Résumé de l’épisode précédent : Mon Benoît s’était fait un plaisir de vous raconter quelques-unes de nos aventures. Cette fois-ci, c’est à moi qu’il confia le clavier… pour mon plus grand bonheur.Cuz everytime we touch,I get this feeling,& Everytime we kiss,I swear I could fly,Can’t you feel my heart beat fast,I want this to last,Need you by my side. *Si une mélodie peut cristalliser à elle seule tant de sentiments, de souvenirs indélébiles et de sensations fortes vécues en un moment précis, ce serait pour moi incontestablement celle-ci, magnifiée par la voix soprano de son autrice et interprète. Si ce week-end prolongé, il y a quelques années, avait été un film, ce titre de Maggie Reilly en aurait été le titre-phare de la bande originale… comme l’est « My Heart Will Go on » pour « Titanic », ou « Take My Breath Away » pour « Top Gun », toutes proportions gardées, bien entendu.Après avoir cumulé quelques jours de réduction de temps de travail, ainsi qu’un reliquat des jours de congé de l’an passé que nous n’avions pas consommés, nous avions décidé de les combiner avec les ponts de mai et de déposer quelques jours de vacances. J’avais envie d’exotisme, de dépaysement, qui serviraient d’avant-goût à nos vacances d’été que nous n’aurions pas avant septembre de la même année, et ce sans avoir à enchaîner des heures de vols transcontinentaux ni sans avoir à courir entre deux terminaux d’un hub. Benoît m’avait proposé de me faire découvrir la ville de Tanger, au Maroc. À moins de trois heures de vol de notre Guingamp, via Beauvais, à nous le soleil et le beau temps qui nous ferait oublier un peu la grisaille costarmoricaine et nous ferait changer notre teint pâlot par un bon bronzage… de quoi mieux accueillir les beaux jours d’été. Cette fois-ci, je pris en charge l’organisation de notre pige tangéroise en amoureux, de A à Z. Je nous avais déniché un excellent resort, ouvert il y avait moins d’une année et dont les rapports prix-prestations étaient bien notés sur les plates-formes de réservation. De plus, il était situé assez près de la ville, était facilement accessible et bien desservi par les transports en commun. J’avais un très vague souvenir du Maroc que j’avais visité avec mes parents quand je devais avoir autour de huit ans, le temps d’une semaine dans un sympathique hôtel à Agadir. Afin de mieux m’imprégner de notre destination, j’avais écumé les sites spécialisés et les guides de voyages. J’avais aussi pour finalité de mieux cerner les us et coutumes locaux, confectionner un bon planning, dresser la liste des incontournables à visiter et… savoir quoi mettre dans ma valise.Pudique et respectueuse des autres comme je l’étais, ou comme je prétendais être, il n’était guère question d’arborer à cette ville les mêmes looks qu’à Lagos (au Portugal, pas au Nigeria) l’été d’avant. Certes, Benoît en avait bien salivé, mais chaque chose en son temps, dirais-je.J’étais une femme comblée, mon Benoît d’amour était l’époux dont j’avais tant rêvé. Il était un père très strict, inflexible, parfois très sévère, mais toujours si généreux et dévoué à nos garçons. Il était si affectueux, si attentionné, si créatif qu’il ne cessât de m’étonner. Je mettais toujours à son crédit le fait de ne jamais laisser la lassitude s’installer dans notre couple. Il avait ce don d’attiser la flamme, avec une pincée de loufoquerie, un zeste de sophistication, et une grosse poignée de désir brûlant… Dit autrement, j’avais une envie irrésistible de marquer ces vacances d’une pierre blanche, en donnant libre cours à mes désirs les plus inavouables et mes fantasmes les plus farfelus.Tanger est de ces cités qui ne laissent personne indifférent. Difficile de faire plus clivant. On dit que : soit on en tombe fou-amoureux, soit on la déteste viscéralement. Sa position géographique en fait la capitale diplomatique officieuse de ce pays. L’architecture de cette ville, l’une des plus vieilles d’Afrique, si ce n’est du Monde, témoigne de son passé cosmopolite, riche de mythes et de légendes, qui a forgé la mémoire universelle. Son Histoire contemporaine est intimement liée aux tendances de fond qui aboutirent à la Grande Guerre. Elle en hérita d’un statut de Zone Internationale, qui l’a définitivement différenciée des autres régions du Maroc, soumises pendant près de la moitié d’un siècle aux Protectorats français et espagnols. Dès lors, elle devint une destination de choix d’un public hétéroclite. Aristocrates, militaires, diplomates, aventuriers, artistes, écrivains, voyageurs, négociants, contrebandiers… De Delacroix à Matisse, de Garibaldi à Churchill, de Regnault à Forbes, la liste des personnalités qui y vécurent ou y transitèrent est interminable. Sa réputation de nid d’espions n’était nullement usurpée. Ce qui me surprit le plus, c’est que cet incroyable cocktail de races et de langues n’a jamais mué vers le melting pot. Que les grands groupes sociaux y ont vécu en parfaite harmonie et tolérance, sans jamais vraiment se mélanger ni s’assimiler ! Plusieurs symboles de ce savoir-vivre et de cette tolérance persistent encore. Au cÅ“ur de la vieille ville musulmane, au dédale de ruelles si étroites, se dresse l’église de la PurÃsima Concepción. Toujours au sein de cette « Medina », deux boutiques d’électronique grand public sont tenues depuis des décennies par des familles indiennes hindoues. Benoît porte particulièrement Tanger dans son cÅ“ur et pour cause. Ses grands-parents paternels s’y installèrent, après avoir fui la Seu d’Urgell (en Catalogne), quelques mois après le déclenchement de la Guerre Civile espagnole, avant de rallier la Dordogne. Mystique jusqu’au bout, il me promit même d’aller faire un mini-pèlerinage à l’immeuble sis rue Josafat, où les défunts vécurent lors de leur périple nord-africain.Le lendemain matin de notre arrivée, je m’étais réveillée aux aurores. Mon heure biologique ne se mettait pas en vacances, dites-moi ! Ben dormait encore à poings fermés, recroquevillé comme un fÅ“tus. Comme à son habitude, il n’avait gardé que son boxer pour dormir. Son marcel était posé au pied de sa table de chevet, je le saisis et le sentis. J’inhalai un mélange d’arômes. Il fleurait bon son eau de toilette préférée, mon eau de toilette préférée. J’y distinguai clairement cette senteur caractéristique de son épiderme, elle me remplit instantanément d’extase… comme chaque fois, comme lorsque je me caressais le soir venu en sentant mon écharpe qui exsudait de son parfum, quand nous commencions à sortir ensemble lui et moi. J’en fus enivrée et un immense frisson s’empara de mes veines. Il était temps de réveiller mon poupon taille XXXL, à ma manière, comme il l’aimait, comme je l’aimais. Après mon passage à la salle de bain, j’en revins toute nue, marchant sur la pointe des pieds. Délicatement, je