Chère voisine,Je t’ai vue emménager dans le petit appartement à côté de chez moi. En plein hiver. En plein confinement. Tu es arrivée avec quelques boîtes, deux plantes et un vélo. Un camion de livraison a suivi pour livrer quelques meubles et ce fut tout. De ces simples objets, tu as aménagé ton espace en moins d’une journée. Depuis, de mon poste de télétravail, je te vois dans ma vision périphérique rentrer chez toi tous les après-midi. Tu regardes dans ta boîte à lettres, pousses ta porte de l’épaule, et la refermes sans regarder derrière toi. Tu ressors souvent quelques minutes plus tard en leggings, chandail de laine mérinos avec des écouteurs sur les oreilles pour aller courir. Souvent trente ou quarante-cinq minutes. Sans le vouloir, j’ai mémorisé ta routine, qui brise la monotonie de la fin de ma journée de travail.Un soir, quelques minutes après que tu sois rentrée de jogger, j’ai vu une chandelle s’allumer dans la fenêtre de ton salon et, par le coin du rideau qui n’était que partiellement tiré, je t’ai vue t’installer sur ton sofa deux places, t’allongeant en faisant reposer ta tête et tes pieds nus sur chacun des bras. Ce moment de relaxation que tu t’offrais m’a extirpé de mes tâches professionnelles. Interrompant mon travail, j’ai laissé voguer mon esprit. Qui es-tu ? D’où arrives-tu ainsi chaque soir ? Tu dois être dans la catégorie des travailleurs essentiels pour partir bosser ainsi chaque jour. Tu me semblais vivre seule. De loin, et avec les vêtements d’hiver, je distinguais mal les traits de ton visage, mais tu me paraissais rayonnante. Ta détermination à sortir courir tous les soirs m’impressionnait. À ce temps-ci de l’année, nous passons du froid glacial, à la neige, à la pluie, au vent. Mais pourtant, tu ne manquais pas une journée de course. Voilà une bonne hygiène de vie !Rapidement mon esprit a été accaparé par ton apparence. Tu portais une robe de chambre blanche. Tu avais les yeux fermés. Tes cheveux noirs et raides pendaient derrière toi. Ils étaient encore humides ; probablement tu sortais d’une douche chaude. Ton visage était détendu. Je voyais ton abdomen se soulever au rythme de longues respirations. Tu t’arrêtais de temps à autre pour boire à un bol. Un liquide chaud et réconfortant, j’imaginais. Tu m’as fait réaliser tout le stress qui s’était accumulé en moi au cours de la journée et j’ai synchronisé ma respiration à la tienne. Inspirer cinq secondes. Expirer cinq secondes. J’ai moi aussi fermé les yeux et je me suis concentré sur le va-et-vient de l’air dans mes poumons. J’ai senti le calme m’envahir, mon esprit s’évader.Quand j’ai rouvert, les yeux, les tiens étaient toujours fermés, mais tes mains avaient disparu sous le léger tissu. Une s’était réfugiée sur ta poitrine, l’autre semblait caresser ton ventre. Les lents mouvements étaient visibles sous ton vêtement. Ta main passait doucement sur un sein en prenant le temps de le caresser, ou le pétrir, je ne voyais pas très bien, avant de passer à l’autre. Ton autre main est descendue vers ton sexe, et j’ai vu un sourire naître sur tes lèvres. J’ai eu un moment d’hésitation ; je ne suis pas d’habitude voyeur. Je ne voulais pas violer ton moment d’intimité. Mais j’étais séduit par ce que je voyais… En regardant aux alentours, j’ai constaté que j’étais le seul qui pouvait te voir ainsi sur ton sofa. L’arbre devant chez toi, le banc de neige, la portion de la fenêtre cachée par le rideau, tous ces éléments rendaient impossible de te voir à partir d’un autre angle. La plénitude que ton corps évoquait était contagieuse. J’avais envie de vivre par procuration cette extase qui montait en toi. Je t’enviais de pouvoir te permettre cet instant de liberté en toute quiétude.Tes mouvements ont pris de la vigueur, ouvrant les pans de ta robe de chambre se faisant. La peau dorée de ton ventre plat m’est apparue, lumineuse par elle-même me sembla-t-il, dans la pénombre de ta demeure et du jour qui laissait sa place à la nuit. Le haut du tissu s’est accroché un instant à ta poitrine, avant de choir