Une bière devant lui, Thérée⁽¹⁾ patientait, assis à la terrasse de la brasserie. Il manipulait fébrilement son téléphone, observant les badauds flâner dans cette rue piétonne ou faire du lèche-vitrine en cette belle et chaude fin d’après-midi.De temps à autre, il jetait un œil sur son écran où un plan détaillé du quartier s’affichait. On y déchiffrait le nom des rues et même des échoppes. Un petit point bleu indiquait sa position sur la place du Marché aux fleurs, sur la terrasse de la brasserie des Iris, il espérait et redoutait en même temps l’apparition d’un petit point rose, près de son propre « point bleu » surmonté de son pseudo, Thérée.Qu’est-ce que je fous ici ? ne cessait-il de se répéter.Il pratiquait cette activité pour la première fois. Le pseudo Érato l’avait agréablement intrigué. Rencontrer sur ce site une personne connaissant la Muse de la poésie lyrique et érotique ne pouvait que l’émoustiller.Il lui semblait cependant que toutes les personnes présentes sur la place connaissaient la raison de sa présence et le dévisageaient, le cataloguaient comme un gros pervers.Le jeune homme regardait une énième fois son appareil lorsque ce dernier émit un petit bip ; son cœur battit plus vite, ses mains devinrent moites quand il vit le petit point rose apparaître dans un angle surmonté d’un petit « Érato ».~o~Elle marchait vers la place en serrant les fesses.Jamais je n’aurais dû accepter cette folie ! se répétait-elle en boucle.En même temps, une pointe d’excitation la tenaillait. Elle frémissait de rencontrer Thérée le centaure, car déjà connaître le nom des centaures dénotait un personnage cultivé, mais la réputation de la taille des attributs sexuels des centaures n’était plus à faire et la mettait dans tous ses états.Ses yeux noisette pailletés d’émeraude allaient de son écran à la rue autour d’elle, son smartphone émit un petit bip, le petit point bleu nommé Thérée se matérialisa dans un angle.Trop tard pour faire machine arrière.Elle scruta les alentours. Si elle devait en croire son appareil, il se trouvait à la terrasse de la brasserie, juste là devant elle.Ça y est, je le vois.Un type, le téléphone dans la dextre la regardait approcher. Elle fit un petit signe de la main.Je dois avoir l’air d’une conne.~o~Grande brune élancée, vêtue d’un élégant tailleur gris dont la jupe crayon qui s’arrêtait sous les genoux lui faisait faire de petits pas.Sa vêture, son maquillage discret, une paire de lunettes de vue à montures métalliques ainsi qu’un chignon sur l’arrière de la tête lui donnait l’apparence sévère d’une institutrice des années soixante.Elle doit avoir trente ans, tout au plus ! Il se leva et lui présenta élégamment une chaise. Elle le remercia d’un joli sourire.— Érato⁽²⁾, je suppose ?— En effet, vous devez être Thérée.— Lui-même, vous prenez une boisson ?— Merci, un Noilly-Prat.Il commanda et ils échangèrent quelques mots en attendant la boisson, tout en se dévisageant.— Je ne sais trop quoi dire, c’est la première fois que je participe à un tel rendez-vous.Il est plutôt mignon, le nez un peu fort ; de jolis yeux, des lèvres gourmandes. Il doit avoir mon âge.Ils dégustèrent leur breuvage en silence, un peu gênés.— Peut-être devrions-nous…— J’allais vous le proposer… J’ai réservé une chambre à l’hôtel… là-bas… Ils peinaient à terminer leurs phrases.Ils s’en allèrent, côte à côte, il n’osait cependant lui prendre la main ou le bras. Plus vite terminé, plus vite libérée, se disait-elle.Arrivés dans la chambre, ils se déshabillèrent aussitôt, face à face. Bien qu’intimidés, il ne fallait surtout pas hésiter dans ce genre de situation.À sa grande surprise, elle se promenait nue sous sa tenue stricte : l’institutrice sévère se révélait en réalité une chaude caldera.Il découvrit deux jolis petits seins aux tétons sombres et déjà érigés, une toison brune et soigneusement taillée, de belles hanches voluptueuses sous une taille fine. Elle dénoua son chignon, ses cheveux lui balayant les reins tandis qu’elle secouait sensuellement la tête.De son côté, elle remarqua les tablettes de chocolat sur l’abdomen, les pectoraux et les biceps saillants, et surtout un bel organe en pleine forme, quelque peu au-dessus de la moyenne.Je lui fais de l’effet, au beau centaure !Sans un mot, elle s’allongea sur le lit et écarta obligeamment les jambes.Il enfouit le nez dans la fourrure brune. Muscade, mandarine, décela-t-il, elle se parfume le paillasson des délices.Il passa la langue sur les escalopes à crinières, entraînant un gros soupir de la jeune femme. Les lèvres s’ouvrirent, il caressa les cuisses, les fesses. Il embrassa le pli de l’aine, la faisant frémir. Des deux pouces, il écarta la délicate cicatrice, laissant le libre accès à ses caresses buccales. Son grand-père ne cessait de lui répéter qu’il fallait toujours tourner au moins sept fois sa langue autour d’un clitoris avant de dire et surtout faire des bêtises.Elle lui maintint la tête et le guida au gré de ses désirs, autant pour le remercier que pour l’encourager.Thérée captura les seins et fit rouler les tétins tendus entre ses doigts, Érato émit la plus belle des mélodies sous l’action conjuguée des doigts et de la langue de l’homme. Elle pressa son ventre contre la bouche qui lui pratiquait cette délicieuse torture, elle ondulait tel un ruban de soie dans le vent.Parachevant son œuvre, il introduisit son majeur et son index dans le conduit inondé, caressant les tendres parois, saisit entre ses lèvres le petit bourgeon décalotté. Le plaisir la balaya à la façon d’un mascaret.Elle reprit petit à petit ses esprits et sentait toujours les doigts de l’homme en elle. Il lui embrassait les seins, léchait les framboises tendues. Elle le repoussa, chercha dans son sac un préservatif et l’enfila sur la verge du centaure bandée comme un arc.Elle s’installa à quatre pattes sur le lit et dit :— Viens, prends-moi fort !La jolie fleur dégoulinante qui béait devant ses yeux attirait sa queue comme une rose attirait une abeille.