glissai ma main sous la couette et lui baissai le boxer jusqu’aux genoux. J’eus juste le temps de frôler cette verge flasque du bout de mon index qu’elle commença déjà à frémir. Je me blottis contre lui et mes douces caresses le sortirent progressivement de sa torpeur. Ben tendit son bras, comme pour m’enlacer. Il m’attira vers lui, je me laissai emporter. Je finis par me mettre à califourchon sur son corps et me penchai sur ses lèvres. Notre baiser matinal était un rituel immuable. Ce jour-là , il y eut un agréable supplément au programme… vacances obligeaient. Je m’inclinai un peu plus et effleurai sa bouche du bout du mamelon de mon sein droit, une délicieuse décharge électrique me secoua. La réaction fut quasi instantanée… Son pieu que j’avais empoigné doubla de circonférence et devint si dur que sa température monta sensiblement. Je sentis de fortes palpitations ballotter mon entrejambe. Il m’alluma en constellant mon dos et ma nuque de bisous, après avoir gauchement relevé ma crinière. Ben jeta un fagot au feu en entreprenant de me dorloter le clitoris et de taquiner ma pilosité. Sans ménagement, je me levai doucement et le chevauchai. Pourquoi Diable l’appelait-on supplice du pal ? Les parois de ma petite grotte étaient si trempées que cette trique ardente s’enfonça en moi d’un coup, profondément. Les ondulations de mon bassin et le pilonnage de Ben furent si véloces que je jouis très rapidement, entre râles et cris étouffés. Il se vida en moi quelques secondes après, à coup de « Je t’aime ». Je me laissai échouer sur son torse, tout échevelée, prenant juste le soin de ne pas l’étouffer par ma très longue tignasse qui couvrait son visage. Je faillis m’endormir ainsi, si ce n’était ces réverbérations irrégulières dans mon petit jardin qui me maintinrent éveillée…Après nous être douchés et avoir pris un bon petit déjeuner, nous nous dirigeâmes vers Tanger, pour y passer la journée. Ben trépignait d’envie de jouer au guide. Il faisait très beau, chaud (24°, en mai !) et assez humide pour la saison. La météo était clémente et ne prévoyait pas de rafales de sirocco ni d’un autre vent, provenant de l’Océan Atlantique, aussi violent que le mistral. Pour cette journée, je mis ma robe-chemise fleurie, bariolée de blanc, rose et grenat, avec un boléro blanc et mes Birk rouges, pour encaisser les kilomètres de marche qui nous attendaient. J’avais tellement laissé pousser mes cheveux les dernières années en cessant de me les couper, que je m’asseyais désormais dessus et les portais tressés à la Ioulia Timochenko… Ça avait l’air de ravir Ben qui me bombarda de bisous sur mon cou à ma sortie de la salle de bain, en me remontant délicieusement une longue mèche rebelle derrière mes oreilles, ornées de grosses créoles. Lui avait choisi de faire dans le décontracté pour l’occasion : Sneakers, bermuda en jean, et un maillot du Barça floqué au prénom de notre fils cadet… Le Barça était pour lui comme une revendication identitaire, car il n’avait jamais vraiment suivi la Ligue 1.Ben et moi entrâmes dans une de ces nombreuses boutiques de la rue Siarhine qui proposaient moult articles de l’artisanat local, une odeur de cuir tanné à l’ancienne se faisait sentir à des centaines de mètres à la ronde. J’eus un faible pour des ornements capillaires, soigneusement façonnés en pin… J’en pris quatre, encouragée par les prix imbattables. Je ne résistai guère non plus à l’envie de m’offrir trois paires de sandales en cuir à lanières croisées, ainsi que deux autres pour ma sÅ“ur et ma meilleure amie. La finition était certes rustique, mais le modèle équivalent chez une prestigieuse griffe varoise valait au bas mot le décuple. Le vendeur, un sexagénaire extrêmement poli et serviable, prit le soin de chercher les paires correspondant le mieux à mes pieds difficiles pendant les essayages (je chaussais du 39,5…). Il mettait un point d’honneur à avoir affiché les prix (fixes) de tout son assortiment et à l’avoir entièrement étiqueté. Après qu’il nous eut soigneusement emballé mes emplettes, nous nous apprêtâmes à sortir de cette boutique, quand j’aperçus, savamment mis en avant, un lot de robes de danse du ventre. Ben m’avait précédée : il venait de recevoir un coup de fil. Tant mieux, le hasard faisait bien les choses. Je jetai aussitôt mon dévolu sur un modèle en grenat, composé d’un soutien-gorge orné de sequins et d’une jupe fendue. Mon déclic fut la prestation largement relayée et commentée de cette célèbre chanteuse colombienne aux origines libanaises lors de la cérémonie de clôture de la Coupe du Monde de football en 2006… J’avais commencé à suivre assidûment la chaîne YouTube d’une jeune danseuse magyare, si talentueuse, qui affirmait avoir appris cet art toute seule. Ses pas gracieux et sa maîtrise me rendirent si jalouse que je m’étais dit : « Pourquoi pas moi ? » Je mis à profit mes moments libres pour apprendre secrètement ce sensuel art et m’étais promis d’en faire la révélation à Mon Ben dès que j’en aurais une bonne maîtrise. Il adorait mes « défilés de Victoria’s Secret ». Il aurait droit à un spectacle qui n’aurait rien à envier à celui de Hadise au concours de l’Eurovision de 2009 !Étant tous les deux Férus d’Histoire, le Musée des Civilisations de la Méditerranée, situé dans le vieux quartier d’Alcazaba, était un passage obligé de notre itinéraire. Le long des ruelles qui nous emmenèrent, je revivais les descriptions que fit Sira Quiroga de Tanger dans le roman « El Tiempo Entre Costuras* » que j’avais entièrement lu il y a quelques années. Nous dînâmes aux chandelles dans un pittoresque restaurant près de la place Faro, au centre-ville. Cette place offrait une magnifique vue dégagée du détroit de Gibraltar. Nous fûmes envoûtés par la beauté du coucher de soleil. Il y faisait si beau au crépuscule et la visibilité y était si dégagée que nous pûmes apercevoir ce qui semblait être les phares des automobiles circulant sur les sinueuses routes de Tarifa ! Nous rentrâmes exténués après avoir tant marché, mais la tête (et la caméra Nikon de Ben) pleine d’images. Avant de me jeter dans les bras de Morphée, je m’enfermai dans la salle de bain. J’avais encore une parcelle d’énergie pour essayer mes achats. D’abord, les accessoires capillaires : je n’en revenais pas, ils m’allaient tous à merveille et maintenaient bien ma cascade de boucles. J’avais gardé le meilleur pour la fin : ma nouvelle robe ! Elle me seyait à la perfection. Le décolleté plongeant du bustier mettait joliment en avant ma poitrine. La jupe était gentiment pousse-au-crime, sans bouger, ses fentes révélaient mes jambes jusqu’à la ceinture, insinuant tout sans rien dire. J’esquissai quelques pas pour m’assurer du fait qu’elles ne révélaient rien, aussi frénétiques fussent-ils. J’étais à la fois très étonnée et