à tes côtés, me dévoilant sa délicate beauté. Ta paume comprimait ton sein, laissant s’échapper ton mamelon entre tes phalanges tendues. Tu inclinais légèrement la tête vers l’arrière, en rythme avec ton autre main qui s’affairait à caresser ton sexe. Je devinais tes doigts qui entraient et sortaient, qui s’attardaient sur ton bouton de plaisir, puis qui retournaient en toi. Tes lèvres s’entrebâillaient. Je croyais entendre les longs soupirs qu’elles laissaient s’échapper. Ton bassin ondulait pour aller à la rencontre de tes gestes lubriques.Tu t’es mordu la main quand un spasme de plaisir a parcouru ton corps. J’ai compris que ce n’était qu’un avant-goût de la déferlante de plaisir qui se pointait à l’horizon. J’ai aussi compris que tu es ambidextre lorsque tu as inversé tes mains, celle qui était sur ton sexe remontant vers ta bouche, que ta langue a accueillie fougueusement. L’autre a continué le travail entamé par la première, énergiquement, frénétiquement. Tes jambes se sont écartées, tes pieds prenant appui sur la table basse, donnant encore plus de latitude aux caresses que tu pouvais te conférer. Tu étais maintenant complètement découverte de ton vêtement, si ce n’est des manches dans lesquelles tes bras restaient enfilés, magnifique dans ta nudité, dans la lumière chaude et vacillante de la bougie.Ton corps s’arqua, me dévoilant toute sa souplesse et sa sveltesse. Cette position statique, que tu conservas de longues minutes pendant lesquelles ta peau devint brillante de sueur, était digne d’une nymphe. La cambrure de ton dos mettait en valeur ta taille fine. La bosse de ton mont de Vénus se démarquait de la peau de ton ventre étiré. Tes doigts continuaient à jouer sur ton sexe tel un musicien joue de son instrument : précis, rythmés, variés et mélodieux. Tu écartas davantage les jambes, pour offrir à ta main un plus grand terrain de jeu. Tous tes doigts étaient réquisitionnés, séparant tes lèvres, effleurant ton clitoris, pilonnant ton antre. J’avais les yeux rivés sur ton corps, sur tes seins qui vibraient sous tes gestes, incapable de me soustraire à ce spectacle malgré la culpabilité qui montait en moi. Je sentais que j’aurais dû te laisser vivre ce moment d’intimité, que tu ne t’attendrais pas à ce que ton nouveau voisin t’observe ainsi alors que tu te prodiguais plaisirs et volupté. Pourtant, je restais là , hypnotisé.C’est à ce moment que tu as momentanément ouvert les yeux et où je crois que nos regards se sont croisés. J’imagine qu’avec le jour qui tombait et la lumière dans la pièce où je me trouvais c’était maintenant possible pour toi de m’apercevoir à travers les reflets de ma fenêtre, et j’ai vu sur ton visage un éclair de surprise tout juste avant que tu ne sois emportée par un long orgasme. D’un mollet tu as renversé le bol duquel tu avais bu, j’ai vu tes quadriceps se tendre sous la peau de tes cuisses, tes orteils se pointer, tes abdominaux se contracter en plusieurs cycles. Tu tirais sur tes seins, assénais à ton sexe les longs mouvements qui portaient ta jouissance de plus en plus haut. Ton visage se crispait de plaisir. Ton corps entier ondulait au rythme des convulsions de l’orgasme.Tu es restée dans cette transe un temps qui m’a paru infini et pendant lequel je retenais mon souffle, tout en sentant mon cœur battre à tout rompre. J’étais époustouflé par la scène qui se déroulait sous mes yeux, me régalant du privilège qui m’avait permis d’en être témoin tout en éprouvant la crainte de m’être fait prendre dans ce rôle de voyeur. Tes bras ont peu à peu cessé leurs gestes, les contractions se sont espacées, et tu t’es complètement relâchée, tes membres retombant comme ceux d’une poupée de chiffons. Ta poitrine montait et descendait rapidement, tu semblais à bout de souffle.Avant que tu ne rouvres les yeux, j’ai éteint la lumière et j’ai quitté la pièce, question de te laisser reprendre tes esprits sans regard indiscret. J’éprouvais la crainte de m’être fait découvrir à ce jeu de voyeur qui était tout nouveau pour moi. La honte, mêlée à