— Vos désirs sont des ordres.Il fit glisser plusieurs fois son gland sur les lèvres, puis, tel un soudard, la pénétra jusqu’à heurter son pubis contre le fessier joufflu.— Hô, nom de nom, que c’est bon ! gémit la muse.Il attendit quelques secondes, goûtant le plaisir d’être aux tréfonds de ce doux ventre.— Vas-y, ramone-moi la chaudière, rugit-elle, oubliant toute poésie.— Madame est servie !Il entama un va-et-vient frénétique, sortant presque entièrement son sexe pour le réintroduire aussitôt, le plus loin possible. Il la tenait par les hanches, la secouait, lui écartait les fesses pour mieux voir son œil de bronze.— Pas par-là, le prévint-elle.— Je sais, j’ai tout de même le droit d’admirer le paysage.De temps à autre, il faisait de courtes et rapides allées et venues à l’entrée du pertuis, là où il savait se trouver de nombreuses et délicates terminaisons nerveuses, puis pénétrait de nouveau et profondément le ventre offert.— Oui, encore, encore, feula-t-elle.Quelques secondes, il la pensa Khmère, tant il crut l’entendre crier « Angkor ». Il la sentait se crisper, se resserrer autour de son pilon, elle enfouit son visage dans l’oreiller, le mordit et hurla son plaisir.Quelques secondes plus tard, il remplissait le condom de sa semence et s’abattit sur le dos de sa muse.— Putain, le pied ! tel fut le commentaire d’Érato.Étendus côte à côte, les deux amants reprenaient leur souffle.Elle essuya d’un revers de main la transpiration qui coulait dans ses yeux. Il lui caressa le visage, la poitrine, captura un téton et le fit rouler entre le pouce et l’index.Elle le regarda dans les yeux, lui fit un joli sourire et retira le préservatif.— Tu permets, demanda-t-elle en passant un linge humide sur le sexe qui se repliait dans sa fourrure.Aussitôt la vipère de caleçon nettoyée et bouchonnée, elle emboucha l’animal qui reprit vigueur. La jolie muse avala la bête presque en entier, elle creusait les joues et aspirait alors qu’il se trouvait au fond de sa gorge. Elle fit ressortir presque entièrement l’objet de sa convoitise, passant la langue sur le gland, sur sa couronne, goba les testicules, passa un doigt sur le périnée. De temps à autre, elle lâchait le sexe pour prendre entre ses lèvres les tétons de l’homme, histoire de rendre plus intense sa caresse lorsqu’elle le reprenait en bouche.Soumis à ce traitement, le centaure ne résista guère. Elle sentit le membre se tendre encore plus, palpiter entre ses mains, regarda le geyser jaillir et se perdre sur les draps tandis qu’il hennissait.Érato pressa l’organe, cherchant à en extraire la moindre goutte.Thérée hésitait entre félicité et abattement, omne animal triste post coïtum, praeter gallum mulieremque radotait Gallien de Pergame. Ce bon Gallien avait dû lui aussi connaître charnellement Érato (sans parler des gallinacés).Allongé là, vidé et essoré, il se sentait flagada. La jolie muse semblait au contraire au mieux de sa forme.— Ça n’a pas l’air d’aller ? se renseigna la beauté, attentionnée.— Tu m’as épongé. Je suis sur les rotules.— J’ai ce qu’il te faut, annonça-t-elle avec un grand sourire.Elle sortit de son sac des canettes de boisson énergisante, des barres de céréales vitaminées, des machins au gingembre et du chocolat au yohimbé et au muira puama.— Avec ça tu vas péter le feu et finir la nuit en beauté.Après un court moment de repos, le petit en-cas faisant son effet, ils se réveillèrent frais et dispos. Une petite séance de câlins remit le mandrin en forme. Une gâterie au bâton de maréchal, puis après avoir habillé une nouvelle fois l’asperge de couette d’une pèlerine, elle chevaucha son compagnon et s’empala jusqu’au plus profond de sa fleur. Il prit en main les seins qui s’agitaient devant lui, les malaxant avec tendresse.Pour terminer la soirée, ils essayèrent un 69 où elle consentit à le garder en bouche jusqu’à l’explosion finale, recrachant discrètement la provende dans un mouchoir en papier. Elle prit une nouvelle fois son pied, Thérée n’ayant pas son pareil pour amignoter un clito. Après un passage au cabinet de toilette, ils se firent la bise et se quittèrent satisfaits, ne devant plus jamais se revoir, selon les termes du contrat.~o~Érato alluma son téléphone, se connecta au site Uncoupd1soiR, entra son pseudo et son mot de passe puis nota sa rencontre avec le dénommé Thérée.Elle lui attribua la moyenne générale de 19,99/20, elle ajouta quelques appréciations sur les performances et qualités de son comparse d’une nuit. 19,99, car la perfection n’est pas de ce monde⁽³⁾, mais son compagnon s’en approchait.De retour chez lui, l’homme alla sur son compte Uncoupd1soiR pour noter sa partenaire éphémère, 20/20. Il vit qu’elle venait de faire la même chose à l’encontre de Thérée.Ces évaluations devaient servir à de potentiels futurs partenaires. Les personnages jugés trop perturbés, inquiétants ou violents se faisaient exclure du site.Ucoupd1soiR, un site de rencontre sur internet, très particulier, créé par de jeunes informaticiens qui rejetaient les applications classiques, celles qui vous proposaient de rencontrer l’âme sœur, l’amour avec un grand A, mais dont les utilisateurs ne cherchaient qu’à tirer un coup sous couvert de romantisme.Ici, point de fioritures, un homme et une femme se retrouvaient en un lieu prédéfini, pour une nuit de sexe torride, puis se séparaient sans autre forme de procès.Les clients créaient leur compte contre une modique contribution, y définissaient leur profil, leurs préférences et choisissaient un pseudo, contactaient la personne sélectionnée et laissaient faire la technologie.Les créateurs du site songèrent un temps à le nommer QueduQ, mais trouvèrent que cela faisait relativement vulgaire, et optèrent pour Uncoupd1soiR.