas de prĂ©tendants, il y en avait mĂŞme plus d’un qui auraient bien voulu terminer la nuit avec moi et ce n’était pas non plus parce que nous Ă©tions normalement sĂ©parĂ©s, les tentes des filles, les tentes des mecs, que nous ne savions pas Ă l’occasion nous dĂ©brouiller, lorsque le besoin s’en faisait sentir. Et ce soir-lĂ , il se trouvait que justement moi j’avais besoin… Cela faisait longtemps que je l’avais pas fait et puis quand mĂŞme c’était une date importante, un moment oĂą tout bascule et j’avais besoin quelque part de me rassurer. Vous allez sans doute me trouver conne et sentimentale, c’est vrai que si la terre ne tournait pas Ă la mĂŞme vitesse autour du soleil, c’aurait pu ĂŞtre 18 jours plus tĂ´t ou 18 jours plus tard, je pose 1 et je retiens 2, mais moi j’y crois en la magie, il faut percevoir les petits instants magiques et savoir les apprĂ©cier. Après c’est trop tard, vous avez l’impression d’être passĂ©s Ă cĂ´tĂ© de quelque chose… d’important.J’en Ă©tais Ă me demander quel allait ĂŞtre mon mec de la nuit lorsque j’ai vu mon binoclard qui me matait en coin. Un peu Ă l’écart des autres animateurs qui faisaient tronc commun, il n’arrĂŞtait pas de me reluquer. Les yeux lui en sortaient de la tĂŞte, le pauvre, j’avais l’impression d’être avalĂ©e toute crue. Pour une surprise, c’en Ă©tait une. Me souvenant de l’épisode prĂ©cĂ©dent, je me suis mise Ă rigoler, mon partenaire de slow Ă cru que je me fichais de sa gueule et du coup m’a presque plantĂ©e sur place, dĂ©solĂ©e mec, je l’ai pas fait exprès. Je suis retournĂ©e près du bar improvisĂ© pour blablater avec ma bande, radieuse, les mecs en avaient la langue pendante. Et que j’essaie de t’épater par quelque salamalechs, et que je te fais des allusions bien lourdes et que je te raconte une histoire soi-disant drĂ´le pour me faire rigoler. Il paraĂ®t qu’avec les femmes, avec un peu l’humour on a dĂ©jĂ fait la moitiĂ© du chemin. C’est vrai. Le problème c’est que l’humour forcĂ© c’est pas vraiment drĂ´le. Et je prĂ©fère mille fois un mec gauche et attendrissant qui s’emmĂŞle les pieds dans la carpette qu’un boute en train qui amuse la galerie avec ses pitreries. Et Ă mon avis ceux qui en font des tonnes sont vraiment des handicapĂ©s.Tandis que ça s’agitait aux alentours, de temps en temps je tournais l’œil discrètement vers mon admirateur fascinĂ© et je dois dire que c’était très excitant Ă vrai dire, j’en Ă©tais toute bouleversĂ©e, vraiment troublĂ©e. J’avais plein de petites boules de plaisir qui frĂ©tillaient en moi et je faisais tout ce qu’il faut pour continuer Ă l’émoustiller. Des poses, des attitudes, des façons d’être, plein de petits dĂ©tails insignifiants qui passaient certes inaperçu pour les gens qui m’entouraient mais que lui voyait, j’en Ă©tais certaine. Salope en diable, je continuais de faire la teuf comme si de rien Ă©tait, je l’imaginais bouillir quand les autres me touchaient, quand ils se penchaient sur moi comme pour m’embrasser. Du coup je jouais avec le feu et faisais presque exprès de les brancher. Rien qu’à l’imaginer bouillant de jalousie intĂ©rieure, hummm, quel dĂ©lice ! J’avais certes pas choisi le plus beau ni le plus intelligent mais je crois que j’avais choisi celui qui correspondait le plus Ă ma sensibilitĂ©. Quelque part, j’étais Ă©merveillĂ©e, quelque part moi-aussi je bouillais d’un feu intĂ©rieur qui me consumait, et j’adorais