très fière de cette image de moi de femme épanouie, sans complexes, reflétée dans ce miroir de la salle de bain. Je n’avais plus rien à envier à ces jolies filles qui n’avaient pas peur d’exposer leur physique et leurs émotions. Si l’on m’avait dit un jour que j’arborerais pareille tenue, je ne l’aurais certainement pas cru. Je me mordillai les lèvres de plaisir (et de désir…) en pensant à la tête de Ben quand il me verrait ainsi…Le lendemain fut une journée de dolce farniente. Le resort disposait de nombreuses piscines, dont la principale était aussi longue que profonde. Afin de bien profiter du soleil, nous descendîmes tôt pour prendre notre petit déjeuner. Je mis pour l’occasion mon tankini orange. Benny se fit un plaisir de me tartiner les épaules de crème solaire. J’en fis de même à son dos. Il était déjà plongé dans la lecture du dernier numéro de l’Obs tandis que je lisais un intéressant article sur le « body-langage » à la plage. À neuf heures du matin, la piscine était encore peu peuplée et nous nous jetâmes aussitôt à l’eau, Ben et moi, pour enchaîner les longueurs et les courses, entrecoupées de pudiques câlins et de bisous. L’eau avait un délicieux effet aphrodisiaque. Une demi-heure plus tard, nous nous installâmes sur nos transats. L’ambiance était discrète. Ici, un couple de retraités britanniques quinquagénaires, à en juger par les cheveux rouquins du mari, qui semblait bien plongé dans la lecture de numéro du jour du « Guardian ». Là , un jeune couple marocain, avec un tout petit garçon. La jeune femme, mignonne avec son teint bistre et ses cheveux de jais, portait un maillot une-pièce très glamour, qui n’était pas sans rappeler ceux des pin-up des années cinquante, et s’amusait à apprendre à son bébé à nager tandis que son mari, grand, brun et aux biscoteaux saillants, restait allongé sur son transat, casque vissé sur les oreilles. Un peu plus loin, une jeune fille en bikini rose bonbon à pois blancs bronzait et ne cessait de pianoter sur l’écran de son smartphone à la pomme.Ma lecture, la vision de cette jeune fille qui assume son corps, les souvenirs de notre journée à la Baule réveillèrent en moi l’eau qui dormait. Je me souvins encore du teint apoplectique de ma mère, lors de ce voyage à Hendaye, quand une touriste allemande en string vint demander du feu à mon père ; de sa volonté systématique de me faire porter, à moi, une gamine de moins de dix ans sans relief, un maillot une pièce, alors que toutes mes cousines se contentaient d’une petite culotte, lors de nos vacances au Cap d’Agde ; de son refus catégorique que je les accompagne, devenue adolescente, à cette plage d’Antibes, sous prétexte qu’elle était fréquentée par des culs nus (sic) ; de sa remontrance et du nombre de fois où elle s’était signée, quand elle me surprit à voir une diffusion à la télé de « La Descente Aux Enfers » (avec Sophie Marceau et Claude Brasseur) ; du jour où j’osai lui hurler de me laisser tranquille, quand elle prit rendez-vous chez une clinique de chirurgie plastique, sans mon accord ni mon consentement, pour une opération censée enjoliver mon abdomen, « amoché », selon ses dires, par la cicatrice de brûlure que me laissa ce maudit réchaud à alcool lors de notre séjour à Arcachon… J’avais envie moi aussi de casser ce carcan qui m’enserrait depuis toute petite, de disposer de mon corps comme bon il me semblait, mais je ne savais pas ce qui m’en retenait. Pour ce voyage, j’avais pris soin d’affiner mon ticket de métro. Le maillot que m’avait offert Nina était terriblement sexy, mais son haut était trop petit pour ma poitrine. Je m’en étais donc offert deux nouveaux… Pourquoi m’en priver ? Le premier était du genre push-up en un imprimé animalier doré. Le deuxième était tout blanc, immaculé, mais était infiniment plus affriolant : haut dit triangle et culotte-tanga si échancrée qu’elle était livrée avec un mini paréo. Il m’était malgré tout inimaginable de m’afficher dans l’un des deux en cette piscine. Ben en aurait été tellement ravi, il était certes respectueux, mais l’idée qu’il me dévorât des yeux plutôt que d’autres donzelles n’était pas pour me déplaire… Afin de couper la poire en deux, je jetai mon dévolu sur la piscine exclusivement pour femmes de ce resort, mesure « compensatoire » entreprise par le management qui contrebalance l’interdiction formelle du port du burkini, sujet qui, décidément, fâchait partout où que l’on allât…Il était près de dix heures et demie quand je décidai enfin de sauter le pas. Je fis aussitôt part à Benoît de mon envie. Son visage s’illumina et il acquiesça, avec un bisou appuyé en prime. Il partit illico se changer et passa le reste de la matinée à la salle de sport. Montée à notre mini-suite me changer, j’optai directement pour le maillot blanc. Quand il fallait y aller, il fallait y aller. En me revoyant dans le miroir, je me remémorai son regard gourmand quand je l’appelai me voir, dans la cabine d’essayage de ce magasin de lingerie. Il dut déployer des trésors de retenue pour ne pas me sauter dessus et/ou garder une allure décente. Quelques minutes plus tard, j’y arrivai. J’étais si excitée et si nerveuse que j’avais le front perlé de sueur et des bouffées de chaleur d’une intensité inouïe, avant même de m’exposer au soleil. Ce qu’il était exquis, ce goût de transgresser un interdit ! Bizarrement, il n’y avait pas une âme qui vive. Un écriteau rappelait les différentes règles d’hygiène, de sécurité et de bienséance, notamment l’interdiction du nu intégral. Je franchis le portail, comme si j’eus franchi le check-point Charlie, au seuil duquel se tenait une vigile aux traits fermés, comme pour dissuader un quelconque malotru indiscret. J’étais désormais dans un royaume cent pour cent féminin, poussée par ma soudaine envie de me dévergonder, je m’étais surprise à demander à une employée en uniforme si j’avais le droit me mettre topless. Elle me répondit poliment et professionnellement que je pouvais agir à ma guise et que seul le naturisme était interdit à la suite de plaintes de quelques clientes (sic).Je choisis mon transat, situé au milieu de cette piscine, et m’y installai. Après avoir passé ma tunique par-dessus ma tête, ni une ni deux, je pris mon temps pour dénouer les fins liens du haut. Un mélange de sentiments antagonistes s’empara de moi, mon 90C se délassant avec suffisance et mon fessier luisant presque entièrement au soleil avec cette seule bande de tissu qui ne laissait rien à l’imagination. Cette sensation d’être la fille la plus polissonne du monde. Je m’étais déjà mise à moitié nue devant Nina, mais jamais en public. J’étais trop contente pour continuer à me flageller ainsi et balançai mes craintes en me jetant à l’eau. Une joie immense m’envahit. Des sensations qui m’avaient tant manqué ressuscitaient… Celle