~o~— Joséphine, il faut absolument faire quelque chose.La jeune femme blonde qui vient d’interpeller son amie semble hors d’elle.— Qu’est-ce qui se passe encore ? questionne Joséphine.— Encore des fuites sur des robinets, des carrelages de faïence qui se décollent dans le spa, et les abattants des toilettes qui se barrent.— On va appeler l’installateur.— Il viendra dans deux mois cet escroc, s’il vient !— Demande à Noémie de nous rejoindre, réunion au sommet. Alerte Rouge.Trois jeunes femmes tiennent un véritable conseil de guerre dans leur bureau commun. Les trois amies viennent de réaliser leur rêve, diriger leur institut de beauté, comprenant un salon de coiffure, d’esthétique, onglerie et soins du corps.Elles ont profité d’une occasion exceptionnelle, les anciens propriétaires cédant leur affaire pour un prix intéressant. Elles y firent passer toutefois la totalité de leurs économies, un prêt bancaire complétant le financement pour acheter et remettre le local aux normes de sécurité et sanitaires.Le salon nommé Corps de rêves qui grâce à un bouche-à-oreille favorable ne désemplit pas.Joséphine la brune, Suzy la blonde et Noémie la rousse dirigent une petite troupe d’une dizaine d’employées dans la joie et la bonne humeur, elles aussi mettent la main à la pâte, Joséphine est esthéticienne, Suzy coiffeuse, Noémie, la troisième, masseuse bien-être, elles ne rechignent pas à la tâche, ne comptent pas leurs heures.En cette fin d’après-midi, la bonne humeur ne règne pas, bien au contraire. L’entrepreneur engagé pour remettre l’installation aux normes a fait un travail de cochon et maintenant il se fait tirer l’oreille pour venir réparer ses bévues.— J’ai appelé l’assurance, commence Suzy. Ils nous envoient un expert cet après-midi, nous aurons certainement gain de cause… ce branleur sera condamné à nous dédommager, mais pendant ce temps, notre rêve part en eau de boudin, nous allons perdre de la clientèle, mais Môssieur refuse de revenir travailler chez nous.— Faut chercher un autre artisan, suggère Joséphine.— … qui nous posera les mêmes problèmes ? intervient Noémie.— Que proposes-tu alors ? s’énerve la brune.— Embaucher un ouvrier, rien qu’à nous, rien que pour nous, j’ai fait les calculs, nous devrions nous y retrouver.— Faudrait qu’il sache tout faire ! Plomberie, électricité… que sais-je encore ?— Ça peut se trouver. Nous allons publier des annonces et faire passer des entretiens d’embauche.Opération réussie, car une semaine plus tard, une cinquantaine de gars font le pied de grue dans l’entrée.Presque huit heures plus tard, harassées et abattues, elles reçoivent le dernier des candidats. Elles ont passé la journée à écouter, observer et débouter les postulants les uns après les autres. Des hommes se trouvent là parce qu’ils recherchent du travail même s’ils n’ont pas les qualifications requises, d’autres attirés par le fait de travailler dans un univers uniquement féminin (un seul mot d’ordre, « pas de loup dans la bergerie »). Il est presque dix-huit heures, elles ont faim et envie de tout envoyer bouler, mais vont quand même écouter le dernier candidat.Elles éclatent de rire en relevant son prénom.— Gontran… ! Le malheureux, avec un prénom pareil, il doit ne pas rigoler tous les jours.~o~Cela fait presque une journée entière qu’il poireaute dans le hall d’entrée transformé en salle d’attente. Heureusement qu’il avait songé à se confectionner un sandwich jambon/beurre chez lui avant de partir, le tout accompagné d’un thermos de café et d’une bouteille d’eau sinon il crevait de faim et de soif.Debout à cinq heures, départ à six après douche et petit-déjeuner pour arriver à neuf heures à son rendez-vous. Trois heures pour faire deux cent cinquante kilomètres dans son antique 4×4 frôlaient l’exploit. Il ne s’attendait cependant pas à ce qu’il y ait tant de candidats pour ce poste. En venant faire acte de présence à son agence Pôle Emploi, il s’était intéressé à cette étrange annonce, sitôt refroidi par madame Fougnard, sa conseillère.— Vous n’y pensez pas, faire près de trois heures de route pour ce travail bizarre, vous avez mieux à faire ici.Il s’était abstenu de lui demander quoi, mais avait tout de même noté les coordonnées et appris par cœur la petite publication :Cherche homme habile, astucieux et compétent pour assumer la charge d’agent d’entretien dans l’institut Corps de Rêve, salon de beauté, coiffure, soins du corps.Compétences requises : électricité, plomberie, maçonnerie, peinture, menuiserie, permis de conduire nécessaire.Salaire : selon la législation, trente-cinq heures hebdomadaires.Tenue correcte exigée.Maintenant, il attend.Maintenant, il va crever d’ennui.Il a observé les cinquante-deux autres candidats, des petits, des grands, des vieux, des jeunes, des tatoués, des aux crânes rasés, des aux cheveux longs, des blonds, des bruns, des crépus, de toutes couleurs de peau diverses et variées, des baraqués et des fluets.Il a envoyé son CV par courriel, a reçu confirmation de son inscription, mais le passage devant le comité de sélection se fait par ordre alphabétique. Il se nomme Yciel, Gontran Yciel, il va passer bon dernier. Il se fait une raison, il va attendre, il n’a pas fait deux cent cinquante bornes pour des prunes.Pour passer le temps, il lit le dernier tome des mémoires d’un ancien président livreur de pizza.Attente rythmée par les apparitions d’une jolie blonde qui vient chercher le suivant. Amusé aussi par les regards des types qui reluquent le valseur rebondi de la belle, qui oscille au fil des pas tel un métronome hypnotique. Il n’a jamais vu un postérieur remuer de cette façon, soit l’élastique de son string vient de péter, ou alors elle a des hémorroïdes ! bref, il se distrait comme il peut.Dix-sept heures trente, son tour arrive, fin du calvaire et certainement une énième déception.