cette sensation de plĂ©nitude intĂ©rieure, un bien-ĂŞtre auquel participait chaque cellule de mon ĂŞtre.Ensuite les filles ont branchĂ© le karaokĂ©. J’avais horreur de chanter mais ce soir-lĂ j’étais survoltĂ©e. GrimpĂ©e sur une table, je monopolisais presque le micro. Tout y passait, Tina, Whitney, Jane Birkin, Vanessa Paradis, Patricia Kaas… Mon rĂ©pertoire devenait infini car je voulais briller pour LUI plaire. Tout le monde me regardait mais c’était lui que je voulais, rien que lui et toujours lui, nous Ă©tions seuls au monde, les autres n’étaient que des objets mouvants placĂ©s ça et lĂ et qui faisaient partie du paysage et si je virevoltais sur cette estrade improvisĂ©e c’était uniquement pour lui ĂŞtre agrĂ©able.Ensuite je suis redescendue, j’ai laissĂ© la place aux autres, je suis allĂ©e me dĂ©saltĂ©rer, vĂ©rifiant de temps Ă autres que j’étais bien encore son uniquement centre d’intĂ©rĂŞt, comme ça, pour me rassurer.Il Ă©tait tard dans la nuit, peut-ĂŞtre une heure du mat’, et les animateurs commençaient Ă s’agiter. Nous avions eu la permission de minuit mais il allait falloir s’arrĂŞter. La trouille des villageois qui pourraient porter plainte, Sainte PĂ©toche, priez pour nous. C’est lui qui s’est proposĂ© pour venir nous annoncer cette grande nouvelle. Pour ma part j’ai apprĂ©ciĂ©, je me suis approchĂ©e et l’ai dĂ©visagĂ©, mes grands yeux noirs essayant de deviner ses petits yeux bleus cachĂ©s sous ses lorgnons :— Allons, soyez sympas, c’est mon anniversaire, encore une petite heure.Il ne savait trop quoi rĂ©pondre, je crois que j’aurais pu lui demander tout ce que j’aurais voulu, il Ă©tait Ă mes pieds. Il devait juste se demander quelle excuse bidon il allait bien pouvoir ramener Ă ses collègues pour justifier ma folie et ma dĂ©mesure.Je suis allĂ©e près du bac Ă disques et me suis mise Ă fouiller. Je cherchais un truc qui dĂ©mĂ©nage, quelque chose qui sorte de l’ordinaire. Je voulais sortir le grand jeu. Attention mesdames et messieurs dans un instant vous allez voir Nora la hyène, Princesse de la Brousse, dans un extraordinaire numĂ©ro de contorsionniste.Je suis tombĂ©e sur un disque de musique ethnographique, genre Tam-tam guinĂ©ens. Quoiqu’il en soit, ce ne sont pas mes origines africaines qui me rendent Ă mĂŞme de m’exprimer librement. Et il n’y a rien d’innĂ© chez NOUS, contrairement Ă ce qu’un ĂŞtre vil et avinĂ© m’a encore suggĂ©rĂ© rĂ©cemment ! Avant cette soirĂ©e lĂ , je n’avais d’ailleurs jamais dansĂ© sur ces rythmes sauvages. Mais j’ai trouvĂ© ça sympa, dĂ©routant, excitant. Et passĂ© les premiers instants de stupeurs dans la foule, voyant que j’étais remontĂ©e sur l’estrade et que je m’éclatais comme une folle en dansant, en faisant je dois l’avouer un peu tout et n’importe quoi, voyant aussi que je les exhortais Ă venir me rejoindre pour qu’ils participent eux aussi, s’en suivit un joli foutoir oĂą nous dansions tous au rythme des Tam tam, complètement dĂ©chaĂ®nĂ©s dans la nuit au grand Dam des animateurs qui devaient ĂŞtre en train de faire la fĂŞte Ă mon malheureux copain pour cĂ©lĂ©brer son efficacitĂ©.Mais non, il Ă©tait lĂ , toujours lĂ , il me regardait toujours, aussi admiratif que figĂ© dans sa contemplation. Mais pour l’instant je ne lui demandais rien. Je savais bien qu’il ne viendrait pas me rejoindre pour danser avec moi, pas comme ça devant les autres, et mĂŞme tout seul il l’aurait