de cette délicieuse caresse aquatique sur ma peau ; celle de ne pas sentir un tissu humide me compresser les seins. Avec ma très longue chevelure, je devais ressembler à ces clichés fantasmagoriques de sirènes, il ne me manquait que cette moitié de corps de poisson. Comme un dauphin dans l’eau, je m’appropriai cette piscine et y enchaînai inlassablement les brasses et les crawls. Après une bonne vingtaine de minutes, je sentis un début de crampes musculaires aux jambes. Sortie de l’eau, je constatai que des personnes étaient venues entre-temps. Jadis, j’aurais piqué un sprint vers mon transat et me serais mise immédiatement sur le ventre, mais, mise en confiance par ma hardiesse, je marchai d’un pas sûr et naturel, torsadant mes cheveux comme on essore un marcel mouillé. Pendant que je les relevais en dessus de ma nuque, je ratissai le coin des yeux. Si la majorité des cinq femmes ou filles présentes portait un bikini, j’étais la seule qui eut l’aplomb d’enlever le haut ! Vraisemblablement, ma sortie était tout sauf discrète, à en juger par quelques messes basses, mais je n’en eus cure. Je redressai le dossier du transat et me mis à appliquer d’abondantes noisettes d’huile solaire à faible indice de protection sur mon visage, mes épaules, ma poitrine et mes jambes et entamai la lecture du dernier numéro d’El PaÃs Semanal.J’aurais tant aimé que Mon Ben soit avec moi. L’idée que je pusse bronzer sans le haut le transcendait. Je l’imaginai me dénouer lui-même le nÅ“ud du haut. Ses doigts experts confondraient tartinage de crème solaire avec massage sensuel au ylang-ylang, s’attarderaient exprès sur ma chute de reins… Je lui envoyai un premier autoportrait, la moue boudeuse, les yeux regardant par-dessus mes lunettes de soleil et mes seins couverts par mon bras. Sa réponse ne se fit pas attendre. Trois émojis exprimant la surprise, l’étonnement et la déception. J’en fus pliée de rire. J’en fis un deuxième où j’étais souriante et en prenant soin que mes tétons furent bien visibles. J’étais terriblement ardente quant à l’idée de lui envoyer une photo aussi dénudée de moi. Cette fois-ci, ce fut un torrent d’émojis qu’il envoya, pêle-mêle : étoiles dans les yeux, amoureux, bisous et cÅ“urs, suivis d’un « Ça tombe à pic ! Tant d’efforts sur le tapis de course m’ont donné un petit creux. J’adore les brioches, surtout quand elles viennent de sortir du four. Je suis fou de toi ». Sacré Ben et ses idiotismes culinaires quand il parlait de mon corps…L’ambiance était feutrée, contrastant avec la cacophonie de cris et de clapotis de plongeons de la piscine principale, ce qui n’était pas pour me déplaire. Face à moi, de l’autre côté de la piscine, vinrent s’installer deux jeunes filles que tout semblait opposer. L’une, aux bouclettes frisées brunes, portait un crop-top et un mini-short en jean tandis que l’autre portait un strict foulard et une ample et lourde tunique. Cela dit, quelques minutes plus tard, elle était cheveux au vent et en bikini brésilien qui n’avait rien à envier à celui de sa copine. Elle en resta pudiquement là , tandis que sa copine tomba le haut illico. Vinrent s’installer alors près de moi deux jeunes femmes qui devraient avoir mon âge, accompagnées de leur mère. L’une des deux sÅ“urs était très mince, petite de taille et avait une jolie coupe carrée effilée. L’autre était plus grande, élancée, avec les cheveux qui retombaient sur les épaules et avait des formes plus affirmées que sa sÅ“ur, avec quelques bourrelets qui trahissent une maternité plus ou moins récente. Sitôt arrivées et installées, elles ne tardèrent pas à ôter leurs tops et minishorts, révélant deux jolis maillots bandeau tandis que leur maman portait un élégant, mais discret maillot une-pièce. La ressemblance entre la mère et ses filles est frappante. Elles avaient toutes les trois les cheveux blond vénitien ondulés, un long cou conférant un port altier, un nez aquilin et une constellation de taches de rousseur. Elle devait les avoir eues très jeunes, mais avait su garder une ligne que lui envieraient bien des trentenaires. Un halo de classe et de raffinement se dégageait de cette vénérable dame. Après s’être enduites mutuellement de crème solaire, les deux sÅ“urs se mirent sur le ventre et dégrafèrent le haut. Je poursuivis ma lecture un moment avant de sentir le besoin de me retourner. J’avais du mal à atteindre mon dos. M’ayant aperçue me contorsionner, l’une des deux jeunes blondes, la plus petite de taille, se leva d’un air vif et accourut vers moi, tout sourire.— Holà  ! Le puedo ayudar* ? (Salut ! Puis-je vous aider ?)— Holà , qué tal ? SÃ, se lo agradezco. Soy Francesa. (Salut. Oui, je vous en remercie. Je suis Française.)— Pardonnez-moi. Je vous ai prise pour une Espagnole, quand je vous ai vu lire votre magazine. Donnez-moi le flacon.— C’est gentil à vous. Je m’appelle Madelaine. J’habite à Guingamp et suis venue passer quelques jours à Tanger, avec mon époux.— Ravie de faire votre connaissance. Je m’appelle Hajar. Je suis Marocaine. Mes parents, ma sÅ“ur, et moi sommes venus également passer des jours à Tanger. Je suis de Rabat.— Je suggère que nous nous tutoyons, ce sera plus amical.— Très bien. Bienvenus à Tanger ! J’espère que vous passerez un inoubliable séjour.Son débit de mitraillette et sa voix aiguë n’enlevaient rien à son Français sans accent. Ses mains étaient aussi fines qu’agiles. Elle rejoignit ensuite sa sÅ“ur et sa mère après que j’eus décliné pudiquement sa proposition de me tartiner les jambes dont je m’étais occupée moi-même. Passa un long moment pendant lequel je piquai un somme. Hajar et sa sÅ“ur, Sarah, me proposèrent de les rejoindre pour une partie de Trivial Pursuit. Avant de les rejoindre, je lâchai mes cheveux devenus secs, remballai mes seins et nouai mon mini-paréo autour de ma taille, par respect à leur mère, bien que ses filles n’eussent pas remis leurs hauts et exhibaient leurs mamelons roses le plus naturellement du monde.— Mets-toi à ton aise, Madelaine. Ne sois pas gênée ! me lança-t-elle d’une voix posée, en un Français aussi raffiné que celui de sa fille.Ma confusion était bien visible. Je finis par m’exécuter, sans simagrées, les trois ayant gentiment insisté.— Vous êtes bien gentille, Madame. Je n’avais pas osé, en fait, de mon propre chef.