Il fait une chaleur à crever. Cela fait deux heures que je suis arrivé à Constantine. Le bus qui m’amenait d’Alger était climatisé en principe ! En principe ! Mais le principe devait pas être bien réglé, alors j’ai sué comme jamais. C’est pas grave. La vie est belle et c’est la première fois que je viens dans cette ville. Je travaille depuis quatre mois dans une boîte de Marseille. Mon premier boulot depuis que j’ai terminé les études ! Informatique et systèmes de contrôle… j’en dis pas plus ! Des radins, ces patrons ! Cette idée de me faire prendre le bus, par exemple ! Alors que l’avion, c’est pas mal non plus, hein Patron ?Cela dit, je ne regrette rien : il n’y a pas eu que du mauvais dans la moiteur du bus et la monotonie du voyage.Il y a eu ce mec à côté de moi. Rabbéa. Dès le départ d’Alger, on a sympathisé. Vingt-deux ans, d’un an mon cadet, il fait des études d’ingénieur à Constantine. On a donc causé boutique, des maigres possibilités pour lui de trouver un job intéressant en Algérie, de son désir d’aller en France, des filles… Ah les filles ! Le crédo d’une discussion pour deux mecs qui se rencontrent et sympathisent. Quelle hypocrisie ! C’est chiant ! Même quand on est homo convaincu, comme c’est mon cas, on ne coupe à la règle. La règle qui consiste à jouer le macho qui fantasme sur les filles. Alors que les filles, ben c’est pas du tout mon truc, voyez ! Discours rigolard ! Intérêt simulé !… Réponses convenues !Alors que j’aurais pu lui dire d’entrée : « C’est sympa de t’être assis à côté de moi ! Bon il fait chaud, et j’aurais survécu sans toi, mais je préfère que ce soit toi… qui n’es pas obèse. Au contraire, je dirais même que t’es pas mal roulé, avec du charme aussi, avec tes yeux sombres qui te mangent le visage, comme on dit ! D’ailleurs avec quelques degrés de plus, peut-être que tu enlèverais ton tee-shirt moulant qui souligne tes pectoraux… souligne tellement que j’ai les yeux scotchés sur ces pointes que j’ai envie de croquer ! Là , tout de suite ! »Et peut-être qu’il m’aurait répondu : « Te gêne surtout pas, mais du calme, là , tout de suite ! Attendons que le jour se soit couché et que les passagers se soient endormis et laisse-moi aussi alors toucher le gentil paquet que t’as entre tes jambes et qui semble de plus en plus te gêner, non ?! Hé, le Français, mais tu bandes ?! »C’est drôle, au moment où l’on faisait connaissance sur fond de chat somme toute banal, peut-être pensait-il vraiment ce que j’aurais voulu qu’il pense ?! En tout cas, pour les filles, puisqu’on a abordé le sujet, et d’après ce qu’il en a dit, j’ai l’impression que c’est un peu coton pour les draguer par ici !On a eu un coucher de soleil de rêve. J’ai fait une photo, avec Rabbéa en premier plan. Il est beau, ce mec ! Lorsqu’il sourit, tout son visage s’illumine. Son sourire et son regard, bien sûr ! Mais surtout le calme et la gentillesse que l’on perçoit à son contact.Le bus est comme une basse-cour. Ça caquète et ça caquète !! Et lorsque le jour s’est fait la belle, après un ultime festival de couleurs, les conversations continues dans le bus sont devenues intermittentes, puis elles se sont arrêtées. Je me suis retourné pour voir toutes les têtes tanguer qui à droite, qui à gauche. Et observer Rabbéa sur le point de dodeliner du chef à son tour. J’ai dodeliné aussi, feignant le sommeil, et veillant bien, au bout de quelques instants, à ce que ma tête puis mon buste, viennent s’appuyer délicatement sur mon voisin.Pas de réaction négative. Au lieu de cela, la jambe droite de Rabbéa est venue progressivement effleurer, puis toucher ma jambe gauche, puis s’est franchement appuyée dessus, et je ne l’ai pas repoussée.Bien sûr ! La joie immense du dragueur lorsque les feux repassent au vert ! Depuis que je drague, il y a toujours ces moments d’incertitude, donc de grand bonheur, finalement, où je me demande si l’autre… en est ?… en croque ?… avec moi ?… ou pas du tout ! Ou si cela n’est qu’une coïncidence !Donc Rabbéa dort et sa jambe est posée là par le plus grand des hasards ! La panique du dragueur au moment où il jette son va-tout et peut très bien se ramasser une gamelle ! Car là , il va se réveiller, me repoussera en douceur parce qu’il est gentil, ou sans ménagement, parce que … pas de ça chez nous, Monsieur… et j’aurai l’air con et je simulerai le réveil et marmonnerai quelques stupides excuses teintées de sommeil pour donner le change.Le jour où l’on percera à distance le désir d’autrui, où on lira l’autre comme les informations sur un code à barres, c’en sera fini de la drague. Heureusement que ça n’arrivera jamais !Seulement la jambe de Rabbéa a accentué sa pression… Et l’adrénaline a pris la place