pas fait. Alors, pour lui, rien que pour lui, une nouvelle fois j’ai Ă´tĂ© mon body et ma poitrine nue s’est mise Ă briller sous la lune sous les rythmes frĂ©nĂ©tiques des Tam tam africains.Au bout d’un certain temps « Ca suffit, on remballe », les autres animateurs venaient de se pointer. « Qu’est-ce que c’est que ce cirque ? », « Et toi, t’es malade, rhabille-toi ». Tout le monde gloussait, on s’en foutait. Mouvement de foule, joyeuse pagaille, ils avaient vraiment du mal Ă nous tenir, sans arrĂŞt on les relançait. J’ai quand mĂŞme remis mon body car trop de mecs me reluquaient. Je suis presque plate comme une limande mais j’ai de gros tĂ©tons et rien que ça, ça les attire !Finalement, une heure plus tard, nous sommes rentrĂ©es bien sagement dans la tente avec les copines en attendant le moment propice pour rejoindre nos amoureux respectifs. Sur les cinq que nous Ă©tions, il n’y en avait guère qu’une qui n’en avait pas trouvĂ©. Et encore peut-ĂŞtre Ă©tait-elle indisposĂ©e !— Et toi oĂą tu vas ?— Hihi, c’est secret.— Allez, dis-le, c’est Ahmed, je l’ai vu, il arrĂŞte pas de te coller— Vas pour Ahmed, avec un petit sourire Ă©nigmatique.J’en aurais pas voulu de son Ahmed, pour rien au monde, le collectionneur de meufs de la citĂ©, il voulait tous se les taper, antipathique en diable, pour moi c’était ratĂ©Â !Je suis carrĂ©ment partie dans une direction opposĂ©e pour ne pas avoir l’air, j’ai fait tout le tour du camp pour me retrouver juste en face de la petite canadienne de mon copain. Elle Ă©tait vide, il Ă©tait pas lĂ . L’espace d’un instant j’ai eu peur qu’il ne s’en soit trouvĂ© une autre, j’ai presque failli pleurer. Et puis j’ai vu un grand Ă©chalas revenir lentement des toilettes et je me suis mise Ă frĂ©tiller en le voyant s’approcher.Surprise lorsqu’il est entrĂ© dans sa tente et qu’il m’a vue sagement assise sur son duvet. Je crois qu’il s’attendait Ă tout sauf à ça :— Mais… Que… Tu…— Chut, ne parle pas ! Je suis lĂ , c’est tout, les mots sont de trop.Il a Ă©tĂ© très très tendre, un ange de douceur. Sa main glissait tout autour de mon visage, lentement, Ă m’en faire devenir folle. Je sentais mes nerfs se hĂ©risser tout autour de ma nuque. Je retournais la tĂŞte vers lui Ă la recherche de contact, l’envie qu’il me touche, qu’il me frĂ´le, qu’il m’enlace de ses langoureuses caresses sans cesse rĂ©pĂ©tĂ©es avec la plus insidieuse des coquineries, celle qui consiste Ă faire languir jusqu’au paroxysme.Il me caressait avec un maximum de tendresse comme si j’étais un objet prĂ©cieux, un joyau dans son Ă©crin. Et j’en redemandais sans cesse, mon corps tout entier Ă©tait lĂ pour lui dire que j’adorais ça, que j’en avais envie, au plus profond de moi-mĂŞme, sans aucune restriction.On a beau dire, on adore ça. Rien que ces divines caresses lentement prodiguĂ©es, malgrĂ© ou peut-ĂŞtre Ă cause de son petit cĂ´tĂ© malhabile ou empruntĂ©, incertain et craquant, j’étais sĂ©duite, je me sentais amoureuse, folle, la vie Ă©tait gĂ©niale, exaltante et me donnait envie de vivre intensĂ©ment chaque minute Ă©coulĂ©e et avec tout mon corps, minuscules parcelles de phĂ©nĂ©ronĂ´mes qui flottaient entre nous.Si dans la citĂ© vous rencontriez une petite black avec un jean dĂ©lavĂ© et des baskets dĂ©glinguĂ©es, vous aviez de grandes chances que ce soit moi, Nora. Mais attention pas n’importe quel jean dĂ©lavĂ©, toujours des jeans des nippes