— Ne te gêne pas, ma fille. À partir du moment que nous sommes entre femmes… Laisse-moi te dire que je bronzais comme toi, topless, à Benidorm quand j’avais ton âge (avec un sourire espiègle, mais sans se défaire de ses manières policées).Je restai stupéfaite… Difficile pour moi d’imaginer cette respectable dame, musulmane de surcroît (elle porte un pendentif avec un Coran en or), ainsi accoutrée dans sa jeunesse. Au fur et à mesure des échanges, je sus qu’elle était issue d’une famille aristocratique marocaine d’origine andalouse qui avait subi l’Inquisition au dix-septième siècle et qui s’était installée à Rabat, comme de nombreuses familles morisques. Hajar était consultante chez la filiale marocaine du cabinet d’études marketing où je bossais. Le monde était petit, dites-moi ! Sarah, d’un an son aînée, était pharmacienne. Hajar était célibataire, elle était installée à Casablanca où elle habitait seule tandis que Sarah était mariée et mère d’un garçon âgé de moins d’un an, vivait et avait sa pharmacie à Salé (ville « jumelle » de Rabat, située sur l’autre rive du fleuve Bouregreg).La partie de Trivial Pursuit fut très disputée. Il fallut plusieurs questions décisives pour nous départager, toutes les trois ayant les camemberts remplis des six portions. Je sentis un grand courant de sympathie s’installer entre nous et n’avais guère senti le temps passer, jusqu’à ce qu’un message de mon Ben me demandât de le rejoindre pour que nous déjeunions. Je promis à mes nouvelles connaissances de revenir, après le déjeuner et une éventuelle sieste, et plus si affinités… Auparavant, Sarah, qui avait un certain talent pour la photographie, me prit plusieurs clichés à ma demande. Pour attiser le feu en moi et en mon Ben, je mis un coup de canif à un tabou : me prendre en photo partiellement ou entièrement dénudée, allongée sur le dos sur le transat ; allongée sur le ventre les bras en équerre ; allongée sur le bord de la piscine ; appuyée sur les coudes sur le bord de la piscine, surgissant de l’eau ; faisant la fausse pudique en me couvrant les seins de mes mains ; et exposant mon dos et mon popotin tout en fixant l’objectif par-dessus mon épaule. Je n’avais jamais été très à l’aise pour être prise en photo en petite tenue, voire toute nue, mais je fus subjuguée par le résultat de ce shooting improvisé. — Tu n’as rien à envier aux mannequins de Sports Ilustrated ! me lança Hajar, avec un regard espiègle…En milieu d’après-midi, je me sentis égocentrique à (dé)laisser Benoît et bronzer comme bon il me semblait dans cette piscine 100 % féminine, loin des regards inquisiteurs ou impromptus. Je dus avouer que j’y prenais goût ! Les retrouvailles avec Hajar, Sarah et leurs parents à la piscine principale dissipèrent ma culpabilité. Nous les y avions rejoints et ils furent visiblement contents de faire la connaissance de Ben. Leur père, avec lequel il sympathisa très rapidement, était un professeur universitaire d’archéologie qui dépassait l’âge de la retraite, mais qui continuait à exercer son métier par passion. Il semblait être bien plus âgé que leur maman, sexagénaire grisonnant, mais pas bedonnant, ses cheveux raides, comme gominés, ses yeux gris-vert et son allure athlétique lui donnaient un air de crooner. Entre-temps, j’avais remis mon tankini, ce que Hajar, qui avait remis entre-temps son haut, ne manqua pas de me faire gentiment remarquer. Je ne sus que répondre. Je la jalousais, elle et sa sÅ“ur, d’être en si petite tenue en cette piscine sans s’embarrasser de scrupules ni des qu’on-dirait-on. Assise au bord de la piscine après un plongeon qui ne dura pas plus de cinq minutes, et pendant que ses parents et Ben parlaient passionnément de l’Histoire de Tanger, elle me donna une leçon magistrale, pour la vie.— Je te félicite pour ton courage. Je n’ai jamais encore osé faire pareil ! lançai-je.— Est-ce à cause de ta marque au ventre ?— Oui. C’est la conséquence d’une brûlure causée par un réchaud à alcool quand j’étais toute petite. De plus, j’ai été éduquée dans la pure tradition catholique qui abhorre toute jouissance. Je suis passée un peu à côté de mon adolescence. Je traîne des idées que l’on m’inculqua comme des boulets. J’ai beau vouloir m’en débarrasser, mais elles me rattrapent. Dieu sait ce que Ben a fait et fait pour moi dans ce sens… Parfois, je culpabilise de ne pas me laisser aller. Parfois, j’ai comme l’impression d’être une poupée entre les mains de sa propriétaire…— J’entends parfaitement ta détresse. Écoute, tout ce qui brille n’est pas d’or. Pour nous, ce voyage est tout sauf d’agrément !— Mais pourquoi ?— Ma sÅ“ur et moi donnons peut-être l’image de deux filles de « nantis », nées avec une cuillère d’or dans la bouche, qui vivent comme des jet-setteuses. Mais la réalité est tout autre. Celle qui te parle est aux prises avec un diabète inné de forme sévère. Toute activité sportive m’est proscrite. Et je ne parle même pas de mon régime alimentaire ultrastrict. Tu es une âme saine. Confidence pour confidence : j’ai rompu avec un salaud qui me servait de fiancé, il y a juste deux mois, après quatre années de relation, quand j’ai découvert qu’il m’était infidèle depuis le début, et ce avec une buse qui me sert de cousine !— Le connard ! Et il ose faire ça à une fille comme toi ?— Merci de compatir. Ce n’est pas le plus grave. Je referai ma vie tôt ou tard. C’est l’état de ma grande sÅ“ur qui me chagrine…— Pourquoi ?— Elle est en instance de divorce par contumace. (Les yeux humides, la voix tremblante et le ton grave)— J’ignorai que pareille chose puisse être possible ! — Certaines dispositions des lois marocaines et musulmanes l’autorisent dans certains cas. Et je t’en raconterai le pourquoi du comment. Elle et ce fils de **** s’étaient mariés contre l’avis de nos parents, qui l’ont trouvé, depuis le début de leur relation, pas très net. Sous ses airs de gendre idéal se cachait un goujat sans foi ni loi. Il était alcoolique. Il a promis et juré à Sarah de se soigner. Il ne cessait de rechuter. Il pouvait s’absenter parfois deux nuits de suite et ne lui donnait aucun signe de vie. Grisé par les confortables revenus de son job de VRP en immobilier de haut standing, il s’est mis au jeu et en est vite devenu accro. Pour éponger ses dettes auprès de ses créanciers, qui se sont avérés être des dealers de drogue, avec des accointances avec les cartels mexicains, il a commencé à racketter Sarah, qui ignorait tout de ce micmac. Quand elle découvrit, enfin, le pot aux roses, elle lui coupa les vivres. Le point de non-retour a été atteint quand il eut le culot de débarquer ivre mort dans son officine, lui quémander de l’argent, un couteau de boucher à la main. Elle doit sa vie sauve à l’intervention courageuse de l’agent de sécurité. Il était déjà trop tard. Il s’est tellement pris le doigt dans l’engrenage et avait émis des dizaines de chèques sans provision. Il finit par prendre la poudre d’escampette et de quitter le Maroc. Aux dernières nouvelles, il serait à İstanbul. Il a depuis fait l’objet d’une notice rouge de l’Interpol. On ignore s’il pourrait être extradé et jugé… L’essentiel est que ce cauchemar ait cessé et que ma sÅ“ur ait retrouvé le sommeil, et qu’elle et son fils soient sains et saufs, Louange à Dieu.