du doute. Et je n’ai pas enlevé la mienne, de cuisse… au contraire, je lui ai envoyé quelques coups de genou discrets… auxquels il a répondu. Et j’ai su, et lui aussi. Nos yeux se sont rouverts par magie. Lorsqu’on s’est souri dans la pénombre, nos jambes étaient littéralement collées l’une à l’autre. Il m’a fait un clin d’œil entendu, s’est levé discrètement, a attrapé une maigre couverture et l’a mise sur nos cuisses. Et le jeu a commencé.Alors que nos regards étaient hypnotisés vers l’avant du bus et le dos du chauffeur, et le risque d’être découverts dans nos gestes, nos mains avec des gestes lents et discrets mais sûrs, se sont activées. Tout d’abord, nous nous sommes étreints les mains, pacte d’amitié, de reconnaissance et de silence, puis j’ai découvert son érection et une braguette déjà ouverte. Lui-même, après avoir doucement évalué l’intensité de mon désir, s’est attaqué aux problèmes des cinq boutons de mon jean tout neuf. J’ai rentré le ventre pour lui faciliter la tâche, et lorsqu’il a eu ma queue bandée dans sa main, j’ai ouï le gémissement qui s’est échappé de sa bouche. J’ai eu peur que tout le car entende, et j’ai lancé quelques regards inquiets alentour. Mais j’étais bien le seul à l’avoir entendu.Lorsque ma main s’est enroulée à son tour autour de son membre, j’ai eu comme un complexe. Sur Internet, il y a des sites réservés aux queues de cette dimension. Pas tant la longueur, car là , je crois que je suis encore dans la course, que l’épaisseur. Impressionnant !— J’ai envie de te sucer, lui ai-je murmuré à l’oreille.— Moi aussi, mais c’est pas possible, m’a-t-il répondu.Comme si je le savais pas. Une pipe en plein bus ! Le chauffeur qui nous regardait parfois dans son rétroviseur, peut-être parce que j’étais l’étranger de service, peut-être parce qu’il devinait quelque chose, nous en aurait peut-être passé l’envie !J’ai enlevé la main de Rabbéa et me suis levé à mon tour pour prendre quelque chose dans mon sac à dos. Avant, il a fallu que je remballe mes couilles dans leur emballage, et ce ne fut pas chose facile.— C’est quoi ? m’a-t-il demandé en me voyant ouvrir un flacon— De l’huile d’amande douce ! Donne-moi ta main !Il a compris. La couverture a retrouvé sa place. Les braguettes se sont rouvertes, et il a étalé la généreuse rasade que je lui ai versée dans le creux des mains. J’en ai fait autant.Et on a commencé à se branler !En silence !Nos mains huilées allaient et venaient le long de nos fûtes. Avec le regard de chaque instant du chauffeur ! J’étais tellement excité qu’au bout de très peu de temps, j’ai senti que la caresse ne durerait pas des heures, et qu’un orgasme d’enfer se préparait. Je me suis forcé à penser à des choses pas marrantes pour retarder les choses.Ça a pas marché !Je ne savais plus quoi faire.Surtout ne t’arrête pas, Rabbéa.Rabbéa qui respire fort lui aussi.Je me suis penché en avant, pour me cacher. Et je n’ai pu m’empêcher de laisser échapper une série de gémissements lorsque j’ai éjaculé. Rabbéa a continué à me branler très vite, jusqu’au moment où je l’ai repoussé. J’imaginais la couverture qui serait inondée de sperme, mon pantalon, aussi ! Je me suis redressé pour affronter à nouveau le regard du chauffeur.Ma main continuait à glisser rapidement le long du pénis de Rabbéa. J’ai bien dû le branler sur cinq kilomètres. Où trouvait-il la force de se retenir ? Il a éjaculé au moment où l’on doublait un bringuebalant et bruyant camion de marchandises. Ce qui a absorbé l’attention du chauffeur, ce qui était bien, car Rabbéa avait complètement oublié qu’il était dans un bus avec du monde autour. Mais le reste du monde dormait à ce moment.Son orgasme a été aussi long que violent. Ça a été tout d’abord un long gémissement ! En même temps, j’ai senti le jet de sperme épais sur ma main. J’ai continué à le branler tout doucement cette fois. Sa tête allait d’un côté et d’autre, et son plaisir n’était pas dissimulé… Quand il m’a finalement repoussé en se tournant vers moi avec un sourire, j’avais la main pleine de jute. Comme lui, j’ai laissé ma main sur son sexe, lequel est resté raide encore quelque temps. Nous sommes restés ainsi pendant de longues minutes, nous étreignant de temps à autre, nous regardant et souriant, heureux et comblés.Le premier, j’ai retiré ma main pleine de sperme… J’ai regardé cette main, ne sachant tout de suite qu’en faire, où m’essuyer. Puis j’ai eu soudain une envie… et j’ai alors entrepris de la lécher, doigt après doigt, tout en regardant dans le fond des yeux un Rabbéa plutôt surpris.Le goût du sperme, exquis !L’envie de recommencer bientôt !L’envie d’autres jeux avec Rabbéa, bien sûr.— Tu vas à quel hôtel, déjà  ? m’a demandé Rabbéa.