achetĂ©es dans des solderies et retouchĂ©es avec soin avant d’être soigneusement dĂ©lavĂ©es par petites touches et par mes soins. Mes jeans parfois je passais souvent plusieurs jours Ă les mettre au point et je mettais toujours un point d’orgueil Ă ce qu’ils soient tip-top. Première action, passer voir ma petite tâcheronne, une voisine du 2ème niveau, ex-couturière. Elle Ă©tait un peu branlante, ne tenait plus trop sur ses cannes. Lorsque j’étais lĂ , je ne manquais jamais de lui faire ses courses, et pas une fois je ne l’ai escroquĂ©e, contrairement Ă mes vieux avec lesquels j’étais toujours Ă l’affĂ»t du moindre dĂ©tournement possible. En Ă©change de cela, elle s’occupait de mes fringues, toujours souriante et de bonne humeur, en tout cas lorsqu’elle me voyait. Du coup elle contrastait pour moi avec tout ce qui pouvait exister dans la citĂ©. Et moi j’étais toujours nickel avec des jeans que tout le monde m’enviait. La tchatche ! La frime quoi !Mais ce qui m’a fait le plus rire ce soir-lĂ c’est que mon bel amant s’est complètement emmĂŞlĂ© les pinceaux lorsqu’il a essayĂ© de me l’ôter. Certes il Ă©tait serré… mais il Ă©tait quand mĂŞme pas très douĂ©. J’ai Ă©clatĂ© de rire, je me suis mise Ă glousser. Dans une tente voisine quelqu’un s’est mis Ă bougonner. Du coup je me suis prise un fou rire irrattrapable. On pouvait plus m’arrĂŞter, c’était plus fort que moi, dès que j’arrĂŞtais ça recommençait, j’ai cru que ça ne finirait jamais. Je pense que plus personne n’ignorait qu’il y avait une gourgandine dans la tente de Mathias. Mais je ne l’avais pas fait exprès et en plus je m’en foutais. Mathias lui Ă©tait tout chose, lĂ©gèrement dĂ©sorientĂ©, une fois de plus je l’ai trouvĂ© trop craquant, un vĂ©ritable petit amour. Je l’ai prise dans mes bras et lui ai collĂ© un baiser, plus tendre tu meures, plus passionnĂ© tu exploses comme un feu d’artifice.J’ai jouĂ© ma sauvageonne, Nora la hyène qui se jette sur sa proie, toutes griffes dehors. Je le griffais, je le mordais, sauvage jusqu’au bout des ongles, vĂ©ritable tigresse qui fond sur la proie pour la dĂ©vorer toute crue.Question virilitĂ©, il n’y avait aucun problème. J’ai sorti un sexe tendu et arquĂ© du plus bel effet que je me suis aussitĂ´t mise Ă lĂ©cher. Le bâton de jouissance de mon homme, j’avais envie d’en profiter, de l’aspirer lentement, goulĂ»ment et bientĂ´t comme une chienne, complètement dĂ©bridĂ©e, excitĂ©e par cette bite qui me rendait insatiable et enflammĂ©e. Je l’ai lĂ©chĂ©e longtemps et de toutes les façons comme un gros sucre d’orge dont on aspire tout le jus. Ma langue passait alors par toutes les frĂ©nĂ©sies, parfois lancinante et fugace ou alors frĂ©nĂ©tique et vorace.Ce gros sexe turgescent bougeait de sa vie propre et alors lĂ j’étais Ă©merveillĂ©e.Finalement je me suis relevĂ©e pour Ă´ter moi-mĂŞme mon jean. C’est vrai que j’avais de j’avais de belles petites fesses, suffisamment rebondies et que c’était un peu difficile Ă Ă´ter.— Je pense que… enfin qu’il vaut mieux… je veux dire que…Ce mec lĂ Ă©tait un chou, vraiment gĂ©nial, il se faisait une montagne de pas grand chose… Bein oui il valait mieux utiliser ce petit truc lĂ , c’est la moindre des choses avec une inconnue, non ?