— Je ne sais pas quoi te dire. Je suis aussi fière de ta confiance en moi que désolée et abasourdie par ce que tu m’as raconté…— Je t’en prie, Maddie, si tu m’autorises à t’appeler ainsi. Chacun d’entre nous a sa boîte de Pandore. La vie n’est point un long fleuve tranquille, pour quiconque. Mais elle ne s’arrête jamais, sauf quand nous passons l’arme à gauche. Autant mourir avec des souvenirs que rongé de remords de ce qu’on ait pu rater ou louper. Le temps qui passe ne reviendra jamais. Donc fait de Carpe Diem ta devise et arrête de te faire du mouron.— C’est-à -dire ?— D’abord, remercie le ciel pour ce que tu as. En d’autres circonstances, j’aurais eu du mal à croire que tu as gardé cette magnifique ligne avec deux grossesses ! De plus, tu es pétillante, bien foutue et en bonne santé. Tu as la chance prodigieuse d’avoir épousé un homme, un vrai, sur qui tu peux compter ; pas un mâle bellâtre et hâbleur. Il est jeune, mignon, cultivé, si bien élevé et surtout, il t’aime follement et n’a d’yeux que pour toi. Je parle en connaissance de cause. J’en ai vu des vertes et pas mûres. Ensuite, fais-toi plaisir, faites-vous plaisir, déchaîne-toi et croque la vie à pleines dents. On ne vit qu’une fois. Et n’oublie pas, concernant ton corps, que si on peut te voir, on ne pourra jamais t’avoir.Je restai assez longuement scotchée, songeuse. Hajar, qui m’expliqua auparavant que son prénom est la version arabisée d’Agar, aurait fait une excellente psychiatre. Ses mots étaient certes directs, secs, mais justes. J’avais bien du mal à absorber le flot de conseils qu’elle me prodigua, de bon cÅ“ur.— Comment pourrai-je te remercier, Hajar ?Elle me serra fort contre elle, me fit un grand bisou et entreprit de tortiller une mèche de mes cheveux. Ses mots étaient si réconfortants que je suis restée blottie contre elle. Enfin, elle lâcha :— En restant mon amie et en me faisant confiance, comme je te fais confiance. Par ailleurs, fais-moi plaisir et dis-moi que vous serez au dîner-spectacle de ce soir ! — Bien sûr. Benoît et moi l’attendons impatiemment ! Le dîner-spectacle en question se tenait dans une gigantesque tente dite « caïdale », grande comme le chapiteau d’un cirque. Nous fûmes gratifiés de deux des mets les plus succulents de la cuisine marocaine : une délicieuse pastilla aux fruits de mer et un méchoui. Pour l’occasion, j’avais choisi d’étrenner un top bleu ciel à col bateau que m’avait offert Ben et un jeans moulant blanc, mariés à une des paires de sandales que j’avais achetées la veille. Du mascara sur les cils et un rouge à lèvres bordeaux du vernis à ongles grenat révéleraient mon teint caramel, perceptible après cette journée de bronzage (quasiment) intégral. Ben avait contemplé mon corps sans marques disgracieuses comme un nouveau jouet déballé le jour de Noël pendant que nous prîmes notre douche. Il n’avait cessé de me peloter les seins, de me dessiner les contours des aréoles et de me titiller les tétons du bout de sa langue. Ses lèvres avaient alors élargi leur champ d’action et avaient ratissé large. Il s’était positionné derrière moi et m’avait attrapé par la taille pour me couvrir de bisous. Sous le jet d’eau tiède, mes forteresses s’étaient rendues les unes après les autres. Avant que cette torride débâcle ne fût complète, je m’étais caressé frénétiquement mon bouton d’amour et avais gémi sans vergogne. La grosse Bertha déjà en place avait alors entamé impitoyablement son pilonnage, sans sommation. Appuyée sur la paroi de la large cabine de douche et cambrée sur le bout des orteils, je n’avais jamais autant apprécié qu’il me prenne ainsi, si profondément. Mes geignements étaient alors devenus de plus en plus saccadés, il avait accéléré la cadence pour exploser en moi en moins d’une minute… Benoît avait proposé de me coiffer pour l’occasion : une natte, qu’il avait commencé et que j’avais terminé, irritée par sa maladresse et ses tirages de cheveux ! Néanmoins, l’intention était louable, tant j’avais tendance à oublier cette coiffe indémodable. Hajar, sa sÅ“ur et ses parents nous avaient réservé des places à leur table. Véritable encyclopédie culinaire, leur maman nous avait expliqué avec force détails les ingrédients, les origines, et même la méthode de cuisson de chacun des plats servis. Après le dîner, commença un spectacle de chants et de danses de troupes folkloriques. Hajar, sa sÅ“ur et ses parents connaissaient les différentes chansons par cÅ“ur, elles se mirent même à danser, avec talent, dus-je reconnaître. Ne comprenant pas l’Arabe, Ben et moi nous contentâmes d’apprécier les mélodies et les sonorités. Son papa avait le sens de rythme et battait la mesure du bout des doigts sur la table. Le clou du spectacle fut le numéro d’une diva de danse orientale, accompagnée d’un percussionniste qui jouait du darbukah. Ses pas étaient sublimés par sa robe violette, très sexy, mais sans aucune vulgarité ni insinuation. J’en étais presque à la jalouser. Le deuxième morceau de darbukah m’était bien connu : je m’étais souvent exercée à son rythme en cachette ! Comme piquée au vif, je pris mon courage à deux mains, me déchaussai, nouai mon léger châle autour de ma taille pour en marquer les mouvements, me levai et me mis à danser. Benoît n’en croyait pas ses yeux. Il n’aurait jamais imaginé son épouse, prude et pudibonde, capable de pareille prouesse. La danseuse s’approcha de notre table, m’aperçut et me tendit la main pour la rejoindre sur scène. En transe, je ne réalisais point ce qui m’entourait. Je pus à peine percevoir les crépitements du flash de la caméra de mon Ben qui me filmait et entendre les acclamations de Hajar et Sarah. La danseuse, magistrale, eut droit à une longue ovation. Elle eut la délicatesse de me prendre la main et de la soulever, comme pour m’adouber, ce qui me valut des applaudissements enthousiastes des spectateurs. Revenue à ma place, Ben, aux anges, m’enlaça fougueusement et m’embrassa passionnément. Mes nouvelles amies ne cessèrent de me féliciter.De retour à notre suite, ce fut un spectacle plus intimiste que je réservai à mon Ben, m’imaginant que mon petit exploit chorégraphique dût lui faire tourner la tête. Quant à moi, j’étais sur un nuage d’extase. De cette tente à notre suite, nous ne cessâmes de nous bécoter, faisant fi de tout ce qui nous entourait. Le monticule qui déforma son pantalon à l’entrejambe ne me laissa aucun doute quant à son état de terrible excitation. Je prétextai un passage à la salle de bain pour me démaquiller, pour aller enfiler ma robe et défaire ma tresse. J’eus la même délicieuse sensation que ce matin à la piscine, quand je déballai mes seins. Dans la précipitation, je faillis endommager le crochet du bustier. À ma sortie de la salle de bain, je retrouvai Benoît se prélassant sur le canapé, avec son boxer pour unique accoutrement. À ma vue, il resta quelques secondes bouche bée, comme ensorcelé, subjugué.