— Monsieur Yciel ? Désolées de vous avoir fait attendre.~o~— Gontran ! pouffent les trois amies, ça fait très dix-neuvième siècle, déjà avec un prénom pareil tu pars avec un handicap.— Soyons, sérieuses, un peu de compassion, s’il vous plaît.Un bel homme un peu timide entre et marque un temps d’arrêt en voyant les trois charmantes jeunes femmes se marrer.La dénommée Joséphine s’étouffe et ne se marre plus.Bordel de merde, Thérée !Lui de son côté se dit :Érato ! J’ai compris, pas la peine d’insister, je me casse, c’est râpé pour ce boulot. J’aurais dû écouter madame Fougnard, ma conseillère Paul Emploi, faudrait toujours écouter madame Fougnard.— Mesdemoiselles, navré de vous avoir dérangées. Ça ne va pas le faire…— Désolées, restez, disent Noémie et Suzy, se méprenant sur sa gêne, alors que Joséphine se cache derrière une feuille de papier.— Quelles sont vos capacités ? demande Noémie en reprenant son sérieux.Des capacités, je peux t’en donner plusieurs de ses capacités, et non des moindres, songe Joséphine.— J’ai une licence de lettres modernes, avec comme résultat que des petits boulots, j’ai galéré et accumulé des stages de formation avec diplômes à la clef, électricité, informatique, maçonnerie, carreleur, plomberie, même espaces verts, pâtisserie et comptabilité. Dans mon dossier, vous trouverez mes diplômes ou équivalences obtenus.Tout en s’expliquant, il évite de croiser le regard de la jolie brune. C’est bien sa veine, faire deux cent cinquante bornes pour trouver du boulot et tomber sur cette bonne femme. Saloperie de site de cul à la con !Les trois femmes se concertent en murmurant.— Que faisons-nous ? Je suis crevée, moi, dit Suzy.— On va pas y passer le mois, il nous faut absolument un employé pour ce job, et celui-là me semble le plus qualifié de tous ceux que nous avons vus. Distingué, élégant, poli sans être obséquieux, il est parfait.— Vous croyez ? tempère Joséphine.— Oui, affirme Noémie, en plus il est mignon.— Nous pourrions encore réfléchir…— Arrête de faire la rabat-joie, deux voix contre une, on l’embauche !— Bienvenue à Corps de rêve monsieur Yciel, s’entend dire un Gontran tout étonné, mais ravi.Après avoir signé moult documents et en avoir fourni des tas d’autres, un Gontran ébahi se voit pourvu d’un contrat de travail, il sera titularisé si tout se passe bien au terme de deux mois d’essai. La situation catastrophique du salon fait qu’il doit commencer tout de suite et même avant. Cerise sur le gâteau, le bâtiment dispose d’un petit studio dans lequel Gontran pourra loger, en attendant de trouver mieux en ville. Le week-end prochain, il remontera chez lui récupérer ses maigres possessions.Joséphine l’emmène discrètement à l’écart pour clarifier la situation.— Nous nous retrouvons dans de bien étranges circonstances, monsieur… Thérée.— Vous m’en voyez désolé, si ça vous arrange je peux refuser ce travail, bien que…Il dit cela avec un pauvre sourire— Vous avez vraiment besoin de ce boulot… Joséphine ne pose pas une question, mais constate.— Oui, je…— C’est bon, mais surtout ne parlez pas de notre rencontre !— Pour qui me prenez-vous ? répond-il, offusqué.— Je ne voudrais pas que mes amies sachent comment nous nous sommes connus, elles m’ont inscrite sur ce site en guise de cadeau d’anniversaire, j’ai toujours dit que je ne l’avais jamais utilisé. D’ailleurs, vous avez été le seul.— Vous aussi, vous êtes restée ma seule et unique expérience.Sa présence sur Uncoupd1soiR n’étant qu’une blague de ses copains, pour, paraît-il, lui changer les idées.~o~Le lendemain, Gontran arrive au boulot, fait le tour du bâtiment et relève toutes les anomalies en compagnie de ses patronnes, note des références et répare ce qu’il peut réparer de suite ou remet en état temporairement avant les réparations définitives.Elles lui ont aménagé un vestiaire pour qu’il se change et se douche en toute tranquillité, selon le Code du travail et l’article R4228-5 sur les entreprises à personnel mixte, même s’il loge presque sur son lieu de travail.— Je l’ai vu, je l’ai vu !Suzy trépigne sur place, à la limite de la crise de nerfs, elle est rouge pivoine et hyper ventile.— Calme-toi, respire et raconte, qu’as-tu vu ? Joséphine tente de maîtriser sa collègue et amie. Tu as vu une araignée… une souris ! Manquerait plus qu’il y ait des souris dans le bâtiment.— Nooon ! Lui ! Gontran, je l’ai vu tout nu, il sortait de la douche. Musclé… juste velu comme il faut, et surtout, un machin… un machin je te dis que ça !Tel un pêcheur à la ligne qui multiplie par dix la taille de ses prises, elle donne une indication en écartant les mains, en gros 65-70 cm !— Tu n’exagères pas un peu, tempère Noémie.— Peut-être, mais pas des masses !— Ça se voit que Joël t’a quittée depuis quelques mois, tu nous fais une crise de manque, persifle la brune.— Joséphine n’a pas tort, imagine qu’il t’ait vue et qu’il nous fasse un procès pour harcèlement. Un genre #balancetapatronnecochonne.— Vous n’êtes que des rabat-joie, boude la blonde.Les trois jeunes femmes se quittent un peu fâchées. Si on n’a plus le droit de se rincer l’œil ni de rêver un peu, où va-t-on ?~o~Les jours passent, l’assurance verse un acompte sur l’indemnité prévue pour les malfaçons du plombier.— Si vous voulez que je répare, il me faut du matériel, lance Gontran à la cantonade un matin devant la machine à café.