l’excitation me hanta pendant quelques jours.Une nuit, en me remémorant cette scène, j’ai décidé de jouer franc jeu avec toi et de t’écrire cette lettre. Avec la pandémie et la distanciation sociale, je n’ai pas encore eu l’occasion de te souhaiter la bienvenue dans le voisinage. J’ai décidé de te raconter cette histoire pour éviter un malaise entre nous lorsque nous nous rencontrerons pour la première fois. Tu peux être assurée de ma discrétion ; je ne raconterai à personne le spectacle duquel j’ai été témoin. Pas même à ma conjointe. Tu pourras constater que nous sommes une belle ribambelle de voisins qui aiment se retrouver dans la ruelle pour papoter en surveillant nos gamins à l’heure de l’apéro. Nul besoin d’avoir des gamins pour venir socialiser avec nous ! Au plaisir de faire ta connaissance !A.*************Je suis allé déposer cette lettre dans la boîte aux lettres de ma voisine, en feignant avoir reçu par erreur chez moi une lettre qui lui était adressée. J’étais à peu près convaincu qu’elle m’avait aperçu pendant qu’elle se masturbait, qu’elle avait compris que j’avais été témoin d’une bonne partie de la scène, et je tenais à éviter qu’elle commence à demander à mes autres voisins si j’étais du genre à espionner pour le plaisir. J’espérais que ce moment resterait simplement entre nous. J’ai eu la surprise de trouver une réponse dans mon courrier, une semaine plus tard. Dans une lettre écrite d’une calligraphie fonctionnelle, mais élégante, sur un papier épais embaumant la lavande :Cher voisin,J’ai en effet cru apercevoir un homme qui me matait l’autre soir. Si ce n’avait pas été de ce bref instant, je n’aurais probablement pas eu connaissance que j’avais un spectateur. En lisant ta lettre, j’ai premièrement été choquée. Mais j’ai apprécié ta franchise et aussi aimé la description que tu as faite de ce que tu as vu. Et je comprends ton intérêt à ne pas créer de malaise entre nous. Avec le temps qui a passé depuis cet évènement, sois assuré que je ne t’en tiendrai pas rigueur. J’aurais dû m’assurer d’avoir bien fermé le rideau de mon salon.Alors voici le marché que je te propose : je ne dirai à personne que tu t’amuses à mater les voisines si tu t’engages à publier sur Rêvebébé notre échange et bien entendu si tu conserves ce petit secret pour nous deux. Nous aurons très certainement l’occasion de faire officiellement connaissance bientôt et tu pourras me dire sous quel pseudonyme tu as publié. Au plaisir de te lire !S.*************Bon. Je constatai que si je voulais m’assurer de ne pas me faire construire une réputation de voyeur, je n’avais qu’une seule chose à faire. Je connaissais déjà le site Rêvebébé pour avoir parcouru les récits érotiques, et l’envie de contribuer m’avait souvent titillé l’esprit. Toutefois, la réaction de ma voisine me surprenait. M’obliger à publier le récit de ce que j’ai vu, voilà une belle manière pour elle de retourner une situation potentiellement embarrassante en projet artistique. Marché conclu, voisine !Je n’étais cependant pas en mesure de publier immédiatement mon texte. Je tenais à le réviser, et à l’améliorer par rapport à la lettre originale (manuscrite) que je lui avais écrite. Au fil des jours qui suivirent, je continuai de voir S. vaquer à ses occupations, mais je constatai que le rideau de sa fenêtre était mieux tiré ! Le printemps avançait timidement, la neige fondait peu à peu. Nous approchions du moment où les rencontres fortuites entre voisins se faisaient plus faciles au fur et à mesure où nous sortions de nos tanières, de notre hibernation. Tôt ou tard, nous allions nous croiser par hasard. J’anticipais presque avec impatience cette occasion, et je me félicitais d’avoir agi de manière si ouverte avec ma voisine. Le moment venu, plutôt que d’être tiraillé par l’idée qu’elle m’ait peut-être vu, ou non, je pourrais simplement profiter du moment pour faire sa rencontre, normalement, comme tout nouveau venu dans le voisinage. Une petite publication sur Rêvebébé et tout serait réglé. Tout était bien qui finissait bien.