— Je t’aime, lui ai-je simplement rĂ©pondu.Il a enfilĂ© son truc et moi je me suis enfilĂ©e sur lui, assis face Ă face, nous regardant. J’étais tellement excitĂ©e que je n’ai eu aucun problème Ă ĂŞtre pĂ©nĂ©trĂ©e moi qui suis d’habitude pourtant longue Ă la dĂ©tente. J’allais et venais le long de son bâton d’amour en le retenant au niveau des Ă©paules, lentement, comme sur une balançoire. Les yeux dans les yeux, nos regards crĂ©pitaient d’envie et nos sexes savouraient l’extase. Le rythme insidieusement s’accĂ©lĂ©rait par la magie de nos dĂ©sirs sans cesse renforcĂ©s. Je voulais le maximum, le voulais tout, la profondeur, la rapiditĂ© mais surtout la jouissance. Et je voulais aussi la force du mâle quand il s’empare de moi, ressentir cette espèce de brutalitĂ©, cette espèce de dĂ©monstration de force quand il s’empare de son bien. Je me suis mise Ă quatre pattes pour lui prĂ©senter mon adorable petit fessier (du moins si je n’ai pas de seins ai-je au moins de jolies fesses). Il s’en est aussitĂ´t emparĂ© avec une vigueur insoupçonnĂ©e tandis que je tournais la tĂŞte pour le regarder complètement chienne pour cette saillie. Je m’en mordais les lèvres. Il me semblait que je jouissais mais je savais plus trop bien oĂą j’en Ă©tais, j’étais certaine que j’allais jouir encore plus fort, toujours plus fort. Tous les pores de ma peau se sont mis Ă vibrer, je secouais la tĂŞte, j’avais envie en crier. Ă€ un moment, n’en pouvant plus je me suis mordue les doigts jusqu’au sang. Mais c’était trop, je n’arrivais plus Ă me calmer, j’ai mordu Ă pleines dents dans le duvet, Ă m’en faire pĂ©ter les gencives et en secouant la tĂŞte, Nora la folle. L’instant d’après j’ai explosĂ©. Je sais plus trop, j’ai dĂ» crier, dĂ©ranger encore la moitiĂ© du camping, je ne pouvais plus me contrĂ´ler, ravagĂ©e par les spasmes Ă rĂ©pĂ©tition qui rebondissaient comme un sauteur Ă l’élastique, ravageant mon corps et ravageant mon âme.Sur ce la seconde vague est arrivĂ©e, dĂ©clenchĂ©e par la jouissance de mon homme, profonde, puissante, Ă©norme… Une nouvelle fois ensevelie sous les ondes de plaisir qui me dĂ©voraient encore et encore, qui me donnaient la chair de poule et des frissons partout. C’était trop, trop bon, trop merveilleux, trop gĂ©nial, trop pĂ©tillant…Je me suis retournĂ©e et nous nous sommes embrassĂ©s, très tendrement, amoureusement mĂŞme, comme deux vieux amants qui s’aiment depuis toujours et aussi pour la vie.Ainsi se termine cette sĂ©rie de quatre textes qui je l’espère vous ont apportĂ© un petit peu de plaisir.Je tiens Ă remercier Catherine, une copine qui adore le porto. Elle a passĂ© une longue soirĂ©e Ă corriger mes fautes mais certains passages l’ont bien fait marrer.Je remercie Ă©galement mon ami et nĂ©anmoins amant qui a consenti Ă consacrer un peu de son temps, Ă´ combien rare et prĂ©cieux (C’est un monsieur très occupĂ©, hihi), Ă retravailler un peu mon style, quelquefois c’est vrai un peu cacophonique, et Ă revoir certains passages lĂ©gèrement discordants. Je t’aime gros bĂŞta. N’empĂŞche que j’ai plus de vocabulaire que toi, et toc !Bisous aussi Ă la petite SĂ©verine, ma petite nièce prĂ©fĂ©rĂ©e, elle a un an aujourd’hui, elle est mignonne comme un cĹ“ur, une vraie petite Whitney Houston en puissance. Dire qu’il faudra encore qu’elle attende 17 ans pour lire mes histoires sur Revebebe !Pour ma part je reviendrai sans doute dans deux ou trois mois pour de nouveaux rĂ©cits. J’espère avoir un peu de temps d’écrire quand je serai en congĂ©s. Si ceux-ci vous ont plu, bien entendu.Nora la hyène – Avril 2001