— Ben, allez en acheter, rétorque Noémie.— Justement, je ne peux pas, il faut ouvrir un compte, seule l’une de vous peut le faire.— Je suis trop occupée, répondent en chœur Joséphine et Noémie.— Je veux bien aller ouvrir un compte, mais vous m’accompagnez, nous en profiterons pour acheter ce dont vous avez besoin, parce que même si vous me faites une liste, seule, je vais faire des âneries, déclare Suzy. Faisons d’une pierre deux coups.— Allons-y de suite, il me faut passablement du matériel, ça va prendre du temps.— On prend ma voiture ?Il apprécie d’un œil critique la Twingo de la jeune femme.— Je préfère mon vieux break, nous pourrons y enfourner beaucoup plus de choses.Tout en conduisant, il devise avec la belle blonde.— Où allons-nous ?— Je pensais me rendre chez le Marché du Roi du Bricolage, la grosse enseigne de l’autre côté de la ville.— D’accord.Elle réfléchit quelques instants.— Au fait, ça nous ennuie de vous voir utiliser votre véhicule, nous songeons à acheter une camionnette, d’occasion bien sûr. Vous nous conseillerez pour choisir le modèle adéquat.— Ce serait plus pratique que la mienne, mais il ne faut pas mettre votre boîte dans la mouise à cause de moi.— Nous pourrions obtenir des aides, des subventions, enfin tout un tas de trucs comme ça !— Dans ce cas !Arrivés dans le magasin de bricolage, Gontran se faufile dans les travées tandis que Suzy règle les problèmes administratifs.Elle le rejoint au rayon robinetterie.— Au fait, nous pourrions repasser chez moi, j’ai aussi une sombre histoire de problème de robinet qui fuit, dans ma salle de bain, peut-être pourriez-vous me dépanner ?— Pourquoi pas ? Je vais voir ce que je peux faire.Ils mettent une demi-journée à acheter le matériel, payer la douloureuse de 2500 € et charger le tout dans la voiture. Ils terminent vers 12 heures, aussi Suzy invite son employé au restaurant, puis ils se rendent au domicile de la blonde patronne.— Voilà, mon appartement est là, au troisième.— Je prends quelques outils et je vous suis.Suzy ouvre la porte et lui montre la salle de bains.— Voyez, les robinets fuient. Ça fait des taches de tartre dans le lavabo, sans compter la facture d’eau.— Ce doit être une histoire de joints. Je vais vous les changer.— Moi je vais en profiter pour me changer tout court, ces achats m’ont rendue toute moite, vous n’êtes pas moite, vous ?— Euh… je ne crois pas.— Je vais chercher des vêtements propres.Sur ce, elle disparaît vers sa chambre tandis que Gontran coupe l’eau et démonte les robinets. Il se trouve à genoux sous le lavabo lorsque Suzy revient.— Je vais en profiter pour prendre une douche… Suis-je bêêête, vous avez coupé l’eau.Gontran devient soudain très moite lui aussi, car la blonde se trémousse à poil devant lui, son nez juste à la bonne hauteur pour apprécier le fin liseré de poils clairs surmontant le joli berlingot bien lisse, bombé à point. Il se cogne même la tête contre le lavabo en se relevant brutalement.— Vous pourriez me passer une serviette sur le dos, s’il vous plaît, vous seriez chou.— Houiii ! expire-t-il d’une voix d’asthmatique.Il frictionne le dos de sa patronne tandis qu’elle gémit d’aise.— Vous avez remis l’eau, Gontran ?— Oui, mademoiselle Suzy, l’eau remettre je vais, Yodise-t-il.— Alors je me douche… Restez, Gontran, vous me savonnerez le dos, j’ai une petite douleur à l’épaule qui m’empêche d’atteindre certaines zones… et puis appelez-moi Suzy tout court, je préfère.De plus en plus mal à l’aise, Gontran savonne sa patronne, de la nuque à la chute de reins, n’osant s’aventurer sur les fesses bombées. Suzy se retourne, pomme de douche en main, et arrose copieusement son employé.— Suis-je maladroite, se lamente-t-elle, vous êtes trempé, maintenant, c’est tout moi ce genre de bêtises.— Ce n’est pas grave, laissez.— Non, vous allez prendre froid, je vais vous sécher.Prendre froid… dehors il fait un bon 35°, et sa température interne doit approcher les 60°. Malgré ses dénégations, Suzy lui baisse son pantalon, le robinet à délices lui bondit au visage.— Ben dites donc, Gontran, vous me semblez bien énervé, faut pas vous mettre dans ces états.Sa main enserre le délicat appendice et opère des va-et-vient le long de la hampe. Elle dépose de légers baisers sur le museau de la bête, puis en gobe l’extrémité, tout en ne cessant de faire des commentaires.— Vous savez, Gontran, je suis masseuse bien-être… slurp… je sais ce qu’il vous faut… slurp… il faut vous laisser aller de temps en temps… slurp… vous détendre… slurp.Il ne peut pas repousser sa patronne et partir en courant, il a son pantalon sur les chevilles. Il ne peut pas lui attraper la nuque et s’enfoncer dans sa bouche comme un rustre, il lui reste un zeste de galanterie malgré le brouillard qui lui envahit l’esprit. Il ne peut que marmonner des :— Mademoiselle, je ne sais pas si c’est bien, vous ne devriez pas…Soudain, elle se relève et le regarde dans les yeux.— Gontran, connaissez-vous la différence qu’il y a entre un pénis et un fil à coudre ?— Euh, non, répond-il, surpris.— Il n’y en a pas, il faut en lécher le bout pour que ça rentre mieux dans le trou !Elle le repousse et le fait asseoir sur le bidet, lui enfile un préservatif, s’assied sur ses genoux, se saisit du mât de cocagne et le dirige vers son omelette baveuse.