— Tu es… Tu es… Magnifique, Maddie.— Tu serais en train de te demander « mais comment as-tu fait ? »— Je me suis offert cette robe hier dans la même boutique d’artisanat où j’ai fait quelques emplettes. Tu étais sorti répondre au téléphone et j’en ai profité.— Et comment as-tu appris à danser comme les Arabes ?— C’est une petite surprise que je te prépare depuis bien des mois, Mon Benoît d’Amour. Le spectacle de ce soir et cette robe, accessoirement, ont accéléré les choses ! Là , je te demande de croiser tes bras et de te tenir correctement. Si tu es sage, tu auras une bonne récompense.Sans lui laisser le temps de réagir, je pris mon smartphone et lançai le premier morceau de ma playlist d’airs de danse orientale, dont je commençais à maîtriser la chorégraphie qui y était associée. Je ne sentais plus mes pieds nus sur le parquet. J’étais comme un papillon qui s’envole dans un bosquet verdoyant. J’avais les yeux verrouillés dans les siens, qui me contemplaient, ébahis, interloqués. La première mélodie était d’un tempo plutôt lent. La seconde était le solo de darbukah. Je reproduisis la même chorégraphie qu’au spectacle. Dans cette robe, le spectacle était bien plus intéressant qu’en top et jeans moulant, aussi sexy qu’ils fussent… À la conclusion, standing ovation de mon Ben qui n’était pas le seul à être debout. Nous fendîmes longuement dans un délicieux bisou. Je ne me souviens plus comment je m’étais retrouvée assise sur ses genoux… j’affectionne tant me retrouver ainsi. Une de ses mains entourait ma taille, l’autre se perdait dans mes cheveux. Ses grands yeux en amandes faisaient l’ascenseur entre mes yeux et mes lolos. Les pans de ma jupe pouvaient facilement révéler que je ne portais pas de culotte. Mes mains le tenaient par le cou. Après m’avoir dorloté les cheveux, il trouva le moyen de me dégrafer le soutien-gorge. Ma poitrine tomba doucement et oscilla comme une pendule. Il plongea dans mes seins, qui fleuraient encore fortement la crème après-bronzage. Soudainement, n’en pouvant plus, il me posa prestement sur le canapé et baissa son boxer. Son gourdin criait famine. Il m’enleva, ou plutôt m’arracha la jupe. Je me retrouvai toute nue, les jambes grandes ouvertes, sans vergogne. Il posa mes jambes sur ses épaules et s’enfonça en moi. Le clapotis de son bassin contre mes hanches et cet angle rendant ses coups de reins si profonds firent qu’il me fit monter au septième ciel en deux temps trois mouvements. Moins d’une minute plus tard, il jouit, lâchant un râle bestial.— Je t’aime tant, ma Maddie d’amour.— Je t’aime à la folie, Mon Ben. Ça t’a fait quoi de te taper une danseuse ?— Je ne me suis pas tapé une danseuse. J’ai fait l’amour à MA danseuse. À ma muse. À ma déesse d’amour.Claqués, nous n’eûmes plus le courage de nous doucher. Je me lovai contre lui et nous dormîmes ainsi, enlacés sur ce canapé, après nous être sommairement essuyés…Le lendemain fut notre dernière journée dans ce resort. Enhardie, je délaissai le tankini pour mon maillot à l’imprimé animalier. Après le petit déjeuner : direction la piscine principale, bien moins peuplée que la veille. Comme c’était un lundi, la majorité des vacanciers locaux s’apprêtaient à quitter les lieux dans la mi-journée. Je ne sentis pas de gêne en ôtant ma petite robe et en me retrouvant en ce joli deux-pièces, certes un peu plus couvrant que ce mythique bikini blanc, mais non moins sexy, avec sa culotte aux nÅ“uds sur les hanches. Après un bon plongeon avec mon Ben, après des bisous chastes dans l’eau, des batailles de chatouillis et des tendres câlins, nous retrouvâmes nos transats. Je relevai mes cheveux en chignon et me mis sur le ventre sur le transat. Benoît assouvit son mini-fantasme et le mien, aussi. Il attendit toute une vie pour pouvoir m’étendre de la crème solaire sur mes épaules nues, il prit donc un malin plaisir à ouvrir le crochet des soutifs afin de mieux me tartiner le dos. Je ne m’opposai pas à ce qu’il m’en couvrît les jambes de la commissure de mes fesses aux talons. Il conclut ce mini-massage érotique par un bisou appuyé sur mon dos. Quelques minutes plus tard, Hajar et Sarah nous rejoignirent sans leurs parents, partis faire une excursion dans l’arrière-pays. En me faisant la bise, je vis s’esquisser sur leurs lèvres un petit sourire complice. Elles se mirent à bronzer, sur le ventre. Près d’une demi-heure plus tard, Hajar m’envoya un message :— Nous irons à la piscine pour femmes, car nous voulons nous y mettre à notre aise. Veux-tu nous rejoindre ? Nous n’avons pas osé te le demander directement, par respect à ton mari.— Volontiers ! Pas de soucis, au contraire. Je vous rejoins.En me voyant refermer le haut et nouer mon paréo, Ben comprit mes intentions et me fit un clin d’œil complice qui valait tous les discours. En guise de remerciement, je lui fis un fougueux bisou. Arrivée sur place, les filles étaient assises sur le bord de la piscine, déserte, ce matin-là , jouant avec leurs pieds dans l’eau. Je les rejoignis, après avoir dénudé ma poitrine, comme elles. Sarah engagea la discussion.— Tu caches bien ton jeu, Madelaine ! Tu étais juste éblouissante hier. Bravo !Hajar renchérit :— Je suis fière de toi. J’étais si contente de te voir sur scène. J’ai découvert une autre Maddie, sûre d’elle, qui croque la vie à pleines dents et qui, quand il le faut, se fie à son intuition.— Quelle divine inspiration que nous avons eue de venir passer ces vacances ici ! Je n’aurais pu rêver de faire une rencontre aussi incroyable. Amies pour la vie ?— Pour la vie, oui, Maddie.Elle se blottit contre moi. Derrière cette battante, directe et au franc-parler, se cachait une fille sensible, fragile et câline. Je me sentis comme réconfortée, libérée d’un joug. Elle se leva et s’assit derrière moi. Elle me retira adroitement ma barrette et défit mon chignon. Après m’avoir peigné les cheveux, elle entreprit de me faire deux jolies nattes, aidée par Sarah (J’adorais coiffer ainsi ma poupée Raiponce, dit-elle). En me regardant dans le miroir qu’elles me tendirent, j’avais l’air d’une squaw sortie tout droit d’un album de Yakari, mais je m’aimais bien ainsi. Hajar et moi parlâmes boulot pendant quelques minutes, quand elle reçut en pleine figure… la culotte de sa sÅ“ur qui l’avait enlevée et la lui avait balancée pour nager dans son simple appareil !— Chiche que tu fasses pareil !— Tu verras !Hajar piqua une tête et attendit d’atteindre le milieu du bassin pour ôter le bas. Elle le noua autour de son poignet et continua à nager ainsi, en tenue d’Ève.