J’ignore si les choses se présentent pour tout le monde de la même façon. En ce qui me concerne, l’excitation sexuelle est épisodique et elle a le don de modifier fondamentalement ma façon de voir certaines choses. Ainsi, pour ne parler que du site Revebebe, les histoires que j’y lis me paraissent délicieusement troublantes ou tragiquement triviales selon que je suis ou non sexuellement réceptive.Quelle étrange chose que notre propre nature ! Elle nous domine au point de faire de nous ses jouets. Il m’arrive ainsi, certains jours, de ressentir une sorte de légère exacerbation de la sensibilité : la peau plus réceptive, l’esprit plus vagabond, le ventre plus émotif… Je sais dès ce moment que je cours le risque d’être tentée par des choses habituellement sans attrait, voire vulgaires. Si je travaille à mon ordinateur, une petite voix intérieure m’incite alors à faire un petit tour, rien qu’un petit tour, sur Revebebe. Un combat s’engage vite entre mon souhait de travailler sans perdre de temps et mon désir diffus de quelque chose que Revebebe pourrait peut-être m’offrir. Et c’est un combat vain, car je sais déjà que je vais succomber…Mais l’étrangeté ne s’arrête pas là .Lorsque je suis dans cet état magique, un peu fiévreuse – mais en même temps tellement grisée par une sorte de fraîcheur du corps toute particulière –, et que j’ouvre Revebebe, la quête commence. Car l’émoi qui est le mien peut grandir, mais il peut aussi s’évanouir. Chaque texte a ainsi son effet propre et peut, selon sa teneur, ajouter à mon ivresse ou me ramener brutalement sur terre. Il importe donc de faire le bon choix. Et les voies offertes pour guider ce choix sont nombreuses. Les « Dernières parutions », c’est un peu la loterie. « Les couleurs » et « les critères aussi », bien qu’il y ait là des thèmes qui m’inspirent et d’autres qui me glacent, ce qui a au moins le mérite de minimiser les effets d’une éventuelle déconvenue. Et puis, il y a les « Hit-Parades ». J’ai remarqué que, sans que cela soit le seul élément généralement pris en compte, la qualité stylistique s’y trouve souvent récompensée ; ce qui pour moi est primordial : je ne puis espérer accroître mon trouble si une faute de syntaxe me pousse à rire.Je suppose bien que la réceptivité face à un texte érotique est quelque chose de très personnel. Ainsi, en ce qui me concerne, je suis vite lasse des descriptions détaillées et explicites d’actes sexuels que l’on qualifie communément de « hard ». Ce qui provoque aisément le bouillonnement de mes sens, ce sont les récits de rencontres qui témoignent du trouble naissant et irrépressible chez des personnages qui ne le recherchaient pas de manière mécanique et préméditée. Somme toute, je suis émue par des émotions qui me rappellent les miennes. Etrange renversement des choses où ma candeur vaincue trouve les armes de sa défaite dans la candeur d’autrui en train de résister, de tenter de résister ! Vous voulez un exemple ? « 13, avenue Volvestre » d’Amanite, voilà un texte qui m’a fait un effet extraordinaire. Après cet aveu, vous allez peut-être vous dire :« J’ai compris : Isa Belle est une vieille fille délaissée qui ne trouve son plaisir que sur Revebebe et qui l’y trouve d’autant plus facilement qu’elle s’y reconnaît dans le personnage d’une autre vieille fille finalement libérée de façon inespérée de sa solitude ».Eh bien non, détrompez-vous ! J’ai la trentaine et pas mal de relations amoureuses, souvent ferventes et quelquefois jubilantes. Mais il est vrai que je ne puis non plus me priver du plaisir solitaire, rapport si mystérieux à soi-même…Il y a déjà bien des années, je m’étais essayée à l’écriture. Et j’avais envoyé à Revebebe huit textes. Il en va évidemment de l’écriture comme de la lecture : elle ne peut être entreprise que dans cet état si particulier d’excitation que je décrivais il y a un instant. Je ne puis personnellement comprendre celles et ceux qui rédigent des textes érotiques en état de froideur corporelle, si je puis dire. Ainsi, les hui textes que j’envoyai alors, je les ai tous écrits d’une façon que je rougirais peut-être un peu de vous décrire. Encore cela me tente-t-il bien sûr, ne serait-ce que pour bénéficier des émois dont cette rougeur témoigne et qu’elle peut aiguiser. Pour le dire d’un mot, il est arrivé, à l’époque, que mon doigt glisse sur le clavier…Je vous parle de mon excitation. Même si c’est moins plaisant, je dois aussi vous parler de mes réfrigérations, si je puis dire. Car je le disais en débutant, la nature est changeante. Et il m’arrive, parfois, durant des périodes relativement longues, de n’éprouver aucun attrait pour l’émotion sexuelle. Bien mieux, l’envie me saisit même en ce cas de nier ce qu’il y a en moi de sensuel et d’effacer les traces de mes égarements précédents. C’est ainsi que, un beau jour, désireuse de ne plus être liée à ces huit textes dont j’avais obtenu la publication sur Revebebe, j’ai coupé le cordon. Comment, me demanderez-vous ? Tout simplement en ouvrant la boîte « Mail auteur » que j’avais ouverte chez Yahoo et, dans la rubrique réservée au changement de mot de passe, en tapant à l’aveugle un nouveau code qui m’en interdirait définitivement l’accès.Ah ! Vous dire que je l’ai bien regretté ultérieurement, c’est peu dire. D’autant que, curieusement, j’en ai perdu le goût d’écrire. Il me semblait que les aventures de Justine et de Laura ne pouvaient être signées d’un auteur différent et je n’éprouvais pas l’envie de recréer de nouveaux personnages. Ce que j’ai également bien regretté, ce sont quelques messages particulièrement émouvants qui me témoignaient du trouble que mes récits avaient fait naître. Qu’il était désolant de se dire que des lectrices ou des lecteurs continuaient d’adresser des messages à Isa Belle sans que celle-ci puisse les lire !Après tant d’années durant lesquelles j’ai si souvent repensé à ce jour fatal où je me suis coupée de ma boîte, poussée par une nouvelle et délicieuse excitation, j’ai pris la décision d’en rouvrir une et de vous avouer ma bêtise. Que vous me pardonniez ou non, ne craignez pas de me le dire !