— Làààà, ça faisait longtemps, et ça fait un bien fou !Il ne peut le nier, ça fait du bien. Six mois qu’il n’a pas pratiqué. La dernière fois, c’était justement avec Joséphine/Érato.La fière étrave perfore Suzy de la cale à la dunette arrière. Les yeux fermés, elle savoure cet instant béni où un homme l’investit. La quille plantée au plus profond de son être, elle tortille du fion, ondule du croupion, s’alèse le pertuis sur ce morceau de choix.Gontran un instant perturbé par le fait que sa patronne le chevauche retrouve vite ses esprits et son instinct. La saisissant par les hanches, il l’aide à coulisser sur son pieu. Elle pousse de petits soupirs d’extase à chaque descente, ses petits seins en tressautent de joie. Gontran place les mains sous les fesses de Suzy et la soulève comme une plume. Elle l’aide à la manœuvre en le tenant par les épaules. Les seins passent et repassent devant son visage, il gobe un téton à droite, lèche le gauche et enfouit le nez entre les masses douces et souples.Elle ouvre les yeux, guettant sur le visage de son employé le début des festivités. Elles ne tardent guère, dilatation des pupilles, crispation des mâchoires.Elle émet un feulement de panthère et plante ses ongles dans les larges épaules, se serre contre lui en appelant sa maman – ben oui, à sa grande confusion, elle crie toujours maman lors du bouquet final.Gontran tient une furie entre ses bras, mais ne donnerait pas sa place pour un empire. Il balance la sauce en beuglant ô ksébon.Ils reprennent leur souffle dans les bras l’un de l’autre.— Merci, Gontran, c’était parfait.— Tout le plaisir était pour moi, mademoiselle Suzy.— Surtout pas un mot aux autres, elles ne comprendraient pas.— Je le conçois.Il a une pensée pour Joséphine et Noémie, il n’aime pas faire de la peine et il ne doute pas que ces dernières activités en fassent à ces deux jolies femmes.~o~— Vous en avez mis du temps à faire vos achats.— Ne m’en parle pas. Il a fallu chercher le matériel, puis passer en caisse, puis tout charger dans la voiture de Gontran…— Mouais, lorsque vous êtes revenus, il semblait à côté de ses pompes et toi tu as les yeux qui respirent le sexe, tu as le sourire orgasmique. Vous n’auriez pas fait autre chose que des courses, par le plus grand des hasards ?— Les yeux qui respirent… n’importe quoi, nous sommes juste allés déjeuner chez Maquedo !— Ne change pas de conversation ! C’était comment ?Suzy pousse un grand soupir.— C’était génial !— Qu’est-ce qui était génial ? s’enquiert Joséphine qui se radine.— Gontran, Suzy a goûté à notre homme à tout faire, et selon elle, il sait vraiment tout faire !La jolie brune se renfrogne.— Tu te rends compte qu’il peut nous poursuivre.— Vu sa tête, il aurait plutôt envie de poursuivre que de nous poursuivre, glousse Noémie.— Vous me faites honte, de véritables obsédées.~o~Quelques jours plus tard, une nouvelle réunion au sommet se tient après la fermeture du salon. Gontran s’est de nouveau servi de sa voiture personnelle pour transporter du matériel, au grand dam des trois drôles de dames. Il se trouve que le frère du père de Noémie gère une concession automobile, il leur a sélectionné quelques petits utilitaires. Véhicules révisés et garantis, pièces et main-d’œuvre par le tonton bienveillant.Les trois patronnes emmènent Gontran faire une visite à la concession, tenue par un oncle aussi roux que sa nièce, et après moult essais et conciliabules, choisissent un Kangoo châssis long tout équipé et au tarif de 7 500 euros, prix coûtant. Gontran suggère même l’idée de créer des flocages publicitaires à poser sur les flancs de la voiture.Quelques jours plus tard, Noémie tout émoustillée et son employé retournent chercher le véhicule. Le tonton fait signer des liasses de documents, leur donne les clefs, la carte grise, avant de les amener devant la voiture garée sur le parking.Ils font le tour du Kangoo, s’extasiant sur l’état de la carrosserie, sur les sièges et l’équipement intérieur, comprenant climatisation, autoradio, GPS, radar et caméra de recul, Bluetooth.Puis la rouquine ouvre les portes arrière et glapit de plaisir en découvrant le coffre recouvert de moquette. Elle s’y aventure à quatre pattes.— Venez voir, Gontran, la moquette est toute douce, il y a des compartiments partout pour ranger des trucs, des machins, des bidules.Il sourit devant l’enthousiasme de la jeune femme et la suit dans le coffre.— Regardez comme c’est beau !— Houais, répond-il, la voix enrouée.Gontran ne s’intéresse absolument pas à la moquette ni aux rangements. Noémie lui fourre sous le nez et même sur le nez, une paire de fesses bien rondes, potelées et blanches, censées être dissimulées par une mini-jupe et un micro-string qui révèlent plus qu’ils ne cachent. La mini-jupe est remontée sur la taille et le string disparaît entre les deux globes laiteux. Il repère même quelques éphélides sur ces jolies rondeurs.— Gontran ! Vous regardez mon string ?— Moi… nooon… je ne me permettrais pas…— Je rigole, je vous fais marcher. Vous avez déjà porté un string ?Gontran éprouve des difficultés à suivre la conversation et ne voit pas pourquoi il porterait des strings.— Je… n…— Je vous le déconseille, c’est beaucoup moins agréable qu’on ne le dit… d’ailleurs…Et de joindre le geste à la parole en le retirant.— Voilà une bonne chose de faite, rien ne vaut les culottes, vous savez, comme les petits bateaux. Le string vous rentre entre les fesses et se transforme en fil dentaire, si vous voyez ce que je veux dire… ça vous cisaille le périnée, une torture, surtout quand il fait chaud, comme aujourd’hui.— Rhoui, agonise le malheureux, qui effectivement se trouve à la limite du coup de chaleur.Il ne peut détacher son regard de ce joli minou roux au pelage bouclé qui lui fait penser à un Selkirk⁽⁴⁾, aux douces lèvres pulpeuses.— Gontran, je sais ce que vous avez fait avec Suzy.— C’é… c’était un accident !— Eh ben, je voudrais avoir le même accident, dit-elle en retirant sa jupe et son top. Nous ferons le constat plus tard.Comment résister à ces petits seins qui tressautent ? Gentleman jusqu’au bout des doigts, Gontran n’en est pas moins homme.