— Maddie, c’est à toi, ne fais pas ta chochotte ! s’exclamèrent-elles à l’unisson.J’avais bien plus peur d’un inutile appel à l’ordre que de faire le zouave. Mais pour ne pas passer pour une froussarde, je me mis à poil dans l’eau, sous les sifflets d’admiration des deux sÅ“urs. Si on m’avait dit que j’allais retrouver cette délicieuse sensation de flotter, de faire corps avec l’eau, ici, à Tanger, je ne l’aurais pas cru ! Cela dit, mon moment de bonheur ne dura pas autant qu’à la Baule et je remis ma culotte en moins de cinq minutes. En dépit d’une petite gêne initiale, je m’étais sentie enchantée de partager cette baignade avec ces filles que je ne connaissais guère il y a septante-deux heures. Alertés par nos cris et rires bruyants, les vigiles faillirent nous prendre en flagrant délit d’exhibitionnisme. Sarah finissait à peine de nouer les ficelles de son slip quand la ventripotente préposée à l’ordre faisait sa tournée d’inspection. Nous fîmes un effort surhumain pour ne pas pouffer. Dès qu’elle s’éloigna, nous en rîmes jusqu’aux larmes… Des larmes, nous en versâmes abondamment quand vint l’heure des au revoir. Sarah ne manqua pas d’immortaliser cette mémorable journée, un selfie nous montra toutes trois tout sourire, laissant planer le doute sur notre semi-nudité partielle. Sur un autre cliché, joliment cadré, nous étions elle et moi bras dessus, bras dessous, de dos, regardant l’objectif par-dessus l’épaule.Avant de refaire nos valises, je voulus conclure comme il se doit cette escapade tangéroise. Revenus à notre suite, Ben et moi, après une longue baignade, je fis exprès de traîner avec juste une barrette dans mes cheveux, et rien de plus… ce qui n’était pas tout à fait mon habitude. Je voulais montrer mon bronzage intense, sans traces de maillot et accessoirement, faire monter un peu la température… Benoît m’emboîta le pas et était bien en forme depuis le matin et ma mini-exhibition à la piscine. Je jouai la fausse ingénue.— Est-ce que je te plais ainsi, mon nounours ?— Tu en doutes, ma petite muse ? Tu es juste à croquer toute crue. Je commencerai par tes adorables pieds, je dévorerai ensuite tes lolos et je m’empiffrerai de ce postérieur merveilleux.— Tiens, en parlant de muse, je te suggère un jeu très rigolo. Jouons à une espèce de Trivial Poursuit ! Si tu réponds correctement à mes quatre questions, je serai ton esclave, tu feras de moi ce que tu veux…— Et sur quoi porteront les questions ?— Sur la peinture, pardi ! Ne suis-je pas ta muse, mon chaton ? Ce ne seront pas des questions, à proprement parler. J’imiterai des toiles de maître célèbres et ce sera à toi de les identifier. Allons-y !De mes études en communication publicitaire, j’avais gardé une grosse passion (inavouée) pour le nu artistique. Benoît en connaissait un bout. C’était parmi les éléments qui nous avaient rapprochés aux balbutiements de notre relation.Pour planter le décor, je commençai par me poser sur le canapé, que j’avais couvert d’un drap, lui tournant le dos et le regardant lascivement dans les yeux, mes cheveux relevés et rassemblés dans mon châle léger. Sa réponse fusa :— La Grande Odalisque, par Jean-Auguste-Dominique Ingres.— Bravo mon biquet. Tu gagnes ta première portion !Pour la deuxième question, je ramenai le tapis de bain qui avait la forme d’un grand coquillage et me mis debout dessus. Je fis semblant de tenter de cacher mon buisson par mes cheveux.— La Naissance de Venus, Botticelli.— Deuxième portion ! Fais gaffe, ça va devenir plus corsé, au propre comme au figuré.Canapé couvert du drap blanc, je m’allongeai simplement, les pieds pudiquement accolés et mes mains jointes derrière ma tête.— La Maja Nue, Francisco de Goya. Mais pour qui tu me prends ?— Pour un lubrique qui passe son temps à se rincer les yeux sur des toiles de maître, avec de jolies filles dénudées dessus, sous prétexte de t’en inspirer pour tes propres fantasmes. Tu parles ! Cela étant, tu assures… Troisième portion ! Pour cette quatrième et dernière question, tu risques de sécher.Je ramenai un tabouret de la chambre à coucher et le posai devant un des miroirs de la réception. Je nouai le drap autour de ma taille, remis mes petites créoles en or et nouai mes cheveux en chignon. Il se tut pendant quelques secondes, avant de lancer, incertain :— Femme se coiffant devant le Miroir, par Eckersberg ?— Quatre sur quatre ! Bravo mon Ben. Je suis toute à toi !— Reste où tu es, comme tu es. Tout simplement.Il vint se positionner derrière moi. Ma tignasse relevée lui laissa le champ libre pour tapisser mon cou, ma nuque, le contour de mes oreilles et mon dos de baisers qui me mirent le feu partout. Il m’arracha un terrible orgasme en titillant mon clito du bout de ses doigts. Je sentis ma fente dégouliner de cyprine et les palpitations y furent agréablement insupportables. Je n’avais jamais senti son membre viril aussi dur. Je crus presque qu’il n’allait pas pouvoir me pénétrer. Il me demanda délicatement de me pencher et de me tenir sur le bout des orteils pour me prendre. Je lui présentai ainsi mes fesses et m’appuyai sur le mur, face à ce miroir. Ce bâton de chair ignée se présenta ainsi au portail et entra sans sonner. Ce fut si agréable de s’admirer faire l’amour dans un miroir. Me tenant tendrement par ma taille, son action fit cahoter ma poitrine. Sans que je le lui dise, il sentit un début de contraction dans mes jambes et accéléra illico presto le rythme. Ce qui devait arriver arriva… À croire qu’il renouvelait son stock à vitesse grand V. Je mis de longues minutes à m’essuyer et me rincer… Ce ne fut qu’après avoir rangé nos valises pour le départ prévu le lendemain que nous nous offrîmes un bon bain relaxant, si relaxant et si tiède que nous faillîmes nous y endormir, entrelacés…Le lendemain, le long du vol de retour vers Beauvais, je ne cessais de repasser le film de ces vacances… 100 % de réussite. J’étais assoiffée de sensations fortes et j’en eus bien plus que ce que j’avais pronostiqué.À notre retour, je rejoignis une petite troupe de danse orientale, menée par une danseuse professionnelle franco-kosovare. Je n’oublierai jamais le regard fier et passionné de Mon Ben le soir de notre spectacle de fin de saison, lors de mon solo, pour lequel je portai spécialement cette mythique robe grenat, ni celui de mes parents et beaux-parents, quand je leur fis la surprise d’un petit spectacle privé, lors du repas de Noël qui suivit…J’avais définitivement tordu le cou à cette fille prude et pudibonde que j’étais. J’avais définitivement ôté le joug à la femme en moi, pour mon plus grand bonheur, celui de Mon Ben et celui de notre couple…Cause every time we touch,I feel this static,And every time we kiss,I reach for the sky,Can’t you hear my heart beat so,I can’t let you go,Want you in my life…******** « Everytime We Touch », extrait de l’album « Echoes » de Maggie Reilly, paru en 1992 * roman de MarÃa Dueñas traduit en Français sous le titre « L’espionne de Tanger »* Espagnol castillan scolaire