— Mademoiselle Noémie, je ne sais pas si c’est une bonne idée, dit-il en baissant son pantalon.— Vous me trouvez moins bien que Suzy, insinue-t-elle.— Pas du tout, vous êtes aussi séduisantes l’une que l’autre, et élégantes, et intelligentes…Entre chaque qualificatif, Gontran goûte une épaule, un sein, égare ses doigts dans les bouclettes incandescentes.Il ne veut pas se fâcher avec ces charmantes jeunes femmes dynamiques. Qui pourrait se fâcher avec une jolie femme qui vous pétrit le harpon ?— Gontran, ne me faites pas languir, balbutie-t-elle en lui revêtant l’organe d’une houppelande, préparée à l’avance.Comment résister à un tel appel de la nature ?D’une seule poussée, l’homme à tout faire se retrouve aux tréfonds d’une tendre moiteur. Les bras et les jambes autour de son amant, Noémie se laisse envahir par les sensations. Elle sent arriver la vague qui va la submerger. Son cavalier sait y faire, tout en douceur au début, il accélère le tempo régulièrement pour terminer en un galop furieux. Le pubis de Gontran venant appuyer régulièrement sur le clito tendu la rend folle.— Gontran… Gontran… Gontran, psalmodie-t-elle comme une prière pour terminer par un chant de soprano : Gontraaaan !Certes, la moquette est un peu rêche à ses genoux, il a une pensée pour le dos de sa patronne, mais vu son état elle ne semble pas trop souffrir.Ils reprennent leur respiration, affalés l’un contre l’autre quand la rouquine se redresse et entreprend de redonner vigueur au membre flagada. D’abord lui retirer le condom, le fourrer dans une poche plastique pour ne pas laisser de trace – ou peut-être le garder en souvenir –, quelques coups de langue habiles, une subtile absorption de l’engin, quelques va-et-vient dans la bouche, une caresse aux valseuses, et le tour est joué, l’objet se retrouve en parfait état de fonctionnement, comme neuf.Elle se met à quatre pattes, le postérieur bien relevé. La moquette lui râpe un peu les genoux, mais elle n’y prête guère attention.— Viens, je t’en prie.Comment refuser quand c’est si gentiment demandé ? Surtout par une de ses patronnes, il est encore à l’essai, il ne faudrait pas la fâcher. Il caresse l’alberge bien juteuse, s’émerveille de la douceur de la peau, ce qui fait ronronner sa partenaire. Revêtu de son habit de lumière, s’il entame la chevauchée à la manière d’un gentilhomme, elle se transforme bien vite en une charge que n’eût point reniée le maréchal Murat à la bataille d’Eylau.Gontran a la tête dans les étoiles, il erre dans la grande nébuleuse d’Orion, Noémie étant son navire intersidéral.****José Zête sortit du garage pour prendre sa pause et fumer une clope. Son collègue et ami Maurice Magret vint le rejoindre. Ils discutaient météo et sport quand José s’étonna de l’étrange comportement d’un véhicule garé sur le parking.— Qu’est qu’il fout à remuer ainsi ce Kangoo, il n’y a pas de tremblement de terre.— C’est la bagnole que le patron a vendue à sa nièce, elle tient un salon de beauté avec des copines.— Ah ? La jolie rouquine ?— Elle est venue chercher la caisse avec un employé.Il ne voyait pas bien les relations de cause à effet, quand son œil s’éclaira.— Elle teste la suspension ! Avec l’employé !— Oui, puis l’équipement : clim, éclairage, épaisseur de la moquette…— Qu’elle fasse attention aux conséquences, courbatures et rougeurs aux genoux !****Ils reviennent au salon après s’être passé un peu d’eau un peu partout sur les endroits stratégiques et en ayant l’air aussi innocents que des chats qui viennent de bouffer le jambon.— Vous en avez mis du temps à rappliquer, s’étonne Suzy.— Oh, nous avons fait attention à ne pas avoir d’accident. Ne pas abîmer la voiture dès les premiers kilomètres, puis il faut bien la prendre en main !La blonde jette un regard suspicieux à la rousse. Gontran, l’air détaché, compulse la notice technique du Kangoo en jetant des regards inquiets aux deux jeunes femmes. Il les admire toutes deux et les estime beaucoup, il ne voudrait pas les blesser par son comportement. Sans oublier Joséphine. Dans quel merdier s’est-il fourré ?— Tu as les yeux qui brillent… lui a les jambes qui tremblent… tu as les genoux tout rouges comme qui dirait un des effets secondaires du syndrome Gilles de la Levrette… Vous avez baisé dans la camionnette !— Tout de suite les grands maux… disons que nous avons tout bien vérifié.— Oui, oui, je vois. Alors, ton avis ?Noémie pousse un grand soupir d’extase.— Mieux que tout ce que je connaissais.Le lendemain, Joséphine trouve ses deux amies occupées à célébrer des messes basses.— Encore un problème ?— Pas vraiment, répond Suzy.— Mais ?— Bon, on va pas tourner autour du pot, Noémie a testé Gontran. L’essayer c’est l’adopter.— Mais… mais… vous ne pouvez pas vous retenir, vous avez vraiment le feu au cul.— Arrête de geindre et de voir le mâle partout.— Ça ne peut pas continuer ainsi !Joséphine, la mine sombre, part à grandes enjambées rejoindre Gontran.— Jo ne l’engueule pas, ce n’est pas de sa faute, pleurnichent les deux autres, en vain.Elle le retrouve en train de poser des autocollants sur la voiture.— Gontran, j’ai deux mots à vous dire à propos de Suzy et Noémie.— Ah, vous êtes au courant, je suis désolé, je n’aurais pas dû.— Là n’est pas la question, mais moi, vous y songez, à moi ? Je sens le gaz peut-être, je suis devenue moche, transparente, translucide ?Gontran, stupéfait, bégaie des excuses confuses.— Si, vous jolie, mais nous avoir accord, nous pas recommencer, juste Uncoupd1soiR.— Au diable Uncoupd1soiR, au diable l’accord, je ne vous plais plus, je ne suis plus assez belle pour vous ?— Si… mais.— Alors pas de « mais ».Elle l’attrape par le col de chemise et l’entraîne vers les tables de massage. En chemin, elle se débarrasse de sa robe, comme lors de leur première rencontre elle ne porte rien dessous, heureusement que le centre n’ouvre que dans une heure et demie.N’ayant pas de temps à perdre, Joséphine baisse le pantalon de Gontran, qui manque de se casser la figure : un homme avec le pantalon sur les chevilles va moins vite qu’une femme à poil.— Mademoiselle Joséphine, Suzy et Noémie vont me voir !— Ça ne sera pas une première pour elles, grogne-t-elle en lui retirant le reste des vêtements, ça vous gêne maintenant ?Il n’ose répondre, car il la sent vraiment « colère » comme on dit par chez lui, surtout qu’elle le traîne derrière elle en le tirant par la queue sans ménagement. Elle le pousse sur une table.— Érato…— Chut.— Mais…— Silence, dit-elle, sévère comme son ancienne maîtresse d’école. Il ne moufte plus.Elle s’installe au-dessus de lui, tête-bêche. Elle lui embouche la trompette de Jéricho pour lui donner du tonus, la rendre apte à abattre des murailles de foufounes, des brunes, des blondes, des rousses ou même des glabres.Lui, pendant ce temps, reprend langue avec un minou brun, ayant énormément de choses à lui dire et à se faire pardonner.Satisfaite, Joséphine enrobe l’objet de son désir à la manière de Christo, puis se retourne et le place à l’entrée de son temple.— Maintenant, à nous deux, mon petit bonhomme, nous allons vérifier si Gontran et Thérée sont toujours une seule et même personne.****Gontran se pose des questions. Celle qui revient le plus fréquemment est : dans quoi me suis-je fourré ? Sans jeu de mots.Pourtant il aime ce boulot, il aime ses patronnes, certains diraient même un peu trop. Mais ça ne peut pas durer ainsi. Il ramène trois bouquets de roses et de lys, car il va faire de la peine à ces trois adorables jeunes femmes.****Au salon Corps de Rêve se tient une réunion au sommet, car la situation est grave.— Il se passe « Gontran », assène Joséphine, si nous ne faisons pas gaffe, nous allons le perdre, alors que faisons-nous avec lui ? J’ai entendu que la fleuriste veut lui faire voir ses boutons de rose, la boulangère lui réserve des miches et la maraîchère fait des allusions à peine voilées à ses concombres et courgettes. Même la poissonnière, qui est pourtant en couple, lui vante ses moules. Elles sont folles de lui, sans parler de certaines de nos clientes, mariées ou non… surtout les mariées d’ailleurs.Lorsque deux heures plus tard, ledit Gontran se ramène avec ses fleurs, il frappe discrètement à la porte du bureau.— Je voudrais vous faire une déclaration, dit-il en offrant ses bouquets. J’aime ce que je fais ici, je vous aime aussi, mais je crains que ça ne pose des problèmes très vite, vous allez vous disputer à cause de moi, et je ne veux pas briser votre belle amitié, alors je vais partir, même si ça me brise le cœur.— Que raconte-t-il ? demande Suzy.— Des bêtises, mais ce n’est qu’un homme, il ne faut pas s’en étonner.Le pauvre se demande ce qu’elles racontent quand Noémie reprend :— Mon cher Gontran, ne complique pas les choses. Elles sont déjà assez compliquées ainsi.— Mais…— Écoute ce que nous avons à te proposer, puis tu prendras ta décision, en ton âme et conscience.****Gontran songe à madame Fougnard, sa conseillère Pôle Emploi, qui lui déconseillait de postuler dans un salon de beauté très loin de chez lui.Si elle pouvait le voir à cet instant, elle en ferait une attaque.Une blonde coiffée à la garçonne et une rousse aux cheveux bouclés, nues comme le jour de leur naissance, se tiennent agenouillées à ses côtés, les fesses tournées vers lui, leurs lèvres soudées autour de sa hampe fièrement dressée glissent de la base au sommet de l’obélisque et en gobent chacune leur tour le gland et lui agacent les burnes.L’index de sa main gauche se faufile dans une moelleuse chatte rousse, tandis que son pouce en câline le bouton.L’index et le pouce de sa main droite se livrent à la même activité sur une chatte blonde.Mais il ne voit rien de ce qu’il fait, il travaille à l’aveugle, car une chatte brune est posée sur sa bouche et son nez lui entrave la vue. Joséphine, à califourchon sur son visage, se fait gloutonner la boîte à plaisir.Tout à ses sensations extraordinaires, il se remémore cette journée totalement folle.D’abord une engueulade : Gontran, arrêtez vos conneries, vous ne partirez pas.Puis une proposition. La Proposition. Une de celles que l’on ne peut repousser.— Nous te proposons de vivre avec chacune d’entre nous, une semaine l’une, une semaine l’autre, nous te proposons une garde alternée en quelque sorte.Il ne réfléchit que l’espace d’un battement de cœur. Qui serait assez fada pour refuser une telle opportunité.Et enfin, une des conséquences de sa situation actuelle, une fois par mois ils se retrouvent tous les quatre pour un week-end complet, rien que pour eux tous seuls, sans être dérangés, car le salon est fermé.Ils s’offrent un cinéma, un piquenique à la plage, un restaurant, selon l’humeur de l’instant. Ces journées se terminent toujours au lit, à quatre, comme ce soir. Pour, paraît-il, resserrer les liens.Il sent vibrer Joséphine au-dessus de lui, Noémie et Suzy la suivent de près, leur liqueur dégouline sur ses paumes et son visage, tandis que lui, dans un étourdissement, balance aux cieux son plaisir, telle une offrande aux Centaures et aux Muses.Gontran adore resserrer les liens.****⁽¹⁾Thérée : un des centaures, qui a eu une triste fin, tué par Hercule lors de la chasse au sanglier d’Érymanthe.⁽²⁾ Érato : Fille de Zeus et Mnémosyne, elle est la muse de la poésie lyrique et érotique.⁽³⁾ La perfection n’est pas de ce monde, donc je note 19 : célèbre citation du philosophe grec Soméone Else.⁽⁴⁾